12 mai 1753 (2) : Clairaut et le chevalier de Causans.
Du 6 mars 1742 : L'on sait depuis quelques jours que M. le chevalier de Causans, capitaine-lieutenant commandant le régiment de Conti, infanterie, a donné sa démission dudit régiment et a obtenu une pension de 1 500 livres (Luynes 60-65, vol. 4, p. 105). Du 14 décembre 1750 : Le Spectacle de l'Homme [(Causans 51)] est le commencement d'un ouvrage philosophique qu'on se propose de donner par parties. Ce que j'ai l'honneur de vous annoncer a été si mal reçu que je ne crois pas que l'auteur soit tenté de continuer. On se propose de combattre les pyrrhoniens, les sceptiques, les épicuriens, les athées et les déistes. Il faudrait plus de sagacité que n'en a notre philosophe pour trouver de bons arguments contre de tels adversaires, plus de méthode pour les mettre en œuvre, et plus de style pour les faire goûter (Grimm 77-82, vol. 2, p. 8). Du 12 juillet 1751 : Un visionnaire qui m'est tout à fait inconnu a entrepris un ouvrage intitulé le Spectacle de l'Homme [(Causans 51)], qu'il s'est proposé d'imprimer par cahiers. La chute de sa première partie ne l'a pas rebuté, et il vient de publier la seconde. Elle contient des réflexions sur la création ou l'ouvrage des six jours. L'auteur, après avoir rapporté ce qui se trouve dans l'Écriture sainte, lâche celles de ses opinions métaphysiques, morales, physiques et astronomiques qui y ont quelque rapport. Vous ne trouverez nulle part plus de visions et d'absurdités que dans cette brochure (Grimm 77-82, vol. 2, p. 83). Clairaut signe l'approbation du Prospectus apologétique pour la quadrature du cercle (Causans 53a) le 12 mai 1753 (cf. 12 mai 1753 (1)). L'auteur, après une longue introduction : Depuis plus de 2 000 ans, la quadrature du cercle a été regardée comme la clef de la géométrie, sans en être cependant la plus parfaite figure, puisqu'il y en a une encore plus parfaite, ainsi que je le prouverai. Je paraitrai téméraire en assurant que j'ai découvert une vérité qu'on a cherchée vainement depuis tant de siècles, mais il serait contraire à la raison de dire que ce qu'on ignore et qui est possible, nous sera toujours caché. Je demande pour toute question aux incrédules, et aux plus habiles, comment il peut être possible d'égaler deux quantités bornées, qui est tout le nœud du mystère. Je puis donc assurer que je ferai des démonstrations nouvelles, par des opérations inconnues, et j'établirai des axiomes de géométrie, sur des erreurs qui passent aujourd'hui pour des axiomes. Par exemple, je ferai voir évidemment, par une figure de géométrie, que le contenu est parfaitement égal en parties et en surface au contenant, très distinct du contenu ; qu'un globe qui tourne sur son axe en décrit ni un sphéroïde ni un épicycle ; qu'il est absolument impossible qu'un corps sphérique, de quelque façon qu'on le fasse mouvoir, décrive jamais une ellipse, ce qui détruit le système de Copernic. C'est par les effets de la quadrature du cercle que ces merveilles physiques se manifesteront. Voici les principaux avantages de ma proposition : 1° En connaissant parfaitement la valeur de la courbe, on pourra facilement la comparer avec toute ligne droite. 2°. Le rapport du diamètre à la circonférence du cercle, étant une fois connu, tous les points de la surface de la Terre deviendront centre de la latitude, de la longitude et du méridien, qui est ce qu'on cherche. 3°. On connaîtra la vraie figure de la Terre en la divisant toute en quarrés égaux. 4°. On verra sur les nouvelles cartes géographiques qu'on fera les véritables nadirs de tous les zéniths, c'est-à-dire les antipodes de l'une et l'autre hémisphère. 5°. On saura aux pleines lunes le vrai lieu du Soleil dans le firmament du ciel et des étoiles fixes en oppositions. 6°. On pourra mesurer avec précision tout le globe terrestre. 7°. Il y a apparence qu'on connaîtra la cause du flux et du reflux de la mer, le mouvement des planètes étant bien différent de celui qu'on croit qu'elles ont etc. Je propose pour cet ouvrage des souscriptions de mille liv[res] qui pourront être composées de tel nombre de personnes qu'on voudra : si les nations intéressées à cette grande et très utile découverte, voulaient composer un seul nombre de souscriptions, cela abrègerait de beaucoup le temps de la démonstration. Ceux qui voudront souscrire, pourront s'adresser à M. de Montmartel, garde du Trésor royal à Paris, qui, en recevant les sommes ou les soumissions, en donnera des récépissés, dans lesquels il sera fait mention que si l'auteur ne démontre pas géométriquement la quadrature du cercle, on rendra à chacun ce qu'il aura mis en dépôt sans aucune diminution ; et si l'auteur tient sa promesse, on lui délivrera les souscriptions qui doivent monter à quatre millions avant la démonstration, dont on enverra ensuite cent exemplaires à chaque royaume et état qui auront désiré d'y participer : les figures y seront gravées et jointes à l'explication la plus claire ; de sorte que l'usage en sera commun à tous pour l'intelligence et l'exécution. Le chevalier de Causans, ci-devant colonel du régiment d'infanterie de Conti, a l'honneur d'inviter les Académies des sciences de l'Europe, d'envoyer un député, qui en arrivant à Paris, recevront chacun cent louis chez M. de Montmartel, pour contribuer aux frais du voyage à tout événement. Tout sera fini en trois démonstrations consécutives, qui se feront publiquement à l'Académie des sciences à Paris. On avertira à temps afin que ceux qui voudront y assister puissent s'y trouver sans attendre (Causans 53a). Luynes, le 23 mai 1753 : II paraît un imprimé intitulé Prospectus [(Causans 53a)], sous le nom de M. le chevalier de Causan, qui croit avoir trouvé la quadrature du cercle. Il propose des actions à ceux qui voudront contribuer aux preuves qu'il fournira et M. de Montmartel pour répondant de l'argent avancé, qu'on rendra à ceux qui ne seront pas contents des démonstrations. Cet imprimé signé Clairaut, sans approbation, mais seulement lu et présenté au Roi, à la Reine, etc., va être supprimé. Le projet n'est pas trouvé suffisamment prouvé pour être donné au public, et M. de Montmartel s'est plaint qu'on y eût mis son nom. Je crois que c'est un mauvais conseil qu'on a donné au chevalier de Causans par une plaisanterie encore plus mauvaise (Luynes 60-65, vol. 12, pp. 453-455). Le Mercure de France donne un extrait de (Causans 53a) qui se termine ainsi : M. de Montmartel souhaite que le public soit averti qu'il a été nommé dans le Prospectus sans son aveu, et qu'il ne prendra aucune part à cette affaire (Mercure de France, juin 1753, vol. 1, pp. 214-215). Parallèlement, Liger fait enregistrer sa quadrature à la Librairie et entame une correspondance publique avec le chevalier de Causans (cf. 11 juin 1753 (1)). Le chevalier de Causans continue de battre le rappel dans L'apologie et les avantages de la quadrature du cercle (Causans 53b), rapporté dans le Mercure de France, d'août 1753, pp. 136-139. Il se tourne vers des notaires et fait publier son Analyse du prospectus pour la quadrature du cercle : Les trois démonstrations que M. le chevalier de Causans a proposé de faire sont : 1° De décrire une quarré parfaitement égal à un cercle quelconque. 2° De prouver que le contenu et le contenu du contenu sont géométriquement égaux au contenant, ce qui n'a jamais été dit. 3°. D'expliquer les véritable rapports du diamètre du cercle à sa circonférence. Finalement la quadrature géométrique du cercle. Il y aurait un moyen le moins onéreux et le plus flatteur, afin que du plus petit au plus grand, chacun participât à la gloire de contribuer à connaître des vérités et des avantages qui ont été désirés de tous les savants du monde, qui serait des souscriptions nationales et des souscriptions particulières de mille livres. Le simple aveu des souverains par leurs ministres suffira pour les nations respectives, et ceux à qui il plaira de souscrire se feront mettre sur l'état de Messieurs les notaires préposés, savoir, Messieurs Le Verrier, rue de la Monnoye, à la descente du Pont-Neuf, Aleaume, rue de Condé, Laideguive, rue des Grands Augustins, Chomel, rue Pavée, vis-à-vis la rue Françoise, Quinquet, près le Marché Saint-Germain, Boulard, rue S[aint]-André des Arts. Ces messieurs tiendront des registres pour Paris jusqu'au quinze septembre, pour les provinces jusqu'au premier octobre, pour les pays étrangers jusqu'au quinze. Alors, s'il y a soumission pour quatre mille souscriptions, M. le chevalier de Causans les réalisera pour cinq cents livres chacune ès main des notaires nommés, le quatorze d'octobre, et ceux qui auront fait leur soumissions les réaliseront pour mille livre chacune du quinze au vingt, lesquels notaires donneront lors du second payement des souscriptions en forme de dépôt comme il suit. « Je soussigné, notaire au Châtelet de Paris, reconnais qu'il m'a été déposé la somme de quinze cents livres, savoir 500 livres par M. le chevalier de Causans et mille livres par le porteur, pour appartenir et être remise aussitôt après le jugement de Messieurs de l'Académie des sciences de Paris, et des députés des académie des pays étrangers qui voudront s'y trouver, dûment signé de M. le secrétaire de l'Académie et à moi délivré par duplicata, sur les trois démonstrations proposées par M. le chevalier de Causans, dont copie est est en tête du présent récépissé, savoir au porteur, si le jugement est contraire audit s[ieu]r chevalier de Causans, ou au s[ieu]r chevalier et à son ordre si le jugement lui est favorable, et pour ma décharge le double du présent récépissé numéroté me sera remis acquitté par celui qui aura droit de recevoir en lui remettant ledit dépôt, au moyen de quoi l'autre demeurera nul, etc. le [blanc] 1753. » Quoique les souscriptions ne soient que de mille livres, on rendra quinze cents livres aux conditions ci-dessus mentionnées. On connaîtra par ce moyen la bonne volonté de ceux qui auront contribué à vérifier des propositions aussi surprenante qu'intéressantes ; et, du moment que les souverains auront agréé les souscriptions nationales, Messieurs les députés des pays étrangers pourront se rendre à Paris avec un certificat sur la foi duquel M. le chevalier de Causans fera remettre à chacun trois mille livres avant les démonstrations qui se feront les vingt-et-un, vingt-deux et vingt-trois d'octobre. Si on diffère de souscrire jusqu'après les termes marqués, Monsieur le chevalier de Causans sera dégagé de sa parole. Il fera usage de l'algèbre le moins qu'il sera possible dans les démonstrations pour ne pas abuser de l'attention des spectateurs qui seront à l'Académie royale des sciences de Paris (Causans 53c). L'extrait qu'en donne le Mercure se termine ainsi : Les conditions que M. le chevalier de Causans proposent aux souscripteurs sont si avantageuses que nous ne doutons point que les souscriptions ne soient bientôt remplies. Si contre notre espérance cela n'arrivait pas, l'auteur resterait maître de la campagne, ce qui est après la victoire, ce qui peut arriver de plus glorieux (Mercure de France, septembre 1753, pp. 146-147). Le 13 [novembre] 1753, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] : Dans le doute, Monsieur, si vous avés reçu la lettre que j'ay eu l'honneur de vous ecrire a la campagne, agréés, je vous prie, un second memoire pour [l'avis] que je desire de Messieurs de l'Academie. Vous m'obligeriés sensiblement, Monsieur, si vous pourrés me le retourner samedi prochain puisque ce serat [!] demain une assemblée generale et publique. J'yrai vous en remercier avec empressement et vous assurer que personne n'est plus parfaitement que moi, Monsieur, votre […], aimable et très obeissant serviteur Le ch[evali]er de Causans. A Paris, ce 13 [novem]bre 1753 (AAS, DS, novembre 1753). Le 17 novembre à l'Académie : J'ai lu une lettre de Mons[ieu]r le chevalier de Causans par laquelle il prie l'Académie de décider si la quadrature du cercle est impossible ou non : sur quoi on a été aux voix, et j'ai été chargé de lui répondre que la quadrature absoluë du cercle n'étoit démontrée ni possible ni impossible ; mais que l'inutilité des efforts que les plus grands géometres avoient fait jusqu'ici pour résoudre ce probleme, prouvoit au moins que la quadrature du cercle êtoit d'une extrême difficulté, et demandoit pour être seulement tentée, les plus grandes connoissances en géometrie (PV 1753, p. 631). Le [18] novembre, [Grandjean de Fouchy] [écrit] au [chevalier de Causans] : Mr Newton et plusieurs autres geometres après lui ont demontré que la quadrature infinie du cercle est impossible, c'est a dire qu'il est impossible de trouver une regle generale pour quarrer une portion quelconque de cercle, mais il n'est point demontré qu'il soit impossible de trouver la quadrature de l'aire entiere du cercle. Il n'est point demontré non plus que cela soit possible. Au reste les efforts inutiles que les geometres les plus profonds ont fait jusqu'à present pour resoudre le probleme de la quadrature du cercle prouve au moins que ce probleme est d'une extreme difficulté (AAS, DS, novembre 1753). Le 18 novembre, Grandjean de Fouchy rédige un certificat : Extrait des registres de l'Acad[émie] des sciences. Du 17 novembre 1753. Monsieur le ch[evali]er de Causans ayant proposé à l'Acad[émie] de décider si la quadrature du cercle etoit absolument à prouver geometriquement, l'Académie a jugé que la quadrature absolue de cercle n'est démontrée ny possible ny impossible mais que l'inutilité des efforts que les géomètres les plus profonds ont fait jusqu'icy pour résoudre le probleme de la quadrature du cercle prouve au moins que ce probleme est d'une extrême difficulté et demande pour estre seulement tenté les plus grandes connoissances en géométrie. En foy de quoi j'ay signé le present certificat à Paris ce 18 novembre 1753. Pour minute de Fouchy (AAS, DS, novembre 1753). Le chevalier de Causans rédige alors ses Dernières réflexions instructives de M. le chevalier de Causans, sur la quadrature du cercle : M'étant exposé à l'incrédulité et à la critique publique, je me trouve obligé d'éclaircir mon projet. Lors du premier prospectus [(Causans 53a)], j'étais occupé du doute et nullement de l'impossibilité et de l'inutilité de la quadrature du cercle qu'on a voulu généralement opposer ; ce qui m'a déterminé à consulter Messieurs de l'Académie des sciences, de la façon qui suit. « Extrait des registres de l'Académie des sciences. Du 17 novembre 1753. Monsieur le chevalier de Causans ayant proposé à l'Académie de décider si la quadrature du cercle était absolument impossible à trouver géométriquement, l'Académie a jugé que la quadrature absolue du cercle n'est démontrée ni possible ni impossible. Mais l'inutilité des efforts que les géomètres les plus profonds ont faits jusqu'ici pour résoudre le problème de la quadrature du cercle, prouve au moins que ce problème est d'une extrême difficulté, et demande pour être seulement tenté, les plus grandes connaissances en géométrie. En foi de quoi, j'ai signé le présent certificat, à Paris, ce 18 novembre 1753. Grandjean de Fouchy, secrétaire perpétuel de l'Académie royale des sciences. » Je n'ignorais pas qu'il serait imprudent d'annoncer qu'on a découvert ce qui est impossible, et tout aussi déraisonnable d'attribuer des propriétés au néant, il ne reste que d'en prouver l'utilité. [Il prétend qu'elle permettra de résoudre le problème des longitudes.] Pour épuiser les objections qu'on voudrait encore faire, je rappelle mes propositions : 1°. De décrire un quarré parfaitement égal à un cercle quelconque. 2° De démontrer qu'en géométrie, un est trois, et trois ne sont qu'un, c'est-à-dire que trois uniques figures de mécanique contenues l'une dans l'autre sont géométriquement égales, d'où il s'ensuit que chaque tout dans l'étendue a deux parties distinctes géométriquement et séparément égales à lui. Cette proposition qui détruit l'axiome le mieux établi, que le tout est absolument plus grand qu'une de ses parties, doit au moins exciter la curiosité de ceux qui aiment et qui recherchent les grandes vérités. 3° De prouver par une règle générale le véritable rapport du diamètre du cercle à sa circonférence. 4°. La quadrature géométrique du cercle. Si ces propositions paraissent douteuses ou impossibles, elles valent la peine d'être vérifiées ; si on les croit possibles, elle méritent le défi de les voir démontrer. Nombre de personnes ont demandé aux notaires préposés des souscriptions, en les payant comptant, ce n'est point de quoi il s'agit. Je vérifierai mes propositions avec 4 000 souscriptions comme il est écrit. On ne peut les recevoir en détail sans savoir auparavant si le nombre se trouvera. Il dépend des nations et des particuliers réunis d'en répondre, et en m'avertissant quatre jours d'avance, je fournirai mon contingent de 500 livres pour chacune. Le sixième jour, je commencerai les démonstrations, et le neuvième, les notaires nommés acquitteront les récépissés de 1 500 livres, dont 1 000 livres de la part des souscripteurs, et 500 cents de la mienne, le tout au jugement de l'Académie royale des sciences à Paris, et de messieurs les députés des académies des pays étrangers qui voudront s'y trouver, à qui je ferai remettre à chacun 3 000 liv[res] en arrivant. Ma justification m'intéresse trop pour en négliger les moyens et ne pas répondre aux difficultés qu'on a fait naître, en disant que j'ai proposé 4 000 souscriptions que par l'impossibilité de les voir remplir, et que je ne satisferai pas à la condition qui me regarde de 500 livres par souscriptions. J'ai parlé à l'Europe, il est bien aisé de s'instruire sur ce dernier article. Si je manque ma parole, je joindrais ma voix aux autres pour ma confusion. Si j'ai tort dans les démonstrations, la peine que je m'impose me mettra à l'abri de tout reproche. Je puis donc penser que si l'on persiste dans l'indifférence sur mes propositions, d'après les facilités que je donne pour les vérifier, ce sera un effet de la libre volonté, et de rien que l'on puisse m'imputer ; mais alors ce serait avouer qu'on méprise des connaissances qui ont paru dans tous les temps dignes de l'attention et de la générosité des plus grands rois, ce qui empêcherait pour toujours tout homme sensé de tenter de nouveau progrès dans la géométrie, qui est cependant la science la plus utile, la plus féconde et la plus digne de l'entendement ; et en supposant cet aveu universel, je serais à mon particulier assez discret pour ne dire et n'écrire jamais ce qu'on aurait voulu si constamment ignorer. Je déclare authentiquement que je n'ai consulté personne, et que je suis seul dépositaire de mon secret (Causans 53d). Ces Dernières réflexions sont insérées dans le Mercure de France, décembre 1753, vol. 2, pp. 157-163. Le 1er janvier 1754, le chevalier de Causans rédige sa Réponse de Monsieur le chevalier de Causans à un des ses amis de Londres : On pense à Paris, Monsieur, comme à Londres. Il a fallu un certificat de l'Académie royale des sciences pour détromper le plus grand nombre sur la prétendue impossibilité de la quadrature du cercle. Il est cependant raisonnable de douter que j'aie trouvé ce qu'on a cherché inutilement pendant trente siècles. La quadrature du cercle sera la base des sciences, la perfection des arts et des mécaniques sans exceptions. Les souverains ne sauraient trop estimer de tels avantages en les procurant à leurs sujets. Le moyen qui m'a paru les plus honnête et le plus efficace pour vérifier la quadrature du cercle a été d'inviter l'utile curiosité par des souscriptions réciproques auxquelles les savants et les riches pourront aussi contribuer glorieusement par leurs désirs et leurs facultés. Vous savez, Monsieur, que je propose encore d'expliquer le plus incompréhensible mystère de la nature. Si je démontre qu'un tout quelconque a deux parties distinctes séparément et géométriquement égales à lui, quel avantage ne retirerait-on pas d'un vérité qui, en détruisant l'erreur la plus ancienne et la plus générale, prouverait que le tout n'est pas absolument plus qu'une de ses parties. Jamais les nombres sourds et muets qui se perdent dans les bornes de la matière ne serviront à découvrir ce prodige de géométrie qui est uniquement du ressort de l'intelligence, essence de l'âme, qui peut seule pénétrer dans l'infini en s'élevant jusqu'au trône de la divinité dont elle est émane. Pour lever tout scrupule, Monsieur, et aplanir les difficultés, je trouverai des parents et des patriotes qui, sans déranger leurs fortunes, se prêteront volontiers, comme bons citoyens, à mes engagements d'honneur. Ayant donné et renouvelé ma parole que je fournirai, lorsqu'on le voudra, 500 livres pour chaque souscription de 1 000 livres, ainsi les nations qui composent les empires, les royaumes et les autres états n'auront plus la peine de demander où sont les souscriptions : c'est à moi de dire où sont les souscripteurs qui veulent participer à la reconnaissance universelle. Je suis, Monsieur, etc. À Paris ce premier janvier 1754 (Causans 54a). Le chevalier de Causans fait publier un billet de souscription : 1754 Souscripteur... 1 000 # Auteur... 500 # Billet de souscription pour la quadrature du cercle, payable au porteur, après le jugement de l'Académie royale des sciences et des députés étrangers qui voudront s'y trouver, à Paris. Proposition à vérifier 1°. Décrire un carré parfaitement égal à un cercle quelconque. 2°. Démontrer qu'en géométrie un est trois, et trois ne font qu'un, c'est-à-dire que trois uniques figures de mécanique contenues l'une dans l'autre sont géométriquement égales, d'où il s'ensuit que chaque tout dans l'étendue a deux parties distincte géométriquement et séparément égales à lui. Cette proposition détruit l'axiome universel le mieux établi que le tout est absolument plus grand qu'une de ses parties. 3° Prouver par une règle générale le véritable rapport du diamètre du cercle à sa circonférence. 4° Donner la quadrature géométrique du cercle. Chaque état et ville qui prendront au moins cent souscriptions pourront envoyer un député pour assister aux démonstrations, à qui on remettra trois mille livres en arrivant à Paris. Récépissé des notaires Je soussigné, notaire au Châtelet de Paris, reconnais qu'il m'a été déposé la somme de 1 500 livres, savoir 500 liv[res] par M. le chevalier de Causans et 1 000 liv[res] par le porteur, pour appartenir et être remise aussitôt après le jugement de Messieurs de l'Académie des sciences à Paris, dûment signé de M. le secrétaire de l'Académie et à moi délivré par duplicata, sur les quatre propositions comprises au dos de la présente reconnaissance, savoir au porteur, si le jugement est contraire audit sieur chevalier de Causans, et au sieur chevalier ou à son ordre si le jugement lui est favorable, faute par ledit sieur chevalier de Causans d'avoir donné les démonstrations avant le 25 du mois de juin prochain préfix, le souscripteur retirera les 1000 liv[res] par lui déposées et 100 liv[res] en sus par forme de dédit sur les 500 liv[res] déposées par ledit sieur chevalier de Causans et les 400 liv[res] de surplus lui seront rendues, sans que leur présence respectives soit nécessaire à la remise ci-dessus, et pour ma décharge le double du présent récépissé sera remis et acquitté par celui ou ceux qui auront droit de recevoir ledit dépôt, et au moyen de quoi l'autre demeurera nul. À Paris le [blanc] du mois d[blanc] 1754 (Causans 54b). Le chevalier en adresse au président de la Royal Society, ainsi que le rapporte le Mercure de France : Lettre de M. le chevalier de Causans à Milord Macclesfield, président de la Société royale de Londres Milord, vous verre par les billets de souscriptions ci-joints l'étendue et les difficultés de mes propositions, et comme je ne veux rien avoir à me reprocher pour les vérifier, je m'adresse, Milord, avec confiance à la Société royale de Londres, dont les lumières distinguées font la gloire de la nation pour la science. Ma satisfaction sera parfaite, si celle que j'offre de démontrer paraît digne de la Société royale, et si elle approuve le moyen dont je me sers pour la vérifier, qui est aussi nouveau que les propositions sont curieuses et intéressantes, puisque j'assure que les longitudes principalement en dépendent, par la connaissance de la vraie figure de la Terre. Quant aux autres propriétés, étant infinies, les académies auront la gloire de puiser dans ce trésor. Agréez, je vous prie, Milord, que je vous demande si la Société royale approuve ma façon de parler là-dessus, et si elle désire quelque éclaircissement que je puisse donner. J'ai l'honneur d'être, Milord, etc [suit une version abrégée du bulletin de souscription (Causans 54b)] (Causans 54c). En avril 1754, le chevalier de Causans rédige son Éclaircissement définitif de M. le chevalier de Causans sur la quadrature du cercle : Après avoir proposé des vérités incroyables à prouver, il a fallu s'attendre aux difficultés que l'incrédulité peut faire naître, et qu'il faut tâcher de détruire efficacement. Les notaires au Châtelet de Paris préposés par M. le chevalier de Causans, savoir Messieurs Le Verrier, rue de la Monnoye, à la descente du Pont-Neuf, Aleaume, rue de Condé, Laideguive, rue des Grands Augustins, Chomel, rue Pavée, vis-à-vis la rue Françoise, Quinquet, près le Marché Saint-Germain, Boulard, rue S[aint]-André des Arts, délivreront des souscriptions à commencer le 15 du présent mois d'avril, et jusqu'au 15 du mois de juin prochain. Ce terme expiré, je démontrerai à l'Académie royale des sciences, du 15 au 25 dudit mois de juin, si le nombre de souscriptions auquel je voudrai me borner est rempli, et au cas qu'il ne le soit pas, il sera libre à M. le chevalier de Causans de ne pas donner lesdites démonstrations, mais alors les notaires nommés et dépositaires remettront aux souscripteurs 1 100 liv[res] pour chaque souscription de 1 000 liv[res] ce qu'ils inséreront et signeront au dos des billets de souscription dont voici le contenu et le modèle. [Copie de Causans 54b] Les grands, les patriotes, les savants et les riches découvriront au genre humain par ce moyen le plus avantageux et le plus incompréhensible mystère de la nature, si je démontre, comme je le propose, qu'un tout en géométrie a deux partie distinctes séparément, géométriquement et numériquement égales à lui, et procureront la connaissance parfaite de la figure de la Terre, des longitudes et de toute l'étendue de la vraie, de l'inconnue, de la transcendante et admirable géométrie pratique. Je m'en rapporte présentement à la conviction intérieure de chacun en particulier, si je suis en règle, et sur ma parole et à l'égard du public (Causans 54d). Son Éclaircissement définitif est inséré dans le Mercure de France, juin 1754, vol. 1, pp. 210-211. Hullon croit tout comme le chevalier de Causans avoir trouvé la quadrature du cercle et propose que le sujet soit proposé pour le prix de l'Académie. Gandjean de Fouchy lui fait savoir que les sujets sont déjà donnés pour les trois années à venir (cf. 5 avril 1754 (1)). Le 27 avril 1754 : J'ai aussi lu une lettre de M[onsieu]r le chevalier de Causans qui prie la compagnie de le juger, et je dois lui repondre de sa part, qu'elle ne peut prononcer sur cette question, sans y être autorisée par un arrest du conseil, parce qu'attendu les dépots qu'on assure être faits, son affaire pourroit être de nature à devenir contentieuse (PV 1754, p. 189). Le 15 mai, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] : Monsieur, Je me suis acquitté exactement de ce que l'Académie des sciences a desiré au sujet de l'arrest du Conseil pour ce qui me regarde. Monsieur le comte d'Argenson a eû la bonté, Monsieur de se charger de ma requete au Roy qui a repondu que M[onsieu]r le comte d'Argenson vous donnera les ordres de Sa Majesté pour l'Académie, ainsy que je le tiens de luy. Permettez, Monsieur, que je vous représente que les interessés et moi dans les souscriptions pour la quadrature du cercle nous en rapportant entierement par les prôpres billets à la decision de l'Académie, il ne nous reste aucun scrupule, et que si l'Académie ne se croit pas suffisamment authorisée pour dire si je me suis trompé ou non sur des propositions géométriques, il me paroit que l'Académie doit demander de plus amples pouvoirs. Je vous seray très obligé, Monsieur, de ne laisser pas ignorer à l'Académie ce que j'ay l'honneur de vous mander, afin que rien ne s'oppose aux démonstrations que je dois donner, et qu'on ne peut retarder sans les anéantir. Vous en voyés, Monsieur, la conséquence. Je vous prie de me tranquil|l]iser la dessus et d'etre bien persuadé qu'on ne peut rien ajouter aux sentimens avec lesquels j'ay l'honneur d'etre, Monsieur, votres très humble et très obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. A Paris, ce 15 may 1754 (AAS, DS, mai 1754). Le 15 mai : J'ai lu une lettre du chevalier de Causans qui prie l'Academie de solliciter l'arrest du conseil dont elle veut être autorisée à la décision des propositions sur la quadrature du cercle qu'il soûmet à son jugement ; et je dois lui répondre que sur cette affaire la délibération de la compagnie, est d'attendre les ordres du Roy (PV 1754, p. 216). Le 15 mai, Liger écrit à l'Académie des sciences : Démonstration de Pierre Liger qu'il a l'honneur de présenter à M[essieu]rs de l'Academie des ciences de Paris dont il espere réponse et justice aut[h]entique. Cette démonstration prouve que Liger est l'auteur de la proposition que M. le chevalier de Causans a publiée sur la quadrature du cercle. [maths] Donc ma quadrature est démontrée invinciblement […] J'ai l'honneur d'etre avec un profond respect, Messieurs, votre tres humble et tres obeissant serviteur Liger, ancien commis au bureau de la guerre. A Versailles le 15 may 1754 (AAS, DS, mai 1754). Le 18 mai : J'ai presenté de la part de M[onsieu]r Liger commis au bureau de la guerre deux brochures imprimées et un mémoire par lesquels il réclame la quadrature de M[onsieu]r le cheval[ie]r de Causans (PV 1754, p. 219). Le 24 mai, le chevalier de Causans rédige un Supplément du chevalier de Causans, à l'éclaircissement définitif sur la quadrature du cercle : Propositions à vérifier. 1°. Décrire un carré parfaitement égal à un cercle quelconque. 2°. Démontrer qu'un tout en géométrie a deux partie distinctes, séparément, géométriquement et numériquement égales au Tout. 3° Prouver par une règle générale le véritable rapport du diamètre du cercle à sa circonférence. 4° Donner la quadrature géométrique du cercle qui présentera la vraie figure de la Terre, et la précision des longitudes sur toute sa surface. Si une des quatre propositions ci-dessus paraît dans les démonstrations, fausse, obscure ou douteuse, le chevalier de Causans se tiendra pour condamné. Si d'aujourd'hui au vingt-cinq du mois de juin prochain, terme préfix, les démonstrations ne sont pas données, pour quelque cause que ce puisse être, les notaires dépositaires rendront sans aucune difficulté le 26 du même mois 1 100 l[ivres] aux souscripteurs pour chaque souscription de 1 000 livres. Quelque nombre de souscriptions qu'il puisse y avoir avant les démonstrations, si une société se présente pour en prendre 4 000, et que le chevalier de Causans refuse de fournir son contingent de 500 liv[res] pas souscription, et de ne donner les démonstrations des quatre propositions ; alors toutes les souscriptions antérieures appartiendront de droit entier aux souscripteurs le vingt-six dudit mois de juin sans autres formalités. Si l'on imagine encore quelque condition en faveur des souscripteurs, le chevalier de Causans s'y soumettra très volontiers. Il continue de déclarer parole d'honneur qu'il n'a consulté ni dit son secret à personne du monde. À Paris, le 24 du mois de may 1754 Signé, le chevalier de Causan (Causans 54e). Son Supplément à l'éclaircissement définitif est inséré dans le Mercure de France, juin 1754, vol. 1, pp. 210-211. Selon Estève : On vit paraître des souscripteurs, et il y eut bientôt environ six cent milles livres déposés à cet effet par différents particuliers chez les notaires indiqués (Estève 55a, p. 6). Dans l'extrait de (Estève 55a) présenté par le Mercure : Il n'est presque personne qui ignore que M. le chevalier de Causans croit avoir trouvé la quadrature du cercle : il a du moins annoncé plusieurs fois dans tous les journaux la nouvelle de cette découverte. D'abord il avait fixé sa récompense à quatre millions qui devaient lui être donnés en forme de souscription, mais lorsqu'il y a eu seulement six cent mille livres, il a bien voulu publier ce qu'il appelait une découverte merveilleuse (Mercure de France, septembre 1755, pp. 89-93). Vers la même époque, le chevalier de Causans écrit une « Lettre circulaire du chevalier de Causans aux archeveques et eveques de France » : C'est un devoir pour moi de m'adresser au plus respectable et au premier corps du royaume lors qu'il s'agit d'exercer des sentimens qui interressent toutes les nations. Mon eclaircissement definitif sur la quadrature du cercle justifiera à tout evenement l'interest que le clergé de France y prendra et servira a manifester authentiquement si ma confiance est présomptueuse ou le jugement du public trop précipité en me condamnant sans m'entendre. Je desire, Monseigneur, une chose juste : de me punir moi mesme si j'ay tort ou de découvrir les plus importantes vérités. L'amour du bien public et la bonté pastorale me font esperer, Monseigneur, que vous agréerez ce detail et que vous penserez qu'il seroit facheux de garder pour moi seul un secret de cette conséquence que je ne tiendray caché qu'autant qu'on ne voudra pas le sçavoir. Je suis bien flatté, Monseigneur, de vous témoigner dans cette occasion tout le respect avec lequel j'ai l'honneur d'etre etc (Bibliothèque de l'Arsenal, Fol. S. 1167, 5). Suit : Pour les démonstrations de la quadrature du cercle Premiere proposition Décrire un quarré parfaitement egal à un cercle quelconque. Cette proposition est prouvée dans l'ecriture par Jesus Christ même. Seconde proposition Qu'un tout en géométrie a deux parties distinctes contenues l'une dans l'autre, qui sont séparément, géométriquement et numériquement egales au tout. Cette proposition est une trinité géométrique à démontrer. Troisieme proposition Prouver par une regle générale le véritable rapport du diametre du cercle à sa circonference. Cette proposition est prouvée litéralement par l'ecriture sainte. Quatrieme proposition Donner géométriquement la quadrature du cercle. Cette proposition, en prouvant la vérité des trois autres, présentera en même tems la vraye figure de la Terre et la précision des longitudes sur toute sa surface. Le chevalier de Causans assure sur son honneur de démonter mot à mot les quatre propositions cy dessus et supplie le Roi de le punir le plus rigoureusement s'il manque a la moindre circonstance (Bibliothèque de l'Arsenal, Fol. S. 1167, 5). Il écrit une « Lettre du chevalier de Causans à M[essieu]rs de l'Académie des sciences » : Messieurs, Vous conviendrés sans peine que c'est une grande erreur d'attribüer aux anciens la principale gloire dans les sciences. Plus le monde vieillit, plus il devient sçavant par de nouvelles decouvertes et de sçavantes dissertations. Les ouvrages de plusieurs illustres génies de nos jours en sont des preuves convaincantes. La géometrie est sans contredit, Messieurs, la science la plus certaine et la plus digne de l'entendement. Nous n'en connoissons ni tous les principes ni toute l'etendüe. Je vous propose, Messieurs, de nouveaux principes qui ne laisseront a desirer que les avantages infinis que vous y découvrirés. Je vous présente, Messieurs, un beau diam[a]nt que vos lumieres rendront très brillant a tous les yeux, puisque les hommes, les femmes et les adultes pourront pratiquer toutes les opérations de géométrie jusqu'à present inconnües et dont j'offre le moyen. Vous doutés, Messieurs, raisonnablement, mais desirés, je vous prie, par la vérification de la quadrature du cercle a l'egard de la proposition que la partie d'un tout est géometriquement et numériquement égale au tout. L'incredulité la dessus est fondée sur la notion universelle, je demande cependant de prouver géometriquement cet article et en vous prenant pour juges, je me soumets a l'equité. Suspendés, Messieurs, vôtre jugement, la douceur de vos préjugés éffacera l'amertume que pourroit me causer la crainte de l'erreur que j'espère anéantir en détrompant les sens par l'experience et le raisonnement. Je respecteray, M[essieu]rs, vôtre decision, je m'y soumettray avec la confiance dûe a la droite raison qui est pour moi la meilleure sollicitation près de vous. Agréez, je vous conjure, le temoignage du respect avec lequel j'ai l'honneur d'etre etc (Bibliothèque de l'Arsenal, Fol. S. 1167, 5). Suit en manuscrit ce qui correspond à (Causans 54f, pp. 10-20). Le 22 juin 1754 : J'ai lu à l'Académie la lettre suivante de Mons[ieu]r le cheval[i]er de Causans. MM. Je remplis mon engagement en vous faisant part avant le 25 de mes démonstrations [Manuscrit de (Causans 54f)], ne vous ayant pas plu MM. de donner une décision : vous pouvés en juger en attendant chacun en particulier. J'ai l'honneur d'être avec respect M[essieu]rs etc. A Paris ce 19 juin. Après la lecture de laquelle j'ai présenté le cahier de ses démonstrations, sur quoi l'Académie ayant déliberé, j'ai êté chargé de lui renvoyer ce cahier cacheté, et de lui écrire la lettre suivante, ce que j'ai fait sur le champ. M. j'ai lu vôtre lettre à l'Académie comme je vous l'avois promis hier ; j'ai présenté en même temps le cahyer de vos demonstrations. L'Académie ne pouvant prendre aucune connoissance de cette affaire, sans y être autorisée par le Roy conformément à sa déliberation du 27 avril, n'a pas voulu ouvrir ce paquet, et m'a chargé de vous le renvoyer cacheté, et de vous écrire cette lettre que vous pouvés faire voir comme une preuve qu'il n'a pas dépendu de vous de remplir vos engagements, et d'être jugé avant le 25 de ce mois (PV 1754, p. 303). Luynes, du 10 juillet 1754 : Je ne sais si j'ai parlé en détail de l'affaire du chevalier de Causans. Il a cru avoir trouvé la quadrature du cercle et être en état de le prouver par des démonstrations. Il a répandu dans le public plusieurs imprimés, afin que non seulement dans le royaume, mais même dans les pays étrangers, on fît des paris contre lui ; il a paru même désirer avec grande vivacité ces paris, et quelques-uns de ceux qui dans la conversation avaient dit qu'ils parieraient la proposition impossible à prouver ont été sollicités fortement à ne pas s'en tenir à des paroles et de réaliser les paris. M. de Stainville a été de ce nombre, et s'est trouvé engagé à une partie d'une pari de 100 000 livres. Les notaires ont été nommés et ont donné leurs obligations particulières pour, après le jugement de l'Académie des sciences, remettre à ce M. de Causans ou à ceux qui auraient gagné, en se conformant exactement aux conditions énoncées dans les imprimés. M. de Causans a sollicité fortement tous ceux sur qui il avait des rentes viagères de vouloir bien le rembourser pour le mettre à portée de faire honneur à ses engagements. Heureusement pour lui, cet arrangement lui a été refusé par quelques-uns. L'argent étant chez les notaires et le terme fatal du 25 juin étant passé, il était question de prendre un parti décisif ; l'Académie des sciences a refusé de prononcer, disant qu'elle jugeait des questions et non pas des procès, qu'il lui fallait une attribution particulière par des lettres patentes. Le Roi n'a pas jugé à propos de donner ces lettres. Dans cette situation, M. de Causans a cru devoir prendre des précautions autant qu'il dépendait de lui : il a remis sa démonstration par écrit entre les mains du Roi, de M[on]s[eigneu]r le dauphin, de M. de Saint-Florentin, etc. Il dit qu'il a gagné, on lui répond que sa démonstration n'est pas une preuve, et il soutient qu'elle en doit tenir lieu, puisqu'il n'y a point de jugement. Voilà l'état de l'affaire, on trouvera ci-après les propositions contenues dans le dernier imprimé de M. de Causans [suit un extrait de (Causans 54e)] (Luynes 60-65, vol. 13, p. 293-295). Le chevalier de Causans publie (Causans 54f). Un note manuscrite en tête de l'un des exemplaires de (Causans 54f) conservé à la Bibliothèque de l'Arsenal : Très belle ed[iti]on d'un memoire qui a fait du bruit par l'obstination avec laquelle l'auteur au soutenu sa pretendüe decouverte contre le sentiment de tous les geomètres. Joseph Louis Vincent de Moleon de Causans, ch[evali]er de Malthe est né à Avignon. Il avoit donné av[an]t cet ouvrage cy le Spectacle de l'homme in 12 [(Causans 51)] et il a fini par donner en 1758 des Eclaircissemens sur le peché originel [(Causans 55c)], autre ouvrage singulier (Bibliothèque de l'Arsenal, 4 S 3062). Montucla : Je n'ai rien dit, dans le cours de cet ouvrage, de l'auteur de l'étrange prospectus et de quelques autres pièces de la même nature, qui nous annoncèrent l'été passé la quadrature du cercle. Par égard pour son nom et ses autres qualités qui le rendent estimable à ceux qui le connaissent, en même temps qu'ils le plaignent de sa manière de penser, qui n'a peut-être jamais eu d'exemple, je voulais me taire sur la singularité de ses prétentions, malgré le bruit qu'elles faisaient dans le monde. J'espérais que quelques amis ou versés, ou du moins plus instruits dans la géométrie, le remettraient sur la voie de la vérité ; mais la publication de sa prétendue quadrature, dans un petit in-4° magnifiquement orné de cartouches, vient de m'apprendre qu'apparemment on y a travaillé sans succès ; et j'ai cru ne pouvoir me dispenser d'en porter le jugement qu'elle mérite. Les siècles à venir croiraient-ils, si ce monument ne le leur attestait, qu'on ait pu avancer des propositions aussi absurdes, aussi directement contraires à la saine raison, que celles sur lesquelles cet auteur appuie sa prétendue découverte, et qu'il substitue aux axiomes jusqu'ici reçus de l'aveu de tous les hommes ? Deux figures ne sont plus égales quand elles se touchent dans tous leurs points, dans toute leur étendue ; il suffit, suivant M. de Causans, qu'elles se touchent dans quelques points, c'est-à-dire dans ceux où elles peuvent se toucher. De là, suit aussi ce nouveau principe, digne rejeton d'un axiome de cette espèce, que la partie est égale au tout. Que dis-je ? que dans chaque tout on peut assigner plusieurs parties qui lui soient égales. Aussi le quarré est, dit-il, précisément égal au cercle qu'il renferme, et même celui-ci à une autre figure dont les angles saillants s'appuient seulement sur sa circonférence. L'auteur enfin détermine la figure de la Terre, les longitudes, la déclinaison de l'aiguille aimantée, sur des raisons qui n'en seraient ni plus ni moins valables, quand la Terre serait de forme cubique ou pyramidale. Je me couvrirais de ridicule auprès des lecteurs sensés, si j'entreprenais d'opposer les moindres raisonnements à ces prétentions. Il n'est personne, faisant usage de sa raison, qui ne soit persuadé que les vérités métaphysiques contestées par M. de C[ausans] sont plus certaines qu'il ne l'est que jamais son prospectus singulier ait vu le jour, qu'il y ait eu des souscriptions ouvertes pour parier contre lui, et qu'il ait publié sa quadrature. Pour tout autre enfin que lui-même, elles sont plus incontestables que son existence propre. Au reste, il est bien facile de reconnaître la cause de l'erreur de M. de C[ausans] : elle a sa source dans la méprise où il donne sur la simple définition de l'angle et sur ce qui le constitue. La surface renfermée entre ses côtés, la longueur de ces côtés n'entrent pour rien dans la grandeur d'un angle, et cette grandeur ne sert à rien pour déterminer la surface qu'il renferme avec une troisième ligne qui le borne. M. de C[ausans] suppose néanmoins le contraire, et en fait le fondement de sa quadrature ? C'est en savoir encore trop peu en géométrie pour prétendre redresser les idées des géomètres (Montucla 54, pp. xxv-xxix). De Croÿ, le [10 août 1754] : Étant dans les Tuileries, […] je trouvai M. Lemonnier. Des goûts pareils nous liaient. Je m'assis sur l'herbe avec lui et m'y oubliais. Je lui montrai la figure de la quadrature du cercle, de M. le chevalier de Causans [(Causans 54f)], qui avait trouvé à faire un carré à centre vide égal et semblable à un cercle à centre plein. On avait beau lui dire que ce n'était pas la même chose, c'était sa folie, et il m'en avait entretenu une heure la veille (Croÿ-Solre 04-06, vol. 1, p. 278). Du 15 août 1754 : Vous avez peut-être entendu parler de la ridicule affaire du chevalier de Causans, qui prétendait avoir trouvé la quadrature du cercle, qui proposait au public de parier contre lui trois millions, et consentait de perdre un million et demi au cas qu'il ne pût pas la démontrer. L'Académie des sciences, ne voulant pas juger une aussi ridicule affaire, M. de Causans prit le parti de découvrir son secret [(Causans 54f)], secret digne d'un écolier des basse classes ou d'un habitant des Petites-Maisons. Il vous coupe un cercle par le milieu, replie les morceaux, et parvient ainsi à en faire un carré. C'est aujourd'hui du grand air d'aller, après souper, sur les boulevards voir les marionnettes ; tout ce qu'il y a de plus grand et de plus connu à Paris s'y trouve. Comme l'affaire du chevalier de Causans a fait beaucoup de bruit dans le monde, Polichinelle n'a pas manqué d'en faire mention : J'ai trouvé la quadrature du cercle, dit-il. - Et comment cela ? demande la compère. - En causant, dit Polichinelle ; et cela nous fait rire (Grimm 77-82, vol. 2, 15 août 1754, p. 400). Le 4 septembre 1754, le chevalier de Causans écrit à Grandjean de Fouchy : A Paris, ce 4 [septem]bre 1754 Monsieur, Ne desirant rien tant que de me détromper si j'ay tort, et de m'instruire par les lumieres de l'Academie des sciences, je vous prie, Monsieur, d'avoir la complaisance de lire a l'assemblée ce mémoire que j'ay l'honneur de vous adresser, quoiqu'il soit contenû en substance a la suite de la demonstration que j'ai donnée de la quadrature du cercle. N'y ayant […] rapport de l'un a l'autre, je le flat[t]e, Monsieur, que l'Academie n'aura aucun scrupule de decider si l'exemple que je donne est vrai ou faux. Il est reconnû, comme vous sçavés, Monsieur, par tous les geometres que la diagonale d'un quarré est incommensurable avec un de ses côtés. Ma methode en apprendra a ce que j'espere le veritable rapport. […] en seroit trop grande pour ne pas la croire digne de l'attention de l'Academie a qui je vous serai tres obligé, Monsieur, de lire cette lettre et le memoire cy joint. Une simple dissertation de Messieurs les academiciens sera toujours tres instructive et si je n'ay pas trouvé la precision, ils pourroient en faire naitre le moyen. Je recevrai avec empressement et reconnoissance la reponse. J'ay l'honneur d'etre le plus parfaitement, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans (AAS, DS, juin 1754). Proposition à vérifier : Proposition a verifier Le chevalier de Causans a proposé dans un imprimé une méthode generale pour connoitre sans calculs la racine quarrée d'une nombre quelconque. Voicy une exemple de sa methode qui est neuf et onze douzieme pour racine quarrée de quatre vingt dix huit. Le ch[evali]er de Causans prie Messieurs d' l'Academie des sciences de vouloir bien dire si ce nombre est conforme aux observations des geometres pour avoir la racine quarré du nombre cy dessus (AAS, DS, septembre 1754). Le 4 septembre : J'ai lu une lettre de M[onsieu]r le chevalier de Causans par laquelle il propose à l'Academie de décider si 9+11/12 est effectvement la racine quarrée de 98 comme il le prétend. On m'a chargé de lui repondre que le nombre 9+11/12 est trop grand pour la racine quarrée de 98. Ce nombre 9+11/12 êtant la racine quarrée exacte de 98+49/144 et l'Académie déclare qu'il est démontré depuis plusieurs siecles, qu'on ne sçauroit assigner exactement en nombre entier ni fractionnaire la racine quarrée de 98 non plus que celle de tout autre nombre entier qui n'a pas un nombre entier pour racine quarrée (PV 1754, p. 447). Le 26 septembre, le chevalier de Causans dépose 10 000 livres entre les mains de Me Aleaume (Estève 55a, p. 35). Le 28 septembre, Berryer permet d'afficher : Prix de dix mille livres Il y a dix mille livres déposées chez M. Aleaume, notaire, rue de Condé, pour le premier qui prouvera géométriquement un paralogisme dans la démonstration de la quadrature du cercle publiée par M. le chevalier de Causans, dans un écrit in-4° de vingt-deux pages et cinq figures, imprimé chez Delaguette, rue S[aint]-Jacques [(Causans 54f)]. Les savants sont invités et priés de travailler à cette vérification (Digard 55, p. 12 ; Estève 55a, p. 8). Le 5, 6 et 7 octobre, l'affiche est placardée « sur tous les piliers et carrefours de Paris » (Digard 55, p. 12 ; Estève 55a, p. 8) et sera reproduite dans les Annonces, affiches et avis divers du 14 octobre, p. 638. Une clause non rendue publique précise que si le prix n'est pas attribué au 15 novembre 1754, Aleaume rendra les 10 000 livres au chevalier de Causans (Estève 55a, p. 25). Selon Digard : De toutes part M. de Causans a reçu, pendant plusieurs mois, des milliers de lettres à ce sujet, soit directement, soit par la voie du dépositaire indiqué. […] Il est certain que cinq ou six cents personnes ont concouru (Digard 55, p. 16). Le 6 octobre, Estève se rend chez Aleaume prendre rendez-vous avec le chevalier Causans (Estève 55a, p. 9). Le 7, Estève montre une erreur de raisonnement au chevalier de Causans, mais nécessité d'avoir recours à un arbitre indépendant se fait sentir (le nom de Bouguer est proposé). Afin de pouvoir certifier qu'il est le premier à renversé la quadrature, il dépose le même jour sa réfutation chez Aleaume (Estève 55a, p. 9-10 ; AN, MC, XCI, 910 (7 octobre 1754)). Digard, qui a vu l'affiche le dimanche 6, doit attendre le lundi 7 pour pouvoir acheter un exemplaire de (Causans 54f). Le même jour, il rédige sa réfutation, la fait adresser à Aleaume et fait opposition à la délivrance des 10 000 livres (Digard 55, p. 12). Sa lettre et son mémoire sont reproduits dans (Digard 55, pp. 24-31). À partir du 8 et presque tous les jours pendant trois semaines, Estève essaye de persuader la chevalier de Causans de la justesse de sa réfutation, « mais ces développements ne pénétrèrent pas dans l'esprit du chevalier de Causans » (Estève 55a, p. 10). Pour répondre aux objections d'Estève, le chevalier de Causans publie (Causans 54g) (Estève 55a, p. 10). Le 23 octobre, le chevalier de Causans écrit à Digard pour l'informer qu'il va montrer sa quadrature à la rentrée de l'Académie des sciences et lui demande de se désister de sa demande d'opposition (Digard 55, p. 33). Le 24 octobre, une opposition est faite par Estève à la somme de 10 000 livres ès main de Me Aleaume (Estève 55a, p. 12). Du 28 octobre 1754 : M. Estève est un jeune homme qui cultive à la fois les sciences et les lettres, et qui serait en état de faire de bonnes choses s'il se donnait le temps de laisser mûrir ses idées et s'il avait moins d'embarras et de nuages dans l'imagination. Il a déjà donné, entre autres choses, l'Origine de l'univers [(Estève 48)], ouvrage philosophique où il prétend expliquer la formation de l'univers par les lois de l'attraction, et l'Esprit des beaux-arts, qui n'a point eu de succès. Le même M. Estève vient d'entrer en lice, par-devant notaire, contre M. le chevalier de Causans, dans l'intention de le punir de l'extravagant défi qu'il vient de faire aux savants de lui prouver un seul paralogisme dans sa démonstration de la quadrature du cercle. Mais de la façon dont M. de Causans s'est retranché, il paraît inexpugnable; il s'est établi seul juge compétent dans son affaire, parce que, niant les premiers principes de la géométrie, les géomètres ordinaires sont des juges qu'il récuse comme étant dans de faux préjugés. M. Estève, raisonnant avec lui, voulut d'abord établir ce principe : que le tout est plus grand que sa partie. « Eh ! c' est précisément ce dont je démontre la fausseté par ma nouvelle méthode, » dit M. de Causans. Comment attaquer un raisonnement de cette espèce ? Ce qu'il y a de plaisant, c'est qu'un autre géomètre, l'abbé de Gua, de l'Académie des sciences, dispute à M. Estève la gloire de terrasser M. de Causans, et les 10,000 francs qui sont le prix de la victoire. Cette ridicule affaire finira sans doute comme elle a commencé, par faire rire, et ce ne sera pas seulement aux dépens de M. de Causans (Grimm 77-82, vol. 2, p. 197). Le 29 octobre, Estève somme par voie d'assignation le chevalier de Causans de nommer un arbitre (Estève 55a, p. 11). La demeure du chevalier de Causans ayant été mal indiquée dans l'assignation, Estève réitère le 5 novembre (Estève 55a, p. 11). Cette fois c'est le procureur qui manque dans une copie, ce qui par la suite anéantit les le droit du sieur Estève (Estève 55a, p. 11). Louis Nicolas Guest, bourgeois de Paris, demeurant cul-de-sac du Coq Saint-Honoré, dépose le 6 novembre 1754 chez Me Aleaume un « Paralogisme dans la demonstration de la quadrature du cercle publiée par M[onsieu]r le chevalier de Causans en 1754 », toujours conservé dans les archives de ce notaire (AN, MC, XCI, 521). Claude [...] Aprin le jeune, demeurant rue Saint-Honoré, paroisse Saint-Roch à Paris, dépose le 12 novembre 1754 chez Me Aleaume une « Demonstration fausse de la quadrature du cercle par M[onsieu]r le chevalier de Causan[s] », toujours conservée dans les archives de ce notaire (AN, MC, XCI, 521). Parallèlement, ceux qui ont souscrits s'impatientent, et désirent reprendre leur argent (Estève 55a, p. 12). Le chevalier de Causans, craignant de passer pour un homme manquant de parole, refuse de le faire, et annonce qu'il n'obéira qu'aux ordres du Roi (Estève 55a, p. 12). Le Roi, par l'intermédiaire du comte d'Argenson, ordonne que les souscriptions soient rendues (Estève 55a, p. 12). Le 30 décembre 1754, Liger répond à l'affiche du chevalier de Causans : Réponse de M. Liger, commis au bureau de la guerre, à l'affiche de M. le chevalier de Causans, portant qu'il y a dix mille livres déposées chez M. Aleaume, notaire, rue Condé à Paris, pour le premier qui pourra prouver l'erreur de la quadrature du cercle de mondit sieur le chevalier de Causans, qui m'a fait l'honneur de remettre cette affiche. On ne peut attaquer les principes de M. le chevalier de Causans, sans faire un volume qui ne pourrait entrer dans les journaux ou feuilles publiques, mais comme tout ce qui accompagne sa quadrature, tant dans sa première que seconde partie, dépend et fait une suite conséquente du rapport du diamètre à la circonférence, qu'il soutient être de 7 à 21, il s'ensuit que c'est seulement à ce seul article qu'il est nécessaire de s'attacher. […] J'estime que M. le chevalier de Causans se rendra à ces raisons, et qu'il voudra bien avouer que je suis en droit d'exiger de son engagement public de me remettre son ordre pour toucher les dix mille livres qu'il est convenu par son affiche de faire payer à celui qui le tirerait de son erreur (Mercure de France, avril 1755, pp. 131-133). Il transmet sa réponse au Mercure via une lettre à Mlle Le Mire du 16 mars 1755 : Géométrie. Lettre à Mlle L. A. Le Mire, veuve J. Mademoiselle, Je vois dans le Mercure de mars que la quadrature de M. le chevalier de Causans y est annoncée, et que vous y avez fait une réponse, chose fort glorieuse pour votre sexe en général, et à vous, Mademoiselle, en particulier. Je ne manquerai pas de m'enrichir de cette pièce. Je prends la liberté d'envoyer à M. de Boissy celle que j'ai faite à à M. le chevalier de Causans, afin qu'elle vous parvienne, et au public, par la même voie que j'ai appris la vôtre. Elle peut être insérée toute entière dans le Mercure, par la précaution que j'ai prise de la faire très courte, et à portée de toute personne de bon sens. J'ai l'honneur d'être, etc. Liger, commis au bureau de la guerre. À Versailles, le 16 mars 1755 [suit sa propre réponse à Causans en date du 30 décembre 1754] (Mercure de France, avril 1755, p. 130). Car Mlle Le Mire était entrée en lioe : Démonstration de la quadrature du cercle, par M. le Chevalier de Causans, ci-devant colonel du régiment d'infanterie de Conti. A Paris, chez Delaguette, rue Saint Jacques, à l'Olivier, in-4°. 22 pages [(Causans 54f)]. On a toujours été jusqu'ici persuadé, et non sans raison, de l'inutilité des efforts que l'on voudrait employer pour parvenir à la découverte de la quadrature du cercle. On s'est réuni à en regarder la démonstration, non seulement comme impossible, mais comme impliquant les contradictions les plus évidentes en géométrie. Il n'est donc pas aisé de détruire un préjugé qui paraît si bien fondé. Cependant M. le chevalier de Causans, sans s'effrayer des difficultés qu'on peut lui opposer, n'a pas laissé de tenter la chose en question. Un grand nombre de personnes qui ont de la peine à s'imaginer qu'elle soit traitée sérieusement, n'auraient pas manqué d'imputer les tentatives de M. le chevalier à un pur jeu d'esprit ; il a pris la sage précaution de leur ôter cette pensée, en proposant la souscription de la somme de dix mille livres à quiconque prouvera géométriquement un paralogisme dans sa prétendue quadrature du cercle qu'il s'efforce, de démontrer dans le petit ouvrage que nous annonçons. Le prix considérable attaché à sa réfutation devait nécessairement attirer sur les bras de M. de Causans de puissants adversaires, qui se disputassent à l'envi le mérite (si toutefois c'en est un) de ruiner les conséquences sur lesquelles il l'a bâtie ; mais il ne s'était peut-être pas attendu à voir dans la foule des concurrents entrer en lice une personne d'un sexe qui semble moins faite pour se livrer à des études épineuses et abstraites que pour s'occuper des matières d'agrément. Mlle Le Mire, choquée de l'injuste prévention où l'on est contre les femmes, a été jalouse de l'honneur de les justifier, en montrant que leur esprit est capable d'atteindre aux vérités géométriques, sur lesquelles il leur arrive de raisonner plus conséquemment que bien des hommes. Elle a donc jugé à propos de se mettre sur les rangs ; et pour cet effet elle a cru devoir rendre public le fruit de son travail, qui paraît sous ce titre Le Quadricide [(Le Mire 55)], ou paralogismes prouvés géométriquement dans la Quadrature de M. de Causans, par Mlle L. A. Le Mire, veuve J. in-4e. 28 pag. chez Delaguette, etc (Mercure de France, mars 1755, pp. 71-73). Mlle Le Mire s'appelle Louise-Angelique Le Mire (ou Lemire), et est veuve de Jacques Julien (Digard 55, p. 14). Le 17 mars 1755, le chevalier de Causans présente une requête au lieutenant civil par laquelle il demande main-levée de l'opposition sur les 10 000 livres. La cause est communiquée aux gens du Roi et plaidée en audience du parc civil, qui, rend une sentence en sa faveur (Estève 55a, pp. 13, 35). Le 19 mars, Digard est assigné au Châtelet en main-levée de son opposition à la suite d'une requête du chevalier de Causans au lieutenant civil (Digard 55, p. 13-14). Il y a 5 opposants à la délivrance des 10 000 livres : Digard, Henri-Guillaume de Rokbeuk, Antoine Frizet, bourgeois de Paris, Estève, et Mlle Le Mire (Digard 55, p. 14). Estève fait appel et demande (outre que Causans soit condamné à payer les frais de justice) que la somme de 10 000 livres lui soit accordée pour fonder une chaire de mathématiques « pour l'instruction de ceux qui pourraient à l'avenir confier indiscrètement leur fortune à un paralogisme fait sur la quadrature du cercle » (Estève 55a, p. 13). À la Société royale de Montpellier : Du jeudi 5 juin 1755. On a lû un mémoire envoyé par M[onsieu]r Digard ingénieur. Cet ouvrage est imprimé et est relatif au procès intenté par ce même M[oneiu]r Digard à M[onsieu]r le chevalier de Causans au sujet du prix de 10 000 # que ce dernier a promis au premier qui demontreroit un paralogisme dans sa demonstration de la quadrature du cercle. Cette affaire est actuellement au Châtelet de Paris M[onsieu]r Digard demande à la compagnie de vouloir bien décider, dans son mémoire, s'il a effectivement prouvé le paralogisme dont il s'agit. M[onsieu]r Brun s'est chargé de faire cet examen. A l'égard de l'autre question, si M[onsieu]r Digard est lepremier qui ait découvert le paralogisme, elle n'est point du ressort de l'Académie (AD Hérault, D. 120, p. 99). Du jeudi 12 juin 1755. M[onsieu]r Brun a dit qu'ayant lû le mémoire pour le s[ieu]r Jean Digard communiqué à l'Académie jeudi dernier, il pensoit que ledit s[ieu]r Digard avoit prouvé géométriquement plusieurs paralogismes dans la pretendûë démonstration de la quadrature du cercle par M[onsieu]r le chevalier de Causans. Il a été délibéré que je ferois part de ce jugement à M[onsieu]r Digard (AD Hérault, D. 120, p. 99). Le 12 juillet 1755, arrêt du Parlement : [En marge : Mr Bochart R[apporteur]] Entre M[essi]re Philippe Louis [!] de Vincens de Mauleon, chevalier de Causans non profes de l'ordre de S[ain]t Jean de Jerusalem, ancien colonel du régiment de Conty, infanterie, defendeur et demandeur en requête du 16 juin 1755 d'un part, et sieur Jean Digard, ancien ingénieur du du Roy et professeur de mathématiques, défenseur, et Me Alleaume, notaire au Chatelet de Paris, demandeur suivant sa requête insérée en l'arret de la Cour du 13 juin 1755 d'autre part ; et entre led[it] sieur de Mauleon de Causans, demandeur suivant ses conclusions provisoires portées par requête, ordonnance et exploit des 18 et 19 juin 1755 d'une part, et le sieur Pierre Esteve, de la Société des sciences de Montpellier, et le sieur Antoine Frisé, bourgeois de Paris, défendeur d'autre part ; vû par la Cour la requête et demande dud[it] Alleaume, insérée en l'arret du 13 juin dernier, à ce qu'entre autres choses et par provision mainlevée lui soit faite de la saisie d'exécution de ses meubles et effets du 12 dud[it] mois de juin, à la représentation desd[its] meubles et effets, leurs gardiens contraints par corps ; requête et demande dud[it] Mauleon de Causans du 16 juin à ce qu'il fut reçu opposant aud[it] arret sur requetes obtenuës l'une par led[it] Digard, et l'autre par led[it] Alleaume les 12 et 13 juin 1755, faisant droit sur l'opposition, les défenses y portées fussent levées, led[it] Alleaume fut debouté de sa demande provisoire, et lesd[its] Digard et Alleaume fussent condamnées aux dépens, sauf aud[it] de Mauleon à prendre pour la suite telles autres conclusions qu'il aviseroit, comme aussi sous les réserves qu'il avoit faites et qu'il réiteroit de se pourvoir contre la sentence du Châtelet du 10 juin dernier aux chefs qui luy font prejudice ; arret du 17 juin 1755 d'appointé à mettre ez main de Me Elie Bochard, conseiller productions respectives des parties en execution dud[it] arret Celle dud[it] Mauleon de Causans par requête du 21 juin 1755 à ce que les conclusions par lui prises lui fussent adjugées, et icelles augmentant, il fut ordonné que led[it] Alleaume, notaire, soit tenu de remettre aud[it] de Mauleon de Causans les 10 000 # dont il s'agit et nonobstant toutes oppositions qui pourroient avoir été réitérées, faites ou à faire, par led[it] Digard ou autres dont en tant que besoin seroit, mainlevée provisoire lui seroit faite, et a faute par led[it] Alleaume de remettre aud[it] de Mauleon de Causans lad[ite] somme, il fut ordonné qu'il y seroit contrait conformément à lad[ite] sentence du 10 juin dernier, à l'effet de quoi, il fut ordonné par provision qu'il seroit passé outre cela a la vente des meubles et effets sur lui saisis par proces verbal du 12 juin dernier à la représentation desquels le gardien seroit contrait même par corps, quoi faisant dechargé, pour les deniers provenants de la vente être remis aud[it] de Mauleon de Causans jusqu'à concurrence de 10 000 #, les frais de vente et ceux faits pour y parvenir préalablement pris, et led[it] Digard et led[it] Alleaume chacun à leur égard fussent condamnés aux dépens ; au bas de laquelle reqête est l'ordonnance de la Cour qui a reservé à faire droit sur lad[ite] demande en jugeant ; Celle dud[it] Digard par requête du 27 juin dernier, employée pour défense aux susd[ites] oppos[siti]on et demande dud[it] de Mauleon de Causans et tendante à ce qu'il y fut débouté et condamné aux dépens ; au bas de laquelle requête est l'ordonnance de la Cour qui a réservé à faire droit sur lad[ite] demande en jugeant ; et celle dud[it] Alleaume par requête du 28 juin 1755 tendante à ce qu'il fut reçu partie intervenante en tant que besoins étoit ou seroit vis-à-vis lesd[its] Digard et Esteve, acte lui fut donné des offres qu'il faisoit de remettre des a présent aud[it] de Mauleon de Causans ou a qui par la Cour seroit ordonné la somme de 10 000 # dont il s'agissoit, quoi faisant il en demeureroit bien et valablement quitte et déchargé envers et contre tous, mainlevée provisoire lui fut faite de la saisie d'execution faite de ses meubles, led[it] jour 12 juin 1755 et en cas de contestations les contestants fussent condamnés aux depens, que led[it] Alleaume seroit en tout [cas] autorisé à retenir sur lesd[ites] 10 000 # déposées, sauf aud[it] de Mauleon de Causans à repéter le montant desd[its] depens contre ceux des parties, à la charge desquelles la Cour jugeroit qu'ils devoient rester ; au bas de laquelle requête est l'ordonnance de la Cour qui a donné acte de l'employ y porté et reservé a faire droit en jugeant ; requête et demande dud[it] de Mauleans de Causans du 18 juin 1755, à ce qu'entre autres choses, il lui fut permis de faire assigner en la Cour lesd[its] Esteve et Frisé, pour par provision voir déclarer [...] l'arrêt qui interviendroit en lad[ite] instance, comme aussi pour lui voir faire mainlevée de toutes les oppo[siti]ons nouvellement faites et à faire de la part des[its] Esteve ou Frisé sur ledit de Mauleon de Causans ez mains dud[it] Alleaume, lequel seroit tenu de faite délivrance aud[it de Mauleon de Causans des 10 000 # dont il s'agit, quoi faisant déchargé, et en outre de voir condamner aux depens ; au bas de laquelle req[uê]te est l'ordonnance de la Cour portant soient parties appellées ; deux exploits des 18 et 19 juin 1755 d'assignation données à la requête dud[it] de Mauleon de Causans, aud[it] Esteve et aud[it] Frisé à comparoir en la Cour pour répondre et procéder sur et aux fins de la susd[ite] demande provisoire, et en [outre] comme de raison afin de depens ; arret du 21 juin 1755, d'appointé à mettre et joint ez mains dud[it] conseiller productions respectives des parties en exécution dud[it] arret ; Celle dudit de Mauleon de Causans, par inventaire signiffié le 1er juillet 1755 ; Celle dudit Esteve par requête du 3 du présent mois de juillet, tendante à ce qu'il lui fut donné acte de ce qu'il s'en rapportoit à la Cour d'ordonner l'exécution provisoire de la sentence ou donnant par led[it] de Mauleon de Causans bonne et suffisante caution, reçu avec led[it] Esteve en la maniere accoutumée pour la conservation des droits des parties sur l'appel ; au bas de laquelle requête est l'oronn[an]ce de la Cour qui a réservé à faire droit sur la demande en jugeant ; Et celle dud[it] Frisé par requête du 10 juillet présent mois, tendante à ce qu'acte luy soit donné de ce que sur la demande provisoire contre lui formée à la requête dud[it] de Mauleon de Causans, par requête et exploit des 18 et 19 juin derniers, il s'en rapportoit à la prudence de la Cour d'ordonner ce qu'elle jugeroit à propos, led[it] Frisé fut en tant que de besoin étoit ou seroit, reçu partie intervenante en lad[ite] instance d'entre led[it] de Mauleon de Causans d'une part, et led[it] Digard, led[it] Esteve et led[it] Alleaume notaire d'autre part, acte lui fut donné de ce que pour moyens d'intervention, il employoit le contenu de lad[ite] requête et de ce qu'il sommoit et denonçoit auxd[its] Digard, Esteve et Alleaume la demande provisoire contre lui formée par led[it] de Mauleon de Causans, en conséquence ceux d'entre eux qui succomberoient fussent condamnés en tous les dépens envers led[it] Frisé, tant en demandant, défendant, que [...] et dénonciations ; au bas de laquelle requete est l'ordonnance de la Cour qui a réservé à faire droit sur lad[ite] demande en jugeant ; Oui le rapport dud[it] conseiller ; Tout considéré ; La Cour reçoit lesd[its] Alleaume et Frisé parties intervenantes ; reçoit led[it] Mauleon de Causans opposant à l'exécution de l'arret du douze juin dernier faisant droit sur l'oppo[siti]on a leve[r] les défenses y portées ; en conseq[uen]ce ordonne que Aleaume notaire seroit tenu de remettre aud[it] de Mauleon de Causans les dix mille livres dont il s'agit, nonobstant toutes oppo[sition]s faites ou a faire par lesd[its] Digard, Esteve et Frize et autres, dont ladite Cour lui fait par provision mainlevée, à ce faite led[i] Aleaume contraint, quoi faisant il en sera et demeurera valablement quitte et déchargé, à la déduction néanmoins de ses frais de saisie et arrets et depens, et en payant lui fait mainlevée de la saisie exécution de ses meubles, tous autres dépens compensés (AN, X1a 4201, ff. 484v-487v). Parallèlement, le 15 mars 1755 : J'ai lu une lettre de M. le chevalier de Causans qui demande que la compagnie écoute mercredi prochain la déclaration de ses sentiments sur la quadrature du cercle : sur quoi j'ai êté chargé de lui répondre que l'Académie n'est pas dans l'usage de décider aucune affaire lorsque le public en est saisi par l'impression ; et que par consequent elle ne peut prendre connoissance de ses demonstrations (PV 1755, p. 207). Le 18 mars, le chevalier de Causans écrit à Grandjean de Fouchy : Monsieur, Ce n'est point l'imprimé que j'ay donné au public que je desire communiquer a l'Academie, c'est un manuscrit dont person[n]e a connoissance qui renferme une demonstration evidente de la quadrature du cercle qui consiste a connoitre exactement le surface du cercle et a decrire une quarré necessairement égal a une cercle, le tout geometriquement. Ainsi je vous prie, Monsieur, de demander le jour qu'il [plaira] a l'Académie de me donner, après les vaquances de Paques. Excusés la peine que je vous occasion[n]e et soyés je vous conjure bien persuadé des sentimens parfaites avec lesquels j'ay l'honneur d'être, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. Au Mont Valerien, ce 18 mars 1755 (AAS, DS, 19 mars 1755). Le 19 mars : J'ai lu une réponse de M. le chevalier de Causans dans laquelle il marque que ce n'est point son imprimé qu'il veut communiquer à la compagnie ; mais un manuscrit : il demande pour cela un jour après Pâques : je dois lui marquer que l'Académie l'écoutera volontiers, et que je lui indiquerai ce jour après la quasimodo (PV 1755, p. 211). Le 5 avril, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] : Au Mont Valerien ce 5 avril 1755 Monsieur Avant de me presenter a l'Academie, je serois bien aise de sçavoir son sentiment sur les deux méthodes faciles et generales que j'aurois à proposer, l'une pour la quadrature geometrique du cercle, l'autre pour les racines quarrées des nombres […], depuis deux jusqu'à l'infini. Si l'Academie juge que ces deux objets puissent contribuer a la perfection des sciences, des arts et des mechaniques, j'y satisferai avec empressement, mais si l'Academie veut mettre la precision au rang des approximations, je me tiendrai dans le silence. Votre réponse, Monsieur, reglera la dessus ma conduite. Je vous prie de bien m'en donner une […]. J'ay l'honneur d'etre toujours tres parfaitement, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans (AAS, DS, 12 avril 1755). Le 12 avril : J'ai lu une lettre de Mr le chevalier de Causans par laquelle il demande si l'Académie pense que la quadrature du cercle, et la maniere de trouver la racine quarrée de tout nombre, seroient capables de perfectionner les sciences, les arts et les mécaniques : je dois lui repondre de la part de la compagnie qu'elle lui a déja fait sçavoir qu'il êtoit impossible qu'un nombre entier qui n'a pas un autre nombre entier pour racine quarrée, eut un nombre fractionnaire pour sa racine ; et que l'Académie sçait tout ce qu'on peut sçavoir sur l'extraction des racines des nombres ; qu'enfin la quadrature du cercle, n'est nullement nécessaire aux arts, parce que les approximations qu'on en a, sont plus que suffisantes à la mécanique (PV 1755, p. 261). Le 14 mai : M. le chevalier de Causans est entré, et a lu un écrit sur la quadrature du cercle (PV 1755, p. 332). Un manuscrit de (Causans 55a) est conservé dans le dossier de séance (AAS, DS, 14 mai 1755). Le 16 mai : M. le chev[ali]er de Causans ayant lu mercredi dernier 14 may à l'Académie un memoire manuscrit de sa composition sur la quadrature du cercle, et l'Academie ayant fait aujourd'hui vendredi 16 du même mois une seconde lecture de même ecrit, la compagnie y a remarqué plusieurs propositions manifestement fausses, d'autres inintelligibles, et un abus très fréquent des termes : elle a jugé que le rapport de 12 ½ à 16 donné par l'auteur pour le rapport exact du cercle au quarré circonscrit, non seulement n'est pas exact, mais qu'il est beaucoup moins approchant qu'un grand nombre d'autres rapport connus qui ne sont eux mêmes que des approximations ; et enfin que M. le chev[ali]er de Causans n'a point résolu le probleme de la quadrature du cercle. Il a été décidé que je ne délivrerois d'expedition de ce jugement qu'à M. le chev[ali]er de Causans sans l'ordre de l'Academie (PV 1755, p. 335 ; Causans 57). Le 28 mai : Mr Bouguer directeur a demandé de la part de M. le cheval[ie]r de Causans que la compagnie nommât des commissaires pour examiner de nouveau son mémoire, sur quoi ayant été aux voix, elle a decidé que l'affaire avoit suffisamment examinée, qu'elle n'avoit rien à changer à son jugement, et qu'elle ne nommeroit point de commissaires (PV 1755, p. 336). Le 31 mai, le chevalier de Causans écrit à [Malesherbes] : Monsieur, Pour n'avoir rien a me reprocher, j'ay prié M. Bouguer de proposer a l'Academie de me nom[m]er des juges selon l'usage et que j'en passerois ensuite volontiers ensuite a leurs decision ou a deliberé de ne rien changer au jugement precipité qui a eté rendu, [et] qui m'oblige, Monsieur, de faire imprimer le mémoire que j'ay l'honneur de vous adresser [(Causans 55a)]. Je vous serai tres obligé, Monsieur, de l'agréer et de me le renvoyer, et j'espere que le public me rendra justice, etant bien sur d'avoir raison, ce qui ne […] a l'avantage de sa decision precipitée. Je me flat[t]e que vous etes persuadé du respect avec lequel j'ay l'honneur d'etre, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. A Paris ce 31 may 1755 (BnF, fr. 22141, 39). Vers le 1er juin, [Malesherbes] écrit à d'Argenson : À M. d'Argenson Monsieur J'ay l'honneur de vous envoyer un memoire [(Causans 55a)] que M. le ch[evali]er de Causans veut faire imrpimer. Ce n'est pas tout a fait celuy qu'il a dej donné au public, c'est celuy qu'il a lu a l'Academie, et il y a un mot sur le jugement de l'Academie [dont il] est tres mecontent comme vous pouvés croire. Je ne vous dissimuleray pas qu'il scait que son manuscrit est entre vos mains, je lui ai dit qu'il interessoit trop l'Academie des sciences pour que je propose a M. le chancelier de rien statuer, sans m'etre assurer de votre consentement. Je crains que vous avoir exposé par la aux importunités de l'auteur, mais comme vous scavés qu'il est pressant, je n'ay pas pu eviter de luy dire la veritable raison qui m'empechoit de lui donner une reponse [desirée] [Suit un passage rayé où la princesse de Conti est citée] (BnF, fr. 22141, 40). Vers le 1er juin, [Malesherbes] écrit au chevalier de Causans : À M[onsieu]r le ch[evali]er de Causans. J'ay envoyé, Monsieur, a M. d'Argenson le memoire que vous m'avés communiqué. Comme ce memoire concerne non seulement la solution du probleme de la quadrature du cercle, mais la forme du jugement rendu par l'Academie, j'ay voulu avant de prendre les ordres du chancelier consulter le ministre qui a les academies dans son departement. J'ay l'honneur d'estre avec un attachement inviolable, Monsieur, votre [blanc] (BnF, fr. 22141, 40). Le 3 juin, le chevalier de Causans à [Malesherbes] : Monsieur, Le jugement que l'Academie a rendu sur mon memoire doit etre si exact et si juste qu'il ne peut […] qu'a gloire, ainsi Monsieur, c'est pour exposer mon tort au public que je desire de faire imprimer la demonstration dont il s'agit et comme le […] peut a ce qu'on dit […] que par ecrit, il doit etre […] de m'en charger. Je me flatte, Monsieur, connoissant vos dignes sentiments, que vous aurés la bonté d'en faciliter le moyen. Vous n'avez besoin de [...]. Je vous supplie de ne pas me le refuser […] J'espere que vous y aurés égard ayant l'honneur d'estre le plus respectueusement [...], Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. A Paris ce 3 juin 1755 (BnF, fr. 22141, 41). Vers le 3 juin : Le ch[evali]er de Causans est venu pour avoir l'honneur de prier Monsieur de Malesherbes d'avoir la bonté de lui dire definitivement s'il accorde ou refuse sa permission. Il se flat[t]e de sa reponse, parce que son honneur y est interessé (BnF, fr. 22141, 43). Vers le 3 juin, [Malesherbes] écrit au chevalier de Causans : J'ay deja eu l'honneur de vous mander, Monsieur, que votre manuscrit [(Causans 55a)] est entre les mains de M. d'Argenson. Ce memoire regarde un jugement de l'Academie dont il est le ministre. D'ailleurs j'entends dire que dans le cours de votre dispute, il est intervenu des ordres du Roy qui ont passé par luy. Toutes ces raisons ont du m'engager à ne prendre aucun parti sans l'avoir prevenu. Je n'ay point encore sa reponse. Dès que je l'auray, je ne manqueray pas de demander a M. le chancelier une decision et de vous en faire part. Je vous prie de ne point douter de l'attachement et de la consideration avec laquelle j'ay l'honneur d'etre, Monsieur [blanc] (BnF, fr. 22141, 44). Le 7 juin à l'Académie : J'ai lu une lettre de M. le chevalier de Causans par laquelle il prie l'Académie de ne point s'opposer à ce qu'il fasse imprimer le Memoire qu'il y a lu le 14 mai dernier, et le jugement qu'elle en a porté : j'ai été chargé de lui répondre qu'il étoit le maitre de faire là dessus ce qu'il jugeroit à propos (PV 1755, p. 343). Le 7 juin, le comte d'Argenson écrit à Grandjean de Fouchy : A Versailles, le 7 juin 1755 M[onsieu]r le chevalier de Causans demande, Monsieur, de pouvoir faire imprimer le mémoire cy joint qui et le même que celui qu'il a lû à l'Académie des sciences, mais auquel il a joint des reflexions sur le jugement de cette compagnie. Je vous prie de communiquer le tout à l'Academie et de me marquer ce qu'elle aura pensé de la demande que fait M[onsieu]r de Causans de pouvoir faire imprimer cet ouvrage pour que j'en rendre compte à Sa Majesté. Vous connoissez, Monsieur, les sentimens avec lesquels je vous suis toujours parfaitement devoüé. D'Argenson (AAS, DS, 11 juin 1755). Le [8 juin], [Malesherbes] écrit [au comte d'Argenson] : Affaire du ch[evali]er de Causans Monsieur, J'ay eu l'honneur de vous envoyer le memoire de M. le chevalier de Causans et mes deux motifs en teste, premierement que cette affaire interessoit l'Academie des sciences, secondement qu'un academicien m'avoit assuré que m[a]d[am]e la princesse de Conty avoit prié d'empecher le jugement de l'Academie ne devint public. Comme vous avés eu connoissance des premieres demarches faites par ma[d]am[e] la princesse de Conti pour remedier au derangement de la teste d'un homme qui luy est entierement attaché, j'ay cru que vous […] mieux que personne ce qu'elle desire au sujet de l'impression du memoire. Mais depuis ma lettre ecrite, le meme academicien m'a dit qu'il avoit vu m[a]d[am]e la princesse de Conti et qu'elle l'avoit chargé de me dire qu'elle ne s'opposoit plus à ce que M. le ch[evali]er de Causans imprimat tout ce qu'il voudroit. D'un autre coté il a fait demander hier a l'Academie des sciences son consentement et elle luy a donné. Il me presse avec toute l'ardeur qu'il a marquée dans la suite de cette affaire puisque personne ne s'y oppose et que je ne suis pas chargé de l'empecher de faire des sottises. Je luy ay promis une reponse defintive pour jeudy prochain, ainsi, Monsieur, à moins que d'icy la vous ne me mandiés que vous este d'un avis different, je luy diray jeudy qu'il peut aller en avant pour l'impression, et dans le fond il n'y aura d'inconvenient que pour luy et il n'est plus d'age a avoir un tuteur. Je suis avec respect [blanc] (BnF, fr. 22141, 38). Le 9 juin, d'Argenson écrit à Malesherbes : Versailles, le 9 juin 1755 J'avois, Monsieur, envoïé a l'Academie des sciences le manuscrit du ch[evali]er de Causans que vous m'aviés fait l'honneur de m'adresser pour scavoir s'il n'y avoit point d'inconvenient à le laisser imprimer ; mais d'après ce que vous me marqués qu'elle n'y en trouve point, je vous assure que j'en trouve point non plus, et une extravagance de plus de la part de M. le ch[evali]er de Causans n'ap[p]rendra rien de nouveau au public. Je suis avec un sincere attachement, Monsieur; vôtre très humble et très obeissant serviteur d'Argenson. [A Monsieur] de Malesherbes (BnF, fr. 22141, 42). Le 11 juin à l'Académie : J'ai lu une lettre de M. le comte d'Argenson qui demande à l'Académie, si l'on peut permettre à Mons[ieu]r le cheval[ie]r de Causans de publier son ouvrage, et le jugement qu'elle en a porté : j'ai été chargé de lui repondre qu'elle ne s'y oppose point (PV 1755, p. 344). Luynes, du 25 juin 1755 : J'ai parlé ci-dessus du pari fait par M. le chevalier de Causans pour la quadrature du cercle. Tout le monde aurait désiré que l'on n'eût plus agité cette question, et le Roi avait ordonné que l'argent fût rendu de part et d'autre ; mais M. de Causans n'a pas eu l'esprit satisfait, il a voulu absolument être jugé. Il vient de donner encore un nouvel imprimé portant pour titre : La quadrature du cercle, démontrée à l'Académie royale des sciences, le 14 mai 1755. À ce titre on croirait qu'il va rapporter un jugement rendu en sa faveur. On trouvera ci-après ce jugement, copié mot à mot dans ledit imprimé. M. le chevalier de Causans prétend encore avoir des moyens pour réfuter ce qui a été jugé. [NDA] Extrait des registres de l'Académie royale des sciences, du 16 mai 1755. M. le chevalier de Causans ayant lu mercredi dernier, 14 mai 1755, à l'Académie un mémoire manuscrit de sa composition sur la quadrature du cercle, et l'Académie ayant fait aujourd'hui vendredi, 16 du même mois, une seconde lecture de cet écrit, la compagnie y a remarqué plusieurs propositions manifestement fausses, d'autres inintelligibles, et un abus très fréquent des termes ; elle a jugé que le rapport de douze et demi à seize donné par l'auteur pour le rapport exact du cercle au carré circonscrit, non-seulement n'est pas exact, mais qu'il est beaucoup moins approchant qu'un grand nombre d'autres rapports connus qui ne sont eux-mêmes que des approximations ; et qu'enfin M. le chevalier de Causans n'a point résolu le problème de la quadrature du cercle. En foi de quoi j'ai signé le présent certificat. À Paris, ce 16 mai 1755. Signé Grandjean de Fouchy, secrétaire perpétuel de l'Académie royale des sciences (Luynes 60-65, vol. 14, p. 193). Montucla : On [...] vit [à Paris] en 1753, le chevalier de Causans, officier aux gardes qui, jusqu'alors, ne s'était pas douté de géométrie, trouver tout à coup la quadrature du cercle en faisant couper une pièce circulaire de gazon, et ensuite s'élevant de vérités en vérités, expliquer par sa quadrature le péché originel et la Trinité. Il s'engagea par un écrit public à déposer chez un notaire jusqu'à la concurrence de 300 000 francs pour parier contre ceux qui voudraient se présenter contre lui, et déposa effectivement 10 000 fr. qui seraient dévolus à celui qui lui démontrerait son erreur. Cela n'était sûrement pas difficile ; car il résultait de sa découverte que le quarré circonscrit au cercle lui était égal, et le tout à sa partie. Quelques personnes se mirent sur les rangs pour gagner les 10 000 francs, entre autres une jeune demoiselle [Angélique Le Mire] actionna le chevalier de Causans au Châtelet ; quelques autres répondant à son défi, déposèrent des sommes chez des notaires. Mais le Roi jugea que la fortune d'un homme ne devait pas souffrir d'un pareil travers d'esprit, qui était innocent au fond ; car sur tout autre objet le chevalier de Causans était un homme très estimable. La procédure fut arrêtée et les paris déclarés nuls. Le chevalier de Causans trouva cependant le moyen de faire juger l'Académie, qui s'y refusait par ménagement, et qui fut enfin obligée de s'expliquer (Montucla 99-02, vol. 4, p. 631). Le 10 juillet 1755, le chevalier de Causans réécrit au président de la Royal Society : Lettre de M. le chevalier de Causans à Milord Macclesfield, président de la Société royale de Londres. Milord, de bonnes raisons m'ont empêché de démontrer plus tôt évidemment et géométriquement à l'Académie royale des sciences la quadrature du cercle que j'avais annoncée. Je m'empresse, Milord, à vous en présenter les preuves [(Causans 55a)], et comme la vérité est l'objet de vos lumières, et de celles de la Société royale à laquelle vous présidez, je vous prie, Milord, de la découvrir dans cette occasion. Si je me suis trompé, je ne demande aucune indulgence. je sais que vous excluez des sciences tout respect humain : ainsi, Milord, je me flatte que si je suis dans l'erreur, vous vous servirez de la voie la plus authentique pour m'éclairer, et que si votre jugement m'est favorable, vous le direz formellement, ce qui instruira de votre sentiment, pour ou contre. rendez, je vous supplie, Milord, justice à ma confiance, de même qu'au respect avec lequel j'ai l'honneur d'être, Milord, etc. À Paris, ce 10 juillet 1755 (Causans 55b). Un exemplaire de (Causans 55a) (et un de (Digard 55)) est conservé à la bibliothèque de la Royal Society (Royal Society, catalogue en ligne). Le 23 décembre 1755 : M[onsieu]r de Montigny a parlé ainsi de la refutation du memoire de M. le chevalier de Causans par un anonyme. J'ai examiné par ordre de l'Académie un mémoire sans nom d'auteur portant pour Titre, Examen et refutation du systheme de la quadrature du cercle composés par M. le ch[evali]er de Causans etc. suivi d'une nouvelle méthode pour construire facilement une quadrature du cercle géometrique la plus parfaite qu'on ait vû jusqu'à present. L'auteur après avoir combatu fort au long plusieurs propositions dont l'absurdité est assés sensible pour n'avoir pas besoin de réfutation, établit, sans démonstration, que si l'on ajoute ensemble le coté du quarré et celui du triangle inverse sans un même cercle, leur somme est geometriquement égale à la circonference du cercle. Cette proposition n'est pas vraie […] Ce mémoire n'a rien d'aillleurs qui puisse meriter l'approbation de l'Académie (PV 1755, pp. 859-860 ; AAS, DS, 23 décembre 1755) Le 21 février 1756 : M[onsieu]r Duhamel, directeur, a lu des propositions faites par Mons[ieu]r le chevalier de Causans, pour l'examen des quelles MM. de Mairan, Nicole et le le cheval[ie]r d'Arcy ont été nommés (PV 1756, p. 97). Un manuscrit de ce bref mémoire est conservé dans le dossier de séance (AAS, DS, 21 février 1756). Le 6 mars 1756, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] : L'Academie royale des sciences ayant nommé Messieurs Nicole, de Mairan et le chevalier d'Arcis commissaires pour examiner mes propositions sur les racines quarrées des nombres sourds ou incommensurables jusqu'a aujourd'huy, je vous prie, Monsieur, d'agréer le memoire cy-joint, pour vous, et un pour chacun de Messieurs les commissaires. Je me flatte que vous voudrez bien les parapher. J'ay l'honneur d'etre tres parfaitement, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. Ce samedy 6 juillet 1756 (AAS, DS, 6 mars 1756). Le 6 mars : Mons[ieu]r le chevalier de Causans m'a fait remettre des exemplaires de son Mémoire relatif à la derniere question qu'il a présentée à l'Académie pour être rendus à MM. Nicole, de Mairan et le chevalier d'Arcy nommés commissaires à ce sujet (PV 1756, p. 121). Le 24 mars : MM. de Mairan, Nicole et le chevalier d'Arcy ont fait le rapport suivant d'un ecrit de M. le chevalier de Causans. Nous commissaire nommés par l'Académie avons examiné un ecrit de M[onsieu]r le cheval[ie]r de Causans tendant à donner la racine quarrée des nombres entiers non quarrés. Il donne les prétenduës racines des six nombres, sçavoir, [maths]. Mais ces racines ne sont nullement éxactes. Il seroit inutile de s'étendre davantage sur ce sujet, il suffit de dire que les racines des nombres entiers non quarrés sont démontrées impossibles à trouver par un nombre infini de géomètres depuis que l'on a traité des nombres(PV 1756, pp. 143-144). Le 28 juin 1757, alors que le chevalier de Causans demande encore des commissaires, Clairaut, directeur de l'Académie, est chargé de lui faire savoir que personne ne se porte candidat (cf. 28 juin 1757 (1)). Le Roi trouve pourtant bon que des commissaires soient nommés (cf. 3 juillet 1757 (1)), ce que Clairaut rapporte le 6 (cf. 6 juillet 1757 (1)). Le 9 juillet 1757 : Mons[ieu]r le chevalier de Causans a fait remettre à la compagnie son nouvel ecrit sur la quadrature du cercle pour l'examen duquel MM. de l'Isle [Delisle] et de Parcieux [Deparcieux] ont été nommés (PV 1757, p. 463). Clairaut présente une lettre du chevalier de Causans lors de la séance académique du 20 juillet (cf. 20 juillet 1757 (1)). Au cours de cette même séance : Rapport de l'ecrit sur la quadrature du cercle de M. de Causans [En note] voy[ez] […] M. le chevalier de Causans ayant obtenu un ordre du Roy pour que l'Academie éxaminât son nouvel ecrit intitulé Démonstration de la quadrature du cercle, nous commissaires [Delisle et Deparcieux] nommés allons rendre compte à la compagnie de l'éxamen que nous en avons fait. M. le ch[evali]er de Causans commence par dire que le vrai rapport du diametre à la circonference est de 8 a 25 sans indiquer par quelle voye il y est arrivé, et il donne pour démonstration de sa prétenduë découverte l'égalité qu'il trouve entre differents produits qu'il forme par le diamètre et differentes portions du diametre qu'il prend telles qu'il veut, et ou il veut sans qu'il y entre aucune ligne comparée à la circonference. Comme il a pris les parties du diametre qu'il employe absolument à son gré, il n'est pas etonnant qu'il soit parvenu à former des produits égaux qu'il regarde comme la solution du problème, et il conclut par là formule ordinaire ce qu'il falloit demontrer, avec autant de confiance que s'il avoit fait une véritable démonstration. Mais pour faire connoître combien de 8 à 25 s'éloigne du vrai rapport qu'on demande au diametre à la circonference, comparons le aux limites que M. Nicole a données dans les mémoires de 1747, comme la voye la plus courte et la plus commode, et pour cela ramenons le au diamètre [maths]. Ainsi bien loin que le rapport de M[onsieu]r le chevalier de Causans soit le vrai rapport du diametre à la circonference, il n'en est pas même une approximation recevable, car il s'en ecarte beaucoup plus que les rapports les moins éxacts dont ne se contente pour les usages ordinaires. Tel est le jugement que nous portons sur cet ecrit dans lequel on ne trouve ni construction de problême, ni aucun raisonnement dont on puisse conclure la moindre chose, non seulement pour une quadrature ordinaire, mais pas même pour une approximation ; et nous terminons ce rap[p]ort en disant que M[onsieu]r le chev[ali]er de C[ausans] n'a rien trouvé ni rien démontré dans ce nouvel écrit, non plus que dans celui sur lequel l'Académie a prononcé le 16 mai 1755 (PV 1757, pp. 485-486 ; AAS, DS, 20 juillet 1757). Le chevalier de Causans reproduit et discute ce rapport dans (Causans 57). Le 1er août 1757, Saint-Florentin écrit à Malesherbes : A Compiegne, le 1er aoust 1757 M. le ch[evali]er de Causans ayant, Monsieur, presenté un memoire au Roy pour demander a Sa M[ajes]té de faire examiner la nouvelle decouverte qu'il croyoit avoir bien certainement faite de la quadrature du cercle, Sa M[ajes]té a crû ne pouvoir lui refuser la derniere satisfaction de lui faire nommer des commissaires qui ont porté un jugement tel qu'on s'i attendoit. Il ne seroit ni convenable ni decent pour l'Accademie d'accorder a M. le ch[evali]er de Causans un permission authentique de faire imprimer son dernier memoire et le jugement qui en a eté porté, et pense aussi comme vous qu'il seroit encore moins convenable d'employer l'autorité du Roy pour l'empescher de faire imprimer son memoire, on peut le laisser donner au public ce qu'il voudra sur cette matiere. Je vous supplie d'etre toujours persuadé de l'attachement très parfait avec lequel j'ay l'honneur d'etre, Monsieur, votre très humble et très obeissant serviteur Florentin. [A] monsieur de Malesherbes (BnF, Ms 22141, 36). Le 10 novembre 1757, le chevalier de Causans écrit à Grandjean de Fouchy : Monsieur, L'Académie n'a pas, sans doute, donné assez d'attention au rapport de Messieurs les commissaires qu'elle m'a nommés puisqu'il renferme contradiction, erreur et paradoxe manifestes. J'ai fait, M., une réponse par articles pour le prouver et démontrer la vérité de ma proposition sur la quadrature du cercle, par une progression continue en même raison et jusqu'à l'infini entre des cercles et des quarrés, ce que ne produirait jamais tout autre rapport que celui que je propose du diamètre à la circonférence. L'estime particulière que j'ai pour Messieurs les académiciens et le désir de leur plaire m'obligent, M., de vous ouvrir mon cœur la-dessus. La gloire et la réputation de l'Académie y sont intéressés. Elle m'a condamné sans aucune raison apparente en disant que ma proposition n'est pas même une approximation recevable. Si cela est, je vous prie instamment, Monsieur, d'obtenir qu'on en donne d'office la moindre preuve aussi simple que ma démonstration, et alors je rendrai grâces authentiques a l'Académie en avouant l'erreur, mais si, contre mon attente, elle persistait à me croire bien jugé en opposant seulement une fraction de neuf milliards, neuf cent onze millions, quatre cent quatre-vingt cinq mille, sept cent cinquante-huit parties de dix milliards pour limites d'un cercle de sept de diamètre, j'aurai recours au Roi dont la bonté et la justice accompagnent les actions. J'aurai l'honneur de présenter à Sa Majesté le rapport des commissaires, la réfutation, ma démonstration par un progression géométrique continue jusqu'à l'infini, et le tout imprimé découvrirait que le mauvaise volonté aura prévalu dans la plus respectable Académie sur la plus importante vérité de géométrie, à laquelle on ne doit pas refuser de rendre témoignage, pour ou contre et de façon évidente. J'agirai, M., relativement à votre réponse. J'espère qu'elle sera conforme à l'exacte probité qui conduit l'Académie, qui verra en manuscrit, si elle juge à propos, une progression géométrique selon mon rapport jusqu'à l'infini entre des cercles et des quarrés, et la réfutation très claire des limites dont elle s'est servie pour me condamner. Un quart d'heure de temps suffira pour s'en convaincre sans aucune peine. Ayez la bonté, Monsieur, de m'instruire des sentiments de l'Académie à mon égard, et d'être persuadé que j'ai l'honneur d'être, etc. Signé, le chevalier de Causans (Causans 57, pp. 9-10 ; AAS, DS, 19 novembre 1757). Le 15 novembre, le chevalier de Causans écrit à Grandjean de Fouchy : Monsieur, Je vous prie encore de ne laisser pas ignorer a l'Académie des sciences que ma requête au Roi est toute prête, si elle refuse de me convaincre, et le public, par des raisons simples et évidentes. Je désire de tout mon cœur, Monsieur, d'éviter que les moyens pour ma défense paraissent aux yeux du Roi. Je serai forcé de dire des vérités que je voudrais cacher au prix de mon sang puisqu'elles attireront un blâme irréparable contre des juges que j'aime et respecte. Je me flatte, Monsieur, que j'aurai demain au sortir de l'Académie une réponse positive. J'ai l'honneur d'être etc. Signé, le chevalier de Causans (Causans 57, p. 11 ; AAS, DS, 19 novembre 1757). Le 16 novembre : J'ay lu une lettre de M. le chevallier de Causans par laquelle il se plaint du jugement que l'Academie a porté de ces mémoires sur la quadrature du cercle, et menace de s'en plaindre au Roy et de faire imprimer une reponse. J'ay été chargé de lui repondre qu'il étoit le maître de faire tout ce qu'il voudroit, mais que l'Academie n'avoit rien a changer au jugement qu'elle avoit prononcé (PV 1757, p. 622). Le même jour, Grandjean de Fouchy écrit au chevalier de Causans : Monsieur, J'ai communiqué, suivant votre intention, à l'Académie les deux lettres que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire. Elle m'a chargé de vous marquer de sa part qu'elle ne peut rien changer à son jugement, et qu'elle avait même déclaré qu'elle ne pouvait plus se mêler de cette affaire. Les démonstrations des approximations dont vous parlez sont depuis longtemps données au public par M. Nicole, et imprimées dans les Mémoires de l'Académie. Au reste, M., vous êtes parfaitement le maître d'agir comme vous le jugerez à propos, et l'Académie se croit fort en sûreté sur cet article. J'ai l'honneur d'être, etc. Signé, de Fouchy. À l'Académie, ce 16 novembre 1757 (Causans 57, p. 11). Le 9 décembre, le chevalier de Causans signe sa requête au Roi (Causans 57, p. 15). Le 17 décembre, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] : Monsieur, Ma requete au Roi cy jointe prouvera que j'ay rempli ce que j'avois annoncé. Il y a encore moyen d'eviter un éclat qui ne [sçauroit] etre contre moi, puisque je demande a l'Academie de démontrer simplement l'erreur qu'elle assure plus grande que les rapports les plus eloignés. Cela supposé, il est tres aisé, Monsieur, de le faire voir par figure et par nombre, et pour plus de facilité, je dis, Monsieur, que [maths] L'Academie doit [l]oüer le motif qui me fait agir. Par mes sentimens pour elle, un de mes gens attendra sa reponse que je vous prie de lui donner, et d'etre persuadé que j'ay l'honneur d'etre très parfaitement, Monsieur, cotre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. A Paris, ce 17 [décem]bre 1757 (AAS, DS, 17 novembre 1757). Le 20 décembre : J'ay lu a l'Academie une lettre de monsieur le chevallier de Causans jointe a une requête imprimée qu'il veut presenter au Roy, pour demander que Sa Majesté ordonne a l'Academie de faire un nouvel examen de son affaire. J'ai été chargé de lui repondre qu'il etoit le maitre de faire sur cela ce qu'il jugeroit à propos ; mais que l'Academie n'avoit rien a changer ny a ajouter a ce qu'elle avoit decidé sur cette affaire (PV 1757, p. 642). Le 31 décembre, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] : Monsieur, Il est tres evident que l'Academie royale des sciences s'est declarée juge et partie dans son prononcé sur ma proposition. Il est aussi manifeste que l'Academie fait tous ses efforts pour éviter un ordre du Roi de donner des explications au certificat du 20 juillet 1757. Il me semble, Monsieur, que l'Academie deuvoit prevenir mes desirs la dessus, pour etre exempte meme du soupçon de partialité. Je suis assuré, Monsieur, démontrer géométriquement l'erreur du principe, celle des conséquences et des conclusions dont elle s'est servie contre ma proposition, et si la force de la verité ne [l'obligeait] pas de l'avouer, je subirai condamnation sans m'en plaindre. Finissons au commencement de cette année mes differens avec l'Academie. Je ne demande que la verité pour médiateur […]. Je vous prie, Monsieur, de faire valoir a l'Academie les sentiments de mon coeur pour elle. J'espere dans [les huit] jours une reponse […] Je suis toujours le plus parfaitement, Monsieur, votre tres humble et tres obseissant serviteur le ch[evali]er de Causans. A Paris, ce 31 [décem]bre 1757 (AAS, DS, 14 janvier 1758). Le 14 janvier 1758 est imprimé : Mémoire pour donner le moyen à tout homme qui sait lire de juger avec connaissance du cause de la proposition du chevalier de Causans présentée par ordre du Roi à l'Académie royale des sciences, et de la réponse de l'Académie. Il faut comparer rapport à rapport. […] La quadrature du cercle dépend de connaître le véritable rapport du diamètre à la circonférence d'un cercle quelconque. L'Académie étant dans l'impuissance de combattre par aucun moyen le rapport de huit à vingt-cinq que le chevalier de Causans a présenté au Roi, chacun peut présentement lire, simplement réfléchir et prononcer ensuite très facilement avec vérité. Le chevalier de Causans (Causans 58). Le même jour, le chevalier de Causans adresse son mémoire à Grandjean de Fouchy : Monsieur, Les vérités ont de grandes ressources pour se faire connoître, et supérieurement celles de géometrie, le memoire cy joint en est une preuve authentique. L'Academie peut, Monsieur, se justifier dans le public a mon egard, en avouant de bonne foi qu'elle a donné trop de confiance a une fraction chimérique. Il est toujours glorieux de retracter une erreur, et très honteux de la soutenir, et si l'Academie charge de repondre ceux qui voudroient s'y opposer, vous le verrés bientôt. Monsieur, sous la loi de la verité, qui exige de droit que l'Academie lui rende justice, l'ayant dégradée par son jugement, et je ne pourrois me dispenser en cas de refus de supplier encore le Roy, seul juge souverain de ses sujets, d'interposer son autorité. L'Academie n'est point un tribunal sans appel, les parlements même ne le sont pas. Voicy, Monsieur, qui est sans réplique. Si l'Academie a de bonnes raisons à m'opposer, il est du devoir de la bienseance et de l'humanité de les dire, puisque je les desire comme une grace. Si elle n'en a point, ce seroit favoriser l'erreur et le mensonge pour abuser de la confiance publique de garder le silence, après avoir condamné injustement les axiomes et les principes que j'ai employés dans la demonstration de ma proposition. Sa réponse positive, dont je me flatte, déterminera ma conduitte. Je rends de bon coeur le bien pour le mal. A l'Academie je ne puis mieux faire, mais mon honneur est dans cette occasion inséparable de la verité a laquelle l'Academie doit une réparation, s'agissant de la plus importante et la plus avantageuse découverte et qui interesse les nations. J'espere que je ne serai point obligé de rendre cette lettre et mon mémoire publics, et que l'Academie se rapellera avec satisfaction et imitera le beau trait d'histoire. J'en appelle a Philippe. J'ai l'honneur d'etre très parfaitement, Monsieur, votre très humble et très obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. A Paris, ce 14 janvier 1758 (AAS, DS, 14 janvier 1758). Le même jour : J'ai lu à l'Académie une lettre et un memoire imprimé de M. le ch[evali]er de Causans, après laquelle lecture, j'ai été chargé de lui répondre que l'Académie s'en tenait à son jugement, et persistoit a ne vouloir plus se meler de cette discussion géométrique, et qu'elle l'avoir même deffendu de lui répondre autrement que pour l'assurer des sentimens avec lesquels j'etois etc (PV 1758, p. 57). Et Grandjean de Fouchy répond au chevalier de Causans : M., J'ay communiqué suivant votre intention à l'Acad[émie] la lettre que vus m'avez fait l'honneur de l'écrire, et le mémoire imp[imé] qui y etoit joint. Elle s'en tient toujours à son premier jugement et persiste à ne vouloitr plus entrer dans cette discussion géométrique. Elle m'a même defendu de vous répondre autrement que pour vous assurer que personne ne peut estre plsu parfaitement que moy [etc.] (AAS, DS, 14 janvier 1758). En janvier 1759, le chevalier de Causans adresse de manière anonyme un mémoire sur la quadrisection de l'angle, que Clairaut est chargé d'examiner (cf. 20 janvier 1759 (2)). Après rapport négatif du 31 janvier 1759, le chevalier de Causans fait paraître (Causans 59a) (cf. 27 octobre 1759 (1)). Il écrit à l'Académie le 14 novembre (cf. 14 novembre 1759 (2)). Le 17 novembre : J'ai lû à l'Academie une lettre et un memoire imprimé de M[onsieu]r le chevalier de Causans sur sa quadrature et sa trisection de l'angle. J'ai été chargé de lui répondre que l'Académie ne jugeoit point des ouvrages imprimés, et que d'ailleurs elle n'avoit rien a changer au jugement qu'elle avoit porté de ces ouvrages (PV 1759, f. 769r). Devant cette réaction, le chevalier de Causans écrit au Roi (Causans 59b), le 9 décembre 1759 (cf. 9 décembre 1759 (1)). Il se plaint de Clairaut le 22 décembre (cf. 22 décembre 1759 (3)). Le chevalier de Causans présente ensuite l'affaire à la « face de l'Univers » et somme Clairaut et l'Académie de prouver sous un mois qu'ils connaissent l'aire d'un triangle isocèle quelconque (Causans 60a) (cf. 7 mai 1760 (2)). Le 17 mai 1760, le chevalier de Causans écrit à l'Académie des sciences : Messieurs, Je m'interesse comme vous mêmes a votre réputation et a votre gloire. Nous devons, Messieurs, respecter le public et contribuer au bien autant qu'il est en notre pouvoir sans déroger aux usages ni a la prudence qu'i regle votre conduite. Vous pouvés facilement, Messieurs, par une simple invitation anonyme d'une de la compagnie, finir pour toujours nos disputes. Vous vous chargeriés autrement a pure perte de tout le blâme. Ainsi, je vous prie, Messieurs, d'avoir cette complaisance en faveur de la verité pour ou contre. Si je me trompe, j'en porterai seul toute la peine, si je réüssi à démontrer le miracle de la géometrie fort au dessus de la geometrie, vous aurés rendu, Messieurs, le plus grand service aux sciences conformément a vs intentions. J'espere ensuite, Messieurs, quelque part dans votre amitié dont je connois tout le prix. J'ai l'honneur d'être avec respect, Messieurs, votre très humble et très obligeant serviteur le chev[alier] de Causans. Parsi, ce 17 mai 1760 (AAS, DS, mai 1760). Au terme d'un « coupable silence » de Clairaut et l'Académie, le chevalier de Causans écrit une ultime fois au public (cf. 8 juin 1760 (1)). Le chevalier de Causans est évoqué par Marie Jacob (Jacob 06, pp. 108-114). Notice résumée
Abréviations
AAS : Archives de l'Académie des sciences, Paris.
AD : Archives départementales.
AN : Archives nationales.
BnF : Bibliothèque nationale de France, Paris.
DS : Dossiers de séance, Archives de l'Académie des sciences, Paris.
MC : Minutier central.
NDA : Note de l'auteur.
PV : Procès-Verbaux, Archives de l'Académie des sciences, Paris.
Références
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Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauléon, chevalier de), Prospectus apologétique pour la quadrature du cercle, Paris, 1753 [12 mai 1753 (1)] [Plus].
Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauléon, chevalier de), L'Apologie et les avantages de la quadrature du cercle, sl, 1753.
Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauléon, chevalier de), Analyse du prospectus pour la quadrature du cercle, [Paris], [1753].
Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauleon, chevalier de), Dernières réflexions instructives de M. le chevalier de Causans sur la quadrature du cercle, [Paris], 1753.
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Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauléon, chevalier de), Billet de souscription pour la quadrature du cercle, Paris, 1754.
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Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauléon, chevalier de), Démonstration de la quadrature du cercle par M. le chev[ali]er de Causans cy devant colonel du régiment d'infanterie de Conty, [Paris], [1754].
Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauléon, chevalier de), La vraie géométrie transcendante et pratique, qui apprend avec la dernière précision, les latitudes, les longitudes du globe terrestre, et la méthode des racines quarrées de tous les nombres rompus, par M. le chevalier de Causans, ci-devant colonel du régiment d'infanterie de Conty, Paris, 1754.
Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauleon, chevalier de), La quadrature du cercle, démontrée à l'Académie royale des sciences le 14 mai 1755. Par M. le chevalier de Causans, ci-devant colonel du régiment d'infanterie de Conty, Paris, 1755.
Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauléon, chevalier de), « Lettre de M. le chevalier de Causans à Milord Macclesfield, président de la Société royale de Londres », Mercure de France, septembre 1755, pp. 93-94.
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Estève (Pierre), Origine de l'Univers, expliqué par un principe de la matière, Berlin, 1748 [24 décembre 1750 (1)].
Estève (Pierre), Mémoire pour le sieur Pierre Estève, de la société royale des sciences de Montpellier, contre messire Joseph-Louis Vincent de Mauléon de Causans, chevalier non profès de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, ancien colonel du régiment de Conti, infanterie, et contre le sieur Jean Digard, ancien ingénieur du Roi, professeur de mathématiques au sujet du prix proposé par M. de Causans au premier qui démontrerait un paralogisme dans sa démonstration de la quadrature du cercle, Paris, 1755.
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Courcelle (Olivier), « 12 mai 1753 (2) : Clairaut et le chevalier de Causans », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n12mai1753po2pf.html [Notice publiée le 12 décembre 2010, mise à jour le 17 janvier 2012].
L'on sait depuis quelques jours que M. le chevalier de Causans, capitaine-lieutenant commandant le régiment de Conti, infanterie, a donné sa démission dudit régiment et a obtenu une pension de 1 500 livres (Luynes 60-65, vol. 4, p. 105). Du 14 décembre 1750 :
Le Spectacle de l'Homme [(Causans 51)] est le commencement d'un ouvrage philosophique qu'on se propose de donner par parties. Ce que j'ai l'honneur de vous annoncer a été si mal reçu que je ne crois pas que l'auteur soit tenté de continuer. On se propose de combattre les pyrrhoniens, les sceptiques, les épicuriens, les athées et les déistes. Il faudrait plus de sagacité que n'en a notre philosophe pour trouver de bons arguments contre de tels adversaires, plus de méthode pour les mettre en œuvre, et plus de style pour les faire goûter (Grimm 77-82, vol. 2, p. 8). Du 12 juillet 1751 :
Un visionnaire qui m'est tout à fait inconnu a entrepris un ouvrage intitulé le Spectacle de l'Homme [(Causans 51)], qu'il s'est proposé d'imprimer par cahiers. La chute de sa première partie ne l'a pas rebuté, et il vient de publier la seconde. Elle contient des réflexions sur la création ou l'ouvrage des six jours. L'auteur, après avoir rapporté ce qui se trouve dans l'Écriture sainte, lâche celles de ses opinions métaphysiques, morales, physiques et astronomiques qui y ont quelque rapport. Vous ne trouverez nulle part plus de visions et d'absurdités que dans cette brochure (Grimm 77-82, vol. 2, p. 83). Clairaut signe l'approbation du Prospectus apologétique pour la quadrature du cercle (Causans 53a) le 12 mai 1753 (cf. 12 mai 1753 (1)). L'auteur, après une longue introduction :
Depuis plus de 2 000 ans, la quadrature du cercle a été regardée comme la clef de la géométrie, sans en être cependant la plus parfaite figure, puisqu'il y en a une encore plus parfaite, ainsi que je le prouverai.
Je paraitrai téméraire en assurant que j'ai découvert une vérité qu'on a cherchée vainement depuis tant de siècles, mais il serait contraire à la raison de dire que ce qu'on ignore et qui est possible, nous sera toujours caché. Je demande pour toute question aux incrédules, et aux plus habiles, comment il peut être possible d'égaler deux quantités bornées, qui est tout le nœud du mystère. Je puis donc assurer que je ferai des démonstrations nouvelles, par des opérations inconnues, et j'établirai des axiomes de géométrie, sur des erreurs qui passent aujourd'hui pour des axiomes.
Par exemple, je ferai voir évidemment, par une figure de géométrie, que le contenu est parfaitement égal en parties et en surface au contenant, très distinct du contenu ; qu'un globe qui tourne sur son axe en décrit ni un sphéroïde ni un épicycle ; qu'il est absolument impossible qu'un corps sphérique, de quelque façon qu'on le fasse mouvoir, décrive jamais une ellipse, ce qui détruit le système de Copernic. C'est par les effets de la quadrature du cercle que ces merveilles physiques se manifesteront. Voici les principaux avantages de ma proposition :
1° En connaissant parfaitement la valeur de la courbe, on pourra facilement la comparer avec toute ligne droite.
2°. Le rapport du diamètre à la circonférence du cercle, étant une fois connu, tous les points de la surface de la Terre deviendront centre de la latitude, de la longitude et du méridien, qui est ce qu'on cherche.
3°. On connaîtra la vraie figure de la Terre en la divisant toute en quarrés égaux.
4°. On verra sur les nouvelles cartes géographiques qu'on fera les véritables nadirs de tous les zéniths, c'est-à-dire les antipodes de l'une et l'autre hémisphère.
5°. On saura aux pleines lunes le vrai lieu du Soleil dans le firmament du ciel et des étoiles fixes en oppositions.
6°. On pourra mesurer avec précision tout le globe terrestre.
7°. Il y a apparence qu'on connaîtra la cause du flux et du reflux de la mer, le mouvement des planètes étant bien différent de celui qu'on croit qu'elles ont etc.
Je propose pour cet ouvrage des souscriptions de mille liv[res] qui pourront être composées de tel nombre de personnes qu'on voudra : si les nations intéressées à cette grande et très utile découverte, voulaient composer un seul nombre de souscriptions, cela abrègerait de beaucoup le temps de la démonstration.
Ceux qui voudront souscrire, pourront s'adresser à M. de Montmartel, garde du Trésor royal à Paris, qui, en recevant les sommes ou les soumissions, en donnera des récépissés, dans lesquels il sera fait mention que si l'auteur ne démontre pas géométriquement la quadrature du cercle, on rendra à chacun ce qu'il aura mis en dépôt sans aucune diminution ; et si l'auteur tient sa promesse, on lui délivrera les souscriptions qui doivent monter à quatre millions avant la démonstration, dont on enverra ensuite cent exemplaires à chaque royaume et état qui auront désiré d'y participer : les figures y seront gravées et jointes à l'explication la plus claire ; de sorte que l'usage en sera commun à tous pour l'intelligence et l'exécution.
Le chevalier de Causans, ci-devant colonel du régiment d'infanterie de Conti, a l'honneur d'inviter les Académies des sciences de l'Europe, d'envoyer un député, qui en arrivant à Paris, recevront chacun cent louis chez M. de Montmartel, pour contribuer aux frais du voyage à tout événement. Tout sera fini en trois démonstrations consécutives, qui se feront publiquement à l'Académie des sciences à Paris.
On avertira à temps afin que ceux qui voudront y assister puissent s'y trouver sans attendre (Causans 53a). Luynes, le 23 mai 1753 :
II paraît un imprimé intitulé Prospectus [(Causans 53a)], sous le nom de M. le chevalier de Causan, qui croit avoir trouvé la quadrature du cercle. Il propose des actions à ceux qui voudront contribuer aux preuves qu'il fournira et M. de Montmartel pour répondant de l'argent avancé, qu'on rendra à ceux qui ne seront pas contents des démonstrations. Cet imprimé signé Clairaut, sans approbation, mais seulement lu et présenté au Roi, à la Reine, etc., va être supprimé. Le projet n'est pas trouvé suffisamment prouvé pour être donné au public, et M. de Montmartel s'est plaint qu'on y eût mis son nom. Je crois que c'est un mauvais conseil qu'on a donné au chevalier de Causans par une plaisanterie encore plus mauvaise (Luynes 60-65, vol. 12, pp. 453-455). Le Mercure de France donne un extrait de (Causans 53a) qui se termine ainsi :
M. de Montmartel souhaite que le public soit averti qu'il a été nommé dans le Prospectus sans son aveu, et qu'il ne prendra aucune part à cette affaire (Mercure de France, juin 1753, vol. 1, pp. 214-215). Parallèlement, Liger fait enregistrer sa quadrature à la Librairie et entame une correspondance publique avec le chevalier de Causans (cf. 11 juin 1753 (1)). Le chevalier de Causans continue de battre le rappel dans L'apologie et les avantages de la quadrature du cercle (Causans 53b), rapporté dans le Mercure de France, d'août 1753, pp. 136-139. Il se tourne vers des notaires et fait publier son Analyse du prospectus pour la quadrature du cercle :
Les trois démonstrations que M. le chevalier de Causans a proposé de faire sont :
1° De décrire une quarré parfaitement égal à un cercle quelconque.
2° De prouver que le contenu et le contenu du contenu sont géométriquement égaux au contenant, ce qui n'a jamais été dit.
3°. D'expliquer les véritable rapports du diamètre du cercle à sa circonférence.
Finalement la quadrature géométrique du cercle.
Il y aurait un moyen le moins onéreux et le plus flatteur, afin que du plus petit au plus grand, chacun participât à la gloire de contribuer à connaître des vérités et des avantages qui ont été désirés de tous les savants du monde, qui serait des souscriptions nationales et des souscriptions particulières de mille livres. Le simple aveu des souverains par leurs ministres suffira pour les nations respectives, et ceux à qui il plaira de souscrire se feront mettre sur l'état de Messieurs les notaires préposés, savoir, Messieurs
Le Verrier, rue de la Monnoye, à la descente du Pont-Neuf,
Aleaume, rue de Condé,
Laideguive, rue des Grands Augustins,
Chomel, rue Pavée, vis-à-vis la rue Françoise,
Quinquet, près le Marché Saint-Germain,
Boulard, rue S[aint]-André des Arts.
Ces messieurs tiendront des registres pour Paris jusqu'au quinze septembre, pour les provinces jusqu'au premier octobre, pour les pays étrangers jusqu'au quinze.
Alors, s'il y a soumission pour quatre mille souscriptions, M. le chevalier de Causans les réalisera pour cinq cents livres chacune ès main des notaires nommés, le quatorze d'octobre, et ceux qui auront fait leur soumissions les réaliseront pour mille livre chacune du quinze au vingt, lesquels notaires donneront lors du second payement des souscriptions en forme de dépôt comme il suit.
« Je soussigné, notaire au Châtelet de Paris, reconnais qu'il m'a été déposé la somme de quinze cents livres, savoir 500 livres par M. le chevalier de Causans et mille livres par le porteur, pour appartenir et être remise aussitôt après le jugement de Messieurs de l'Académie des sciences de Paris, et des députés des académie des pays étrangers qui voudront s'y trouver, dûment signé de M. le secrétaire de l'Académie et à moi délivré par duplicata, sur les trois démonstrations proposées par M. le chevalier de Causans, dont copie est est en tête du présent récépissé, savoir au porteur, si le jugement est contraire audit s[ieu]r chevalier de Causans, ou au s[ieu]r chevalier et à son ordre si le jugement lui est favorable, et pour ma décharge le double du présent récépissé numéroté me sera remis acquitté par celui qui aura droit de recevoir en lui remettant ledit dépôt, au moyen de quoi l'autre demeurera nul, etc. le [blanc] 1753. »
Quoique les souscriptions ne soient que de mille livres, on rendra quinze cents livres aux conditions ci-dessus mentionnées. On connaîtra par ce moyen la bonne volonté de ceux qui auront contribué à vérifier des propositions aussi surprenante qu'intéressantes ; et, du moment que les souverains auront agréé les souscriptions nationales, Messieurs les députés des pays étrangers pourront se rendre à Paris avec un certificat sur la foi duquel M. le chevalier de Causans fera remettre à chacun trois mille livres avant les démonstrations qui se feront les vingt-et-un, vingt-deux et vingt-trois d'octobre. Si on diffère de souscrire jusqu'après les termes marqués, Monsieur le chevalier de Causans sera dégagé de sa parole. Il fera usage de l'algèbre le moins qu'il sera possible dans les démonstrations pour ne pas abuser de l'attention des spectateurs qui seront à l'Académie royale des sciences de Paris (Causans 53c). L'extrait qu'en donne le Mercure se termine ainsi :
Les conditions que M. le chevalier de Causans proposent aux souscripteurs sont si avantageuses que nous ne doutons point que les souscriptions ne soient bientôt remplies. Si contre notre espérance cela n'arrivait pas, l'auteur resterait maître de la campagne, ce qui est après la victoire, ce qui peut arriver de plus glorieux (Mercure de France, septembre 1753, pp. 146-147). Le 13 [novembre] 1753, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] :
Dans le doute, Monsieur, si vous avés reçu la lettre que j'ay eu l'honneur de vous ecrire a la campagne, agréés, je vous prie, un second memoire pour [l'avis] que je desire de Messieurs de l'Academie. Vous m'obligeriés sensiblement, Monsieur, si vous pourrés me le retourner samedi prochain puisque ce serat [!] demain une assemblée generale et publique. J'yrai vous en remercier avec empressement et vous assurer que personne n'est plus parfaitement que moi, Monsieur, votre […], aimable et très obeissant serviteur Le ch[evali]er de Causans. A Paris, ce 13 [novem]bre 1753 (AAS, DS, novembre 1753). Le 17 novembre à l'Académie :
J'ai lu une lettre de Mons[ieu]r le chevalier de Causans par laquelle il prie l'Académie de décider si la quadrature du cercle est impossible ou non : sur quoi on a été aux voix, et j'ai été chargé de lui répondre que la quadrature absoluë du cercle n'étoit démontrée ni possible ni impossible ; mais que l'inutilité des efforts que les plus grands géometres avoient fait jusqu'ici pour résoudre ce probleme, prouvoit au moins que la quadrature du cercle êtoit d'une extrême difficulté, et demandoit pour être seulement tentée, les plus grandes connoissances en géometrie (PV 1753, p. 631). Le [18] novembre, [Grandjean de Fouchy] [écrit] au [chevalier de Causans] :
Mr Newton et plusieurs autres geometres après lui ont demontré que la quadrature infinie du cercle est impossible, c'est a dire qu'il est impossible de trouver une regle generale pour quarrer une portion quelconque de cercle, mais il n'est point demontré qu'il soit impossible de trouver la quadrature de l'aire entiere du cercle. Il n'est point demontré non plus que cela soit possible. Au reste les efforts inutiles que les geometres les plus profonds ont fait jusqu'à present pour resoudre le probleme de la quadrature du cercle prouve au moins que ce probleme est d'une extreme difficulté (AAS, DS, novembre 1753). Le 18 novembre, Grandjean de Fouchy rédige un certificat :
Extrait des registres de l'Acad[émie] des sciences. Du 17 novembre 1753.
Monsieur le ch[evali]er de Causans ayant proposé à l'Acad[émie] de décider si la quadrature du cercle etoit absolument à prouver geometriquement, l'Académie a jugé que la quadrature absolue de cercle n'est démontrée ny possible ny impossible mais que l'inutilité des efforts que les géomètres les plus profonds ont fait jusqu'icy pour résoudre le probleme de la quadrature du cercle prouve au moins que ce probleme est d'une extrême difficulté et demande pour estre seulement tenté les plus grandes connoissances en géométrie. En foy de quoi j'ay signé le present certificat à Paris ce 18 novembre 1753. Pour minute de Fouchy (AAS, DS, novembre 1753). Le chevalier de Causans rédige alors ses Dernières réflexions instructives de M. le chevalier de Causans, sur la quadrature du cercle :
M'étant exposé à l'incrédulité et à la critique publique, je me trouve obligé d'éclaircir mon projet. Lors du premier prospectus [(Causans 53a)], j'étais occupé du doute et nullement de l'impossibilité et de l'inutilité de la quadrature du cercle qu'on a voulu généralement opposer ; ce qui m'a déterminé à consulter Messieurs de l'Académie des sciences, de la façon qui suit.
« Extrait des registres de l'Académie des sciences.
Du 17 novembre 1753.
Monsieur le chevalier de Causans ayant proposé à l'Académie de décider si la quadrature du cercle était absolument impossible à trouver géométriquement, l'Académie a jugé que la quadrature absolue du cercle n'est démontrée ni possible ni impossible. Mais l'inutilité des efforts que les géomètres les plus profonds ont faits jusqu'ici pour résoudre le problème de la quadrature du cercle, prouve au moins que ce problème est d'une extrême difficulté, et demande pour être seulement tenté, les plus grandes connaissances en géométrie. En foi de quoi, j'ai signé le présent certificat, à Paris, ce 18 novembre 1753. Grandjean de Fouchy, secrétaire perpétuel de l'Académie royale des sciences. »
Je n'ignorais pas qu'il serait imprudent d'annoncer qu'on a découvert ce qui est impossible, et tout aussi déraisonnable d'attribuer des propriétés au néant, il ne reste que d'en prouver l'utilité.
[Il prétend qu'elle permettra de résoudre le problème des longitudes.]
Pour épuiser les objections qu'on voudrait encore faire, je rappelle mes propositions :
1°. De décrire un quarré parfaitement égal à un cercle quelconque.
2° De démontrer qu'en géométrie, un est trois, et trois ne sont qu'un, c'est-à-dire que trois uniques figures de mécanique contenues l'une dans l'autre sont géométriquement égales, d'où il s'ensuit que chaque tout dans l'étendue a deux parties distinctes géométriquement et séparément égales à lui. Cette proposition qui détruit l'axiome le mieux établi, que le tout est absolument plus grand qu'une de ses parties, doit au moins exciter la curiosité de ceux qui aiment et qui recherchent les grandes vérités.
3° De prouver par une règle générale le véritable rapport du diamètre du cercle à sa circonférence.
4°. La quadrature géométrique du cercle.
Si ces propositions paraissent douteuses ou impossibles, elles valent la peine d'être vérifiées ; si on les croit possibles, elle méritent le défi de les voir démontrer.
Nombre de personnes ont demandé aux notaires préposés des souscriptions, en les payant comptant, ce n'est point de quoi il s'agit. Je vérifierai mes propositions avec 4 000 souscriptions comme il est écrit. On ne peut les recevoir en détail sans savoir auparavant si le nombre se trouvera. Il dépend des nations et des particuliers réunis d'en répondre, et en m'avertissant quatre jours d'avance, je fournirai mon contingent de 500 livres pour chacune. Le sixième jour, je commencerai les démonstrations, et le neuvième, les notaires nommés acquitteront les récépissés de 1 500 livres, dont 1 000 livres de la part des souscripteurs, et 500 cents de la mienne, le tout au jugement de l'Académie royale des sciences à Paris, et de messieurs les députés des académies des pays étrangers qui voudront s'y trouver, à qui je ferai remettre à chacun 3 000 liv[res] en arrivant.
Ma justification m'intéresse trop pour en négliger les moyens et ne pas répondre aux difficultés qu'on a fait naître, en disant que j'ai proposé 4 000 souscriptions que par l'impossibilité de les voir remplir, et que je ne satisferai pas à la condition qui me regarde de 500 livres par souscriptions.
J'ai parlé à l'Europe, il est bien aisé de s'instruire sur ce dernier article. Si je manque ma parole, je joindrais ma voix aux autres pour ma confusion. Si j'ai tort dans les démonstrations, la peine que je m'impose me mettra à l'abri de tout reproche. Je puis donc penser que si l'on persiste dans l'indifférence sur mes propositions, d'après les facilités que je donne pour les vérifier, ce sera un effet de la libre volonté, et de rien que l'on puisse m'imputer ; mais alors ce serait avouer qu'on méprise des connaissances qui ont paru dans tous les temps dignes de l'attention et de la générosité des plus grands rois, ce qui empêcherait pour toujours tout homme sensé de tenter de nouveau progrès dans la géométrie, qui est cependant la science la plus utile, la plus féconde et la plus digne de l'entendement ; et en supposant cet aveu universel, je serais à mon particulier assez discret pour ne dire et n'écrire jamais ce qu'on aurait voulu si constamment ignorer.
Je déclare authentiquement que je n'ai consulté personne, et que je suis seul dépositaire de mon secret (Causans 53d). Ces Dernières réflexions sont insérées dans le Mercure de France, décembre 1753, vol. 2, pp. 157-163. Le 1er janvier 1754, le chevalier de Causans rédige sa Réponse de Monsieur le chevalier de Causans à un des ses amis de Londres :
On pense à Paris, Monsieur, comme à Londres. Il a fallu un certificat de l'Académie royale des sciences pour détromper le plus grand nombre sur la prétendue impossibilité de la quadrature du cercle. Il est cependant raisonnable de douter que j'aie trouvé ce qu'on a cherché inutilement pendant trente siècles.
La quadrature du cercle sera la base des sciences, la perfection des arts et des mécaniques sans exceptions. Les souverains ne sauraient trop estimer de tels avantages en les procurant à leurs sujets. Le moyen qui m'a paru les plus honnête et le plus efficace pour vérifier la quadrature du cercle a été d'inviter l'utile curiosité par des souscriptions réciproques auxquelles les savants et les riches pourront aussi contribuer glorieusement par leurs désirs et leurs facultés.
Vous savez, Monsieur, que je propose encore d'expliquer le plus incompréhensible mystère de la nature. Si je démontre qu'un tout quelconque a deux parties distinctes séparément et géométriquement égales à lui, quel avantage ne retirerait-on pas d'un vérité qui, en détruisant l'erreur la plus ancienne et la plus générale, prouverait que le tout n'est pas absolument plus qu'une de ses parties. Jamais les nombres sourds et muets qui se perdent dans les bornes de la matière ne serviront à découvrir ce prodige de géométrie qui est uniquement du ressort de l'intelligence, essence de l'âme, qui peut seule pénétrer dans l'infini en s'élevant jusqu'au trône de la divinité dont elle est émane.
Pour lever tout scrupule, Monsieur, et aplanir les difficultés, je trouverai des parents et des patriotes qui, sans déranger leurs fortunes, se prêteront volontiers, comme bons citoyens, à mes engagements d'honneur. Ayant donné et renouvelé ma parole que je fournirai, lorsqu'on le voudra, 500 livres pour chaque souscription de 1 000 livres, ainsi les nations qui composent les empires, les royaumes et les autres états n'auront plus la peine de demander où sont les souscriptions : c'est à moi de dire où sont les souscripteurs qui veulent participer à la reconnaissance universelle.
Je suis, Monsieur, etc.
À Paris ce premier janvier 1754 (Causans 54a). Le chevalier de Causans fait publier un billet de souscription :
1754
Souscripteur... 1 000 # Auteur... 500 #
Billet de souscription pour la quadrature du cercle, payable au porteur, après le jugement de l'Académie royale des sciences et des députés étrangers qui voudront s'y trouver, à Paris.
Proposition à vérifier
1°. Décrire un carré parfaitement égal à un cercle quelconque.
2°. Démontrer qu'en géométrie un est trois, et trois ne font qu'un, c'est-à-dire que trois uniques figures de mécanique contenues l'une dans l'autre sont géométriquement égales, d'où il s'ensuit que chaque tout dans l'étendue a deux parties distincte géométriquement et séparément égales à lui. Cette proposition détruit l'axiome universel le mieux établi que le tout est absolument plus grand qu'une de ses parties.
3° Prouver par une règle générale le véritable rapport du diamètre du cercle à sa circonférence.
4° Donner la quadrature géométrique du cercle.
Chaque état et ville qui prendront au moins cent souscriptions pourront envoyer un député pour assister aux démonstrations, à qui on remettra trois mille livres en arrivant à Paris.
Récépissé des notaires
Je soussigné, notaire au Châtelet de Paris, reconnais qu'il m'a été déposé la somme de 1 500 livres, savoir 500 liv[res] par M. le chevalier de Causans et 1 000 liv[res] par le porteur, pour appartenir et être remise aussitôt après le jugement de Messieurs de l'Académie des sciences à Paris, dûment signé de M. le secrétaire de l'Académie et à moi délivré par duplicata, sur les quatre propositions comprises au dos de la présente reconnaissance, savoir au porteur, si le jugement est contraire audit sieur chevalier de Causans, et au sieur chevalier ou à son ordre si le jugement lui est favorable, faute par ledit sieur chevalier de Causans d'avoir donné les démonstrations avant le 25 du mois de juin prochain préfix, le souscripteur retirera les 1000 liv[res] par lui déposées et 100 liv[res] en sus par forme de dédit sur les 500 liv[res] déposées par ledit sieur chevalier de Causans et les 400 liv[res] de surplus lui seront rendues, sans que leur présence respectives soit nécessaire à la remise ci-dessus, et pour ma décharge le double du présent récépissé sera remis et acquitté par celui ou ceux qui auront droit de recevoir ledit dépôt, et au moyen de quoi l'autre demeurera nul. À Paris le [blanc] du mois d[blanc] 1754 (Causans 54b). Le chevalier en adresse au président de la Royal Society, ainsi que le rapporte le Mercure de France :
Lettre de M. le chevalier de Causans à Milord Macclesfield, président de la Société royale de Londres
Milord, vous verre par les billets de souscriptions ci-joints l'étendue et les difficultés de mes propositions, et comme je ne veux rien avoir à me reprocher pour les vérifier, je m'adresse, Milord, avec confiance à la Société royale de Londres, dont les lumières distinguées font la gloire de la nation pour la science. Ma satisfaction sera parfaite, si celle que j'offre de démontrer paraît digne de la Société royale, et si elle approuve le moyen dont je me sers pour la vérifier, qui est aussi nouveau que les propositions sont curieuses et intéressantes, puisque j'assure que les longitudes principalement en dépendent, par la connaissance de la vraie figure de la Terre. Quant aux autres propriétés, étant infinies, les académies auront la gloire de puiser dans ce trésor. Agréez, je vous prie, Milord, que je vous demande si la Société royale approuve ma façon de parler là-dessus, et si elle désire quelque éclaircissement que je puisse donner.
J'ai l'honneur d'être, Milord, etc [suit une version abrégée du bulletin de souscription (Causans 54b)] (Causans 54c). En avril 1754, le chevalier de Causans rédige son Éclaircissement définitif de M. le chevalier de Causans sur la quadrature du cercle :
Après avoir proposé des vérités incroyables à prouver, il a fallu s'attendre aux difficultés que l'incrédulité peut faire naître, et qu'il faut tâcher de détruire efficacement.
Les notaires au Châtelet de Paris préposés par M. le chevalier de Causans, savoir Messieurs
Le Verrier, rue de la Monnoye, à la descente du Pont-Neuf,
Aleaume, rue de Condé,
Laideguive, rue des Grands Augustins,
Chomel, rue Pavée, vis-à-vis la rue Françoise,
Quinquet, près le Marché Saint-Germain,
Boulard, rue S[aint]-André des Arts,
délivreront des souscriptions à commencer le 15 du présent mois d'avril, et jusqu'au 15 du mois de juin prochain. Ce terme expiré, je démontrerai à l'Académie royale des sciences, du 15 au 25 dudit mois de juin, si le nombre de souscriptions auquel je voudrai me borner est rempli, et au cas qu'il ne le soit pas, il sera libre à M. le chevalier de Causans de ne pas donner lesdites démonstrations, mais alors les notaires nommés et dépositaires remettront aux souscripteurs 1 100 liv[res] pour chaque souscription de 1 000 liv[res] ce qu'ils inséreront et signeront au dos des billets de souscription dont voici le contenu et le modèle.
[Copie de Causans 54b]
Les grands, les patriotes, les savants et les riches découvriront au genre humain par ce moyen le plus avantageux et le plus incompréhensible mystère de la nature, si je démontre, comme je le propose, qu'un tout en géométrie a deux partie distinctes séparément, géométriquement et numériquement égales à lui, et procureront la connaissance parfaite de la figure de la Terre, des longitudes et de toute l'étendue de la vraie, de l'inconnue, de la transcendante et admirable géométrie pratique.
Je m'en rapporte présentement à la conviction intérieure de chacun en particulier, si je suis en règle, et sur ma parole et à l'égard du public (Causans 54d). Son Éclaircissement définitif est inséré dans le Mercure de France, juin 1754, vol. 1, pp. 210-211. Hullon croit tout comme le chevalier de Causans avoir trouvé la quadrature du cercle et propose que le sujet soit proposé pour le prix de l'Académie. Gandjean de Fouchy lui fait savoir que les sujets sont déjà donnés pour les trois années à venir (cf. 5 avril 1754 (1)). Le 27 avril 1754 :
J'ai aussi lu une lettre de M[onsieu]r le chevalier de Causans qui prie la compagnie de le juger, et je dois lui repondre de sa part, qu'elle ne peut prononcer sur cette question, sans y être autorisée par un arrest du conseil, parce qu'attendu les dépots qu'on assure être faits, son affaire pourroit être de nature à devenir contentieuse (PV 1754, p. 189). Le 15 mai, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] :
Monsieur,
Je me suis acquitté exactement de ce que l'Académie des sciences a desiré au sujet de l'arrest du Conseil pour ce qui me regarde.
Monsieur le comte d'Argenson a eû la bonté, Monsieur de se charger de ma requete au Roy qui a repondu que M[onsieu]r le comte d'Argenson vous donnera les ordres de Sa Majesté pour l'Académie, ainsy que je le tiens de luy. Permettez, Monsieur, que je vous représente que les interessés et moi dans les souscriptions pour la quadrature du cercle nous en rapportant entierement par les prôpres billets à la decision de l'Académie, il ne nous reste aucun scrupule, et que si l'Académie ne se croit pas suffisamment authorisée pour dire si je me suis trompé ou non sur des propositions géométriques, il me paroit que l'Académie doit demander de plus amples pouvoirs. Je vous seray très obligé, Monsieur, de ne laisser pas ignorer à l'Académie ce que j'ay l'honneur de vous mander, afin que rien ne s'oppose aux démonstrations que je dois donner, et qu'on ne peut retarder sans les anéantir. Vous en voyés, Monsieur, la conséquence. Je vous prie de me tranquil|l]iser la dessus et d'etre bien persuadé qu'on ne peut rien ajouter aux sentimens avec lesquels j'ay l'honneur d'etre, Monsieur, votres très humble et très obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans.
A Paris, ce 15 may 1754 (AAS, DS, mai 1754). Le 15 mai :
J'ai lu une lettre du chevalier de Causans qui prie l'Academie de solliciter l'arrest du conseil dont elle veut être autorisée à la décision des propositions sur la quadrature du cercle qu'il soûmet à son jugement ; et je dois lui répondre que sur cette affaire la délibération de la compagnie, est d'attendre les ordres du Roy (PV 1754, p. 216). Le 15 mai, Liger écrit à l'Académie des sciences :
Démonstration de Pierre Liger qu'il a l'honneur de présenter à M[essieu]rs de l'Academie des ciences de Paris dont il espere réponse et justice aut[h]entique. Cette démonstration prouve que Liger est l'auteur de la proposition que M. le chevalier de Causans a publiée sur la quadrature du cercle.
[maths]
Donc ma quadrature est démontrée invinciblement […] J'ai l'honneur d'etre avec un profond respect, Messieurs, votre tres humble et tres obeissant serviteur Liger, ancien commis au bureau de la guerre.
A Versailles le 15 may 1754 (AAS, DS, mai 1754). Le 18 mai :
J'ai presenté de la part de M[onsieu]r Liger commis au bureau de la guerre deux brochures imprimées et un mémoire par lesquels il réclame la quadrature de M[onsieu]r le cheval[ie]r de Causans (PV 1754, p. 219). Le 24 mai, le chevalier de Causans rédige un Supplément du chevalier de Causans, à l'éclaircissement définitif sur la quadrature du cercle :
Propositions à vérifier.
1°. Décrire un carré parfaitement égal à un cercle quelconque.
2°. Démontrer qu'un tout en géométrie a deux partie distinctes, séparément, géométriquement et numériquement égales au Tout.
3° Prouver par une règle générale le véritable rapport du diamètre du cercle à sa circonférence.
4° Donner la quadrature géométrique du cercle qui présentera la vraie figure de la Terre, et la précision des longitudes sur toute sa surface.
Si une des quatre propositions ci-dessus paraît dans les démonstrations, fausse, obscure ou douteuse, le chevalier de Causans se tiendra pour condamné.
Si d'aujourd'hui au vingt-cinq du mois de juin prochain, terme préfix, les démonstrations ne sont pas données, pour quelque cause que ce puisse être, les notaires dépositaires rendront sans aucune difficulté le 26 du même mois 1 100 l[ivres] aux souscripteurs pour chaque souscription de 1 000 livres.
Quelque nombre de souscriptions qu'il puisse y avoir avant les démonstrations, si une société se présente pour en prendre 4 000, et que le chevalier de Causans refuse de fournir son contingent de 500 liv[res] pas souscription, et de ne donner les démonstrations des quatre propositions ; alors toutes les souscriptions antérieures appartiendront de droit entier aux souscripteurs le vingt-six dudit mois de juin sans autres formalités.
Si l'on imagine encore quelque condition en faveur des souscripteurs, le chevalier de Causans s'y soumettra très volontiers. Il continue de déclarer parole d'honneur qu'il n'a consulté ni dit son secret à personne du monde.
À Paris, le 24 du mois de may 1754
Signé, le chevalier de Causan (Causans 54e). Son Supplément à l'éclaircissement définitif est inséré dans le Mercure de France, juin 1754, vol. 1, pp. 210-211. Selon Estève :
On vit paraître des souscripteurs, et il y eut bientôt environ six cent milles livres déposés à cet effet par différents particuliers chez les notaires indiqués (Estève 55a, p. 6). Dans l'extrait de (Estève 55a) présenté par le Mercure :
Il n'est presque personne qui ignore que M. le chevalier de Causans croit avoir trouvé la quadrature du cercle : il a du moins annoncé plusieurs fois dans tous les journaux la nouvelle de cette découverte. D'abord il avait fixé sa récompense à quatre millions qui devaient lui être donnés en forme de souscription, mais lorsqu'il y a eu seulement six cent mille livres, il a bien voulu publier ce qu'il appelait une découverte merveilleuse (Mercure de France, septembre 1755, pp. 89-93). Vers la même époque, le chevalier de Causans écrit une « Lettre circulaire du chevalier de Causans aux archeveques et eveques de France » :
C'est un devoir pour moi de m'adresser au plus respectable et au premier corps du royaume lors qu'il s'agit d'exercer des sentimens qui interressent toutes les nations. Mon eclaircissement definitif sur la quadrature du cercle justifiera à tout evenement l'interest que le clergé de France y prendra et servira a manifester authentiquement si ma confiance est présomptueuse ou le jugement du public trop précipité en me condamnant sans m'entendre. Je desire, Monseigneur, une chose juste : de me punir moi mesme si j'ay tort ou de découvrir les plus importantes vérités. L'amour du bien public et la bonté pastorale me font esperer, Monseigneur, que vous agréerez ce detail et que vous penserez qu'il seroit facheux de garder pour moi seul un secret de cette conséquence que je ne tiendray caché qu'autant qu'on ne voudra pas le sçavoir. Je suis bien flatté, Monseigneur, de vous témoigner dans cette occasion tout le respect avec lequel j'ai l'honneur d'etre etc (Bibliothèque de l'Arsenal, Fol. S. 1167, 5). Suit :
Pour les démonstrations de la quadrature du cercle
Premiere proposition
Décrire un quarré parfaitement egal à un cercle quelconque.
Cette proposition est prouvée dans l'ecriture par Jesus Christ même.
Seconde proposition
Qu'un tout en géométrie a deux parties distinctes contenues l'une dans l'autre, qui sont séparément, géométriquement et numériquement egales au tout.
Cette proposition est une trinité géométrique à démontrer.
Troisieme proposition
Prouver par une regle générale le véritable rapport du diametre du cercle à sa circonference.
Cette proposition est prouvée litéralement par l'ecriture sainte.
Quatrieme proposition
Donner géométriquement la quadrature du cercle.
Cette proposition, en prouvant la vérité des trois autres, présentera en même tems la vraye figure de la Terre et la précision des longitudes sur toute sa surface.
Le chevalier de Causans assure sur son honneur de démonter mot à mot les quatre propositions cy dessus et supplie le Roi de le punir le plus rigoureusement s'il manque a la moindre circonstance (Bibliothèque de l'Arsenal, Fol. S. 1167, 5). Il écrit une « Lettre du chevalier de Causans à M[essieu]rs de l'Académie des sciences » :
Messieurs,
Vous conviendrés sans peine que c'est une grande erreur d'attribüer aux anciens la principale gloire dans les sciences. Plus le monde vieillit, plus il devient sçavant par de nouvelles decouvertes et de sçavantes dissertations. Les ouvrages de plusieurs illustres génies de nos jours en sont des preuves convaincantes.
La géometrie est sans contredit, Messieurs, la science la plus certaine et la plus digne de l'entendement. Nous n'en connoissons ni tous les principes ni toute l'etendüe. Je vous propose, Messieurs, de nouveaux principes qui ne laisseront a desirer que les avantages infinis que vous y découvrirés. Je vous présente, Messieurs, un beau diam[a]nt que vos lumieres rendront très brillant a tous les yeux, puisque les hommes, les femmes et les adultes pourront pratiquer toutes les opérations de géométrie jusqu'à present inconnües et dont j'offre le moyen. Vous doutés, Messieurs, raisonnablement, mais desirés, je vous prie, par la vérification de la quadrature du cercle a l'egard de la proposition que la partie d'un tout est géometriquement et numériquement égale au tout. L'incredulité la dessus est fondée sur la notion universelle, je demande cependant de prouver géometriquement cet article et en vous prenant pour juges, je me soumets a l'equité. Suspendés, Messieurs, vôtre jugement, la douceur de vos préjugés éffacera l'amertume que pourroit me causer la crainte de l'erreur que j'espère anéantir en détrompant les sens par l'experience et le raisonnement. Je respecteray, M[essieu]rs, vôtre decision, je m'y soumettray avec la confiance dûe a la droite raison qui est pour moi la meilleure sollicitation près de vous. Agréez, je vous conjure, le temoignage du respect avec lequel j'ai l'honneur d'etre etc (Bibliothèque de l'Arsenal, Fol. S. 1167, 5). Suit en manuscrit ce qui correspond à (Causans 54f, pp. 10-20). Le 22 juin 1754 :
J'ai lu à l'Académie la lettre suivante de Mons[ieu]r le cheval[i]er de Causans.
MM. Je remplis mon engagement en vous faisant part avant le 25 de mes démonstrations [Manuscrit de (Causans 54f)], ne vous ayant pas plu MM. de donner une décision : vous pouvés en juger en attendant chacun en particulier. J'ai l'honneur d'être avec respect M[essieu]rs etc. A Paris ce 19 juin.
Après la lecture de laquelle j'ai présenté le cahier de ses démonstrations, sur quoi l'Académie ayant déliberé, j'ai êté chargé de lui renvoyer ce cahier cacheté, et de lui écrire la lettre suivante, ce que j'ai fait sur le champ.
M. j'ai lu vôtre lettre à l'Académie comme je vous l'avois promis hier ; j'ai présenté en même temps le cahyer de vos demonstrations. L'Académie ne pouvant prendre aucune connoissance de cette affaire, sans y être autorisée par le Roy conformément à sa déliberation du 27 avril, n'a pas voulu ouvrir ce paquet, et m'a chargé de vous le renvoyer cacheté, et de vous écrire cette lettre que vous pouvés faire voir comme une preuve qu'il n'a pas dépendu de vous de remplir vos engagements, et d'être jugé avant le 25 de ce mois (PV 1754, p. 303). Luynes, du 10 juillet 1754 :
Je ne sais si j'ai parlé en détail de l'affaire du chevalier de Causans. Il a cru avoir trouvé la quadrature du cercle et être en état de le prouver par des démonstrations. Il a répandu dans le public plusieurs imprimés, afin que non seulement dans le royaume, mais même dans les pays étrangers, on fît des paris contre lui ; il a paru même désirer avec grande vivacité ces paris, et quelques-uns de ceux qui dans la conversation avaient dit qu'ils parieraient la proposition impossible à prouver ont été sollicités fortement à ne pas s'en tenir à des paroles et de réaliser les paris. M. de Stainville a été de ce nombre, et s'est trouvé engagé à une partie d'une pari de 100 000 livres. Les notaires ont été nommés et ont donné leurs obligations particulières pour, après le jugement de l'Académie des sciences, remettre à ce M. de Causans ou à ceux qui auraient gagné, en se conformant exactement aux conditions énoncées dans les imprimés. M. de Causans a sollicité fortement tous ceux sur qui il avait des rentes viagères de vouloir bien le rembourser pour le mettre à portée de faire honneur à ses engagements. Heureusement pour lui, cet arrangement lui a été refusé par quelques-uns. L'argent étant chez les notaires et le terme fatal du 25 juin étant passé, il était question de prendre un parti décisif ; l'Académie des sciences a refusé de prononcer, disant qu'elle jugeait des questions et non pas des procès, qu'il lui fallait une attribution particulière par des lettres patentes. Le Roi n'a pas jugé à propos de donner ces lettres. Dans cette situation, M. de Causans a cru devoir prendre des précautions autant qu'il dépendait de lui : il a remis sa démonstration par écrit entre les mains du Roi, de M[on]s[eigneu]r le dauphin, de M. de Saint-Florentin, etc. Il dit qu'il a gagné, on lui répond que sa démonstration n'est pas une preuve, et il soutient qu'elle en doit tenir lieu, puisqu'il n'y a point de jugement. Voilà l'état de l'affaire, on trouvera ci-après les propositions contenues dans le dernier imprimé de M. de Causans [suit un extrait de (Causans 54e)] (Luynes 60-65, vol. 13, p. 293-295). Le chevalier de Causans publie (Causans 54f). Un note manuscrite en tête de l'un des exemplaires de (Causans 54f) conservé à la Bibliothèque de l'Arsenal :
Très belle ed[iti]on d'un memoire qui a fait du bruit par l'obstination avec laquelle l'auteur au soutenu sa pretendüe decouverte contre le sentiment de tous les geomètres. Joseph Louis Vincent de Moleon de Causans, ch[evali]er de Malthe est né à Avignon. Il avoit donné av[an]t cet ouvrage cy le Spectacle de l'homme in 12 [(Causans 51)] et il a fini par donner en 1758 des Eclaircissemens sur le peché originel [(Causans 55c)], autre ouvrage singulier (Bibliothèque de l'Arsenal, 4 S 3062). Montucla :
Je n'ai rien dit, dans le cours de cet ouvrage, de l'auteur de l'étrange prospectus et de quelques autres pièces de la même nature, qui nous annoncèrent l'été passé la quadrature du cercle. Par égard pour son nom et ses autres qualités qui le rendent estimable à ceux qui le connaissent, en même temps qu'ils le plaignent de sa manière de penser, qui n'a peut-être jamais eu d'exemple, je voulais me taire sur la singularité de ses prétentions, malgré le bruit qu'elles faisaient dans le monde. J'espérais que quelques amis ou versés, ou du moins plus instruits dans la géométrie, le remettraient sur la voie de la vérité ; mais la publication de sa prétendue quadrature, dans un petit in-4° magnifiquement orné de cartouches, vient de m'apprendre qu'apparemment on y a travaillé sans succès ; et j'ai cru ne pouvoir me dispenser d'en porter le jugement qu'elle mérite. Les siècles à venir croiraient-ils, si ce monument ne le leur attestait, qu'on ait pu avancer des propositions aussi absurdes, aussi directement contraires à la saine raison, que celles sur lesquelles cet auteur appuie sa prétendue découverte, et qu'il substitue aux axiomes jusqu'ici reçus de l'aveu de tous les hommes ? Deux figures ne sont plus égales quand elles se touchent dans tous leurs points, dans toute leur étendue ; il suffit, suivant M. de Causans, qu'elles se touchent dans quelques points, c'est-à-dire dans ceux où elles peuvent se toucher. De là, suit aussi ce nouveau principe, digne rejeton d'un axiome de cette espèce, que la partie est égale au tout. Que dis-je ? que dans chaque tout on peut assigner plusieurs parties qui lui soient égales. Aussi le quarré est, dit-il, précisément égal au cercle qu'il renferme, et même celui-ci à une autre figure dont les angles saillants s'appuient seulement sur sa circonférence. L'auteur enfin détermine la figure de la Terre, les longitudes, la déclinaison de l'aiguille aimantée, sur des raisons qui n'en seraient ni plus ni moins valables, quand la Terre serait de forme cubique ou pyramidale. Je me couvrirais de ridicule auprès des lecteurs sensés, si j'entreprenais d'opposer les moindres raisonnements à ces prétentions. Il n'est personne, faisant usage de sa raison, qui ne soit persuadé que les vérités métaphysiques contestées par M. de C[ausans] sont plus certaines qu'il ne l'est que jamais son prospectus singulier ait vu le jour, qu'il y ait eu des souscriptions ouvertes pour parier contre lui, et qu'il ait publié sa quadrature. Pour tout autre enfin que lui-même, elles sont plus incontestables que son existence propre.
Au reste, il est bien facile de reconnaître la cause de l'erreur de M. de C[ausans] : elle a sa source dans la méprise où il donne sur la simple définition de l'angle et sur ce qui le constitue. La surface renfermée entre ses côtés, la longueur de ces côtés n'entrent pour rien dans la grandeur d'un angle, et cette grandeur ne sert à rien pour déterminer la surface qu'il renferme avec une troisième ligne qui le borne. M. de C[ausans] suppose néanmoins le contraire, et en fait le fondement de sa quadrature ? C'est en savoir encore trop peu en géométrie pour prétendre redresser les idées des géomètres (Montucla 54, pp. xxv-xxix). De Croÿ, le [10 août 1754] :
Étant dans les Tuileries, […] je trouvai M. Lemonnier. Des goûts pareils nous liaient. Je m'assis sur l'herbe avec lui et m'y oubliais. Je lui montrai la figure de la quadrature du cercle, de M. le chevalier de Causans [(Causans 54f)], qui avait trouvé à faire un carré à centre vide égal et semblable à un cercle à centre plein. On avait beau lui dire que ce n'était pas la même chose, c'était sa folie, et il m'en avait entretenu une heure la veille (Croÿ-Solre 04-06, vol. 1, p. 278). Du 15 août 1754 :
Vous avez peut-être entendu parler de la ridicule affaire du chevalier de Causans, qui prétendait avoir trouvé la quadrature du cercle, qui proposait au public de parier contre lui trois millions, et consentait de perdre un million et demi au cas qu'il ne pût pas la démontrer. L'Académie des sciences, ne voulant pas juger une aussi ridicule affaire, M. de Causans prit le parti de découvrir son secret [(Causans 54f)], secret digne d'un écolier des basse classes ou d'un habitant des Petites-Maisons. Il vous coupe un cercle par le milieu, replie les morceaux, et parvient ainsi à en faire un carré. C'est aujourd'hui du grand air d'aller, après souper, sur les boulevards voir les marionnettes ; tout ce qu'il y a de plus grand et de plus connu à Paris s'y trouve. Comme l'affaire du chevalier de Causans a fait beaucoup de bruit dans le monde, Polichinelle n'a pas manqué d'en faire mention : J'ai trouvé la quadrature du cercle, dit-il. - Et comment cela ? demande la compère. - En causant, dit Polichinelle ; et cela nous fait rire (Grimm 77-82, vol. 2, 15 août 1754, p. 400). Le 4 septembre 1754, le chevalier de Causans écrit à Grandjean de Fouchy :
A Paris, ce 4 [septem]bre 1754
Monsieur,
Ne desirant rien tant que de me détromper si j'ay tort, et de m'instruire par les lumieres de l'Academie des sciences, je vous prie, Monsieur, d'avoir la complaisance de lire a l'assemblée ce mémoire que j'ay l'honneur de vous adresser, quoiqu'il soit contenû en substance a la suite de la demonstration que j'ai donnée de la quadrature du cercle. N'y ayant […] rapport de l'un a l'autre, je le flat[t]e, Monsieur, que l'Academie n'aura aucun scrupule de decider si l'exemple que je donne est vrai ou faux. Il est reconnû, comme vous sçavés, Monsieur, par tous les geometres que la diagonale d'un quarré est incommensurable avec un de ses côtés. Ma methode en apprendra a ce que j'espere le veritable rapport. […] en seroit trop grande pour ne pas la croire digne de l'attention de l'Academie a qui je vous serai tres obligé, Monsieur, de lire cette lettre et le memoire cy joint. Une simple dissertation de Messieurs les academiciens sera toujours tres instructive et si je n'ay pas trouvé la precision, ils pourroient en faire naitre le moyen. Je recevrai avec empressement et reconnoissance la reponse.
J'ay l'honneur d'etre le plus parfaitement, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans (AAS, DS, juin 1754). Proposition à vérifier :
Proposition a verifier
Le chevalier de Causans a proposé dans un imprimé une méthode generale pour connoitre sans calculs la racine quarrée d'une nombre quelconque. Voicy une exemple de sa methode qui est neuf et onze douzieme pour racine quarrée de quatre vingt dix huit.
Le ch[evali]er de Causans prie Messieurs d' l'Academie des sciences de vouloir bien dire si ce nombre est conforme aux observations des geometres pour avoir la racine quarré du nombre cy dessus (AAS, DS, septembre 1754). Le 4 septembre :
J'ai lu une lettre de M[onsieu]r le chevalier de Causans par laquelle il propose à l'Academie de décider si 9+11/12 est effectvement la racine quarrée de 98 comme il le prétend. On m'a chargé de lui repondre que le nombre 9+11/12 est trop grand pour la racine quarrée de 98. Ce nombre 9+11/12 êtant la racine quarrée exacte de 98+49/144 et l'Académie déclare qu'il est démontré depuis plusieurs siecles, qu'on ne sçauroit assigner exactement en nombre entier ni fractionnaire la racine quarrée de 98 non plus que celle de tout autre nombre entier qui n'a pas un nombre entier pour racine quarrée (PV 1754, p. 447). Le 26 septembre, le chevalier de Causans dépose 10 000 livres entre les mains de Me Aleaume (Estève 55a, p. 35). Le 28 septembre, Berryer permet d'afficher :
Prix de dix mille livres
Il y a dix mille livres déposées chez M. Aleaume, notaire, rue de Condé, pour le premier qui prouvera géométriquement un paralogisme dans la démonstration de la quadrature du cercle publiée par M. le chevalier de Causans, dans un écrit in-4° de vingt-deux pages et cinq figures, imprimé chez Delaguette, rue S[aint]-Jacques [(Causans 54f)]. Les savants sont invités et priés de travailler à cette vérification (Digard 55, p. 12 ; Estève 55a, p. 8). Le 5, 6 et 7 octobre, l'affiche est placardée « sur tous les piliers et carrefours de Paris » (Digard 55, p. 12 ; Estève 55a, p. 8) et sera reproduite dans les Annonces, affiches et avis divers du 14 octobre, p. 638. Une clause non rendue publique précise que si le prix n'est pas attribué au 15 novembre 1754, Aleaume rendra les 10 000 livres au chevalier de Causans (Estève 55a, p. 25). Selon Digard :
De toutes part M. de Causans a reçu, pendant plusieurs mois, des milliers de lettres à ce sujet, soit directement, soit par la voie du dépositaire indiqué. […] Il est certain que cinq ou six cents personnes ont concouru (Digard 55, p. 16). Le 6 octobre, Estève se rend chez Aleaume prendre rendez-vous avec le chevalier Causans (Estève 55a, p. 9). Le 7, Estève montre une erreur de raisonnement au chevalier de Causans, mais nécessité d'avoir recours à un arbitre indépendant se fait sentir (le nom de Bouguer est proposé). Afin de pouvoir certifier qu'il est le premier à renversé la quadrature, il dépose le même jour sa réfutation chez Aleaume (Estève 55a, p. 9-10 ; AN, MC, XCI, 910 (7 octobre 1754)). Digard, qui a vu l'affiche le dimanche 6, doit attendre le lundi 7 pour pouvoir acheter un exemplaire de (Causans 54f). Le même jour, il rédige sa réfutation, la fait adresser à Aleaume et fait opposition à la délivrance des 10 000 livres (Digard 55, p. 12). Sa lettre et son mémoire sont reproduits dans (Digard 55, pp. 24-31). À partir du 8 et presque tous les jours pendant trois semaines, Estève essaye de persuader la chevalier de Causans de la justesse de sa réfutation, « mais ces développements ne pénétrèrent pas dans l'esprit du chevalier de Causans » (Estève 55a, p. 10). Pour répondre aux objections d'Estève, le chevalier de Causans publie (Causans 54g) (Estève 55a, p. 10). Le 23 octobre, le chevalier de Causans écrit à Digard pour l'informer qu'il va montrer sa quadrature à la rentrée de l'Académie des sciences et lui demande de se désister de sa demande d'opposition (Digard 55, p. 33). Le 24 octobre, une opposition est faite par Estève à la somme de 10 000 livres ès main de Me Aleaume (Estève 55a, p. 12). Du 28 octobre 1754 :
M. Estève est un jeune homme qui cultive à la fois les sciences et les lettres, et qui serait en état de faire de bonnes choses s'il se donnait le temps de laisser mûrir ses idées et s'il avait moins d'embarras et de nuages dans l'imagination. Il a déjà donné, entre autres choses, l'Origine de l'univers [(Estève 48)], ouvrage philosophique où il prétend expliquer la formation de l'univers par les lois de l'attraction, et l'Esprit des beaux-arts, qui n'a point eu de succès.
Le même M. Estève vient d'entrer en lice, par-devant notaire, contre M. le chevalier de Causans, dans l'intention de le punir de l'extravagant défi qu'il vient de faire aux savants de lui prouver un seul paralogisme dans sa démonstration de la quadrature du cercle. Mais de la façon dont M. de Causans s'est retranché, il paraît inexpugnable; il s'est établi seul juge compétent dans son affaire, parce que, niant les premiers principes de la géométrie, les géomètres ordinaires sont des juges qu'il récuse comme étant dans de faux préjugés. M. Estève, raisonnant avec lui, voulut d'abord établir ce principe : que le tout est plus grand que sa partie. « Eh ! c' est précisément ce dont je démontre la fausseté par ma nouvelle méthode, » dit M. de Causans. Comment attaquer un raisonnement de cette espèce ? Ce qu'il y a de plaisant, c'est qu'un autre géomètre, l'abbé de Gua, de l'Académie des sciences, dispute à M. Estève la gloire de terrasser M. de Causans, et les 10,000 francs qui sont le prix de la victoire. Cette ridicule affaire finira sans doute comme elle a commencé, par faire rire, et ce ne sera pas seulement aux dépens de M. de Causans (Grimm 77-82, vol. 2, p. 197). Le 29 octobre, Estève somme par voie d'assignation le chevalier de Causans de nommer un arbitre (Estève 55a, p. 11). La demeure du chevalier de Causans ayant été mal indiquée dans l'assignation, Estève réitère le 5 novembre (Estève 55a, p. 11). Cette fois c'est le procureur qui manque dans une copie, ce qui par la suite anéantit les le droit du sieur Estève (Estève 55a, p. 11). Louis Nicolas Guest, bourgeois de Paris, demeurant cul-de-sac du Coq Saint-Honoré, dépose le 6 novembre 1754 chez Me Aleaume un « Paralogisme dans la demonstration de la quadrature du cercle publiée par M[onsieu]r le chevalier de Causans en 1754 », toujours conservé dans les archives de ce notaire (AN, MC, XCI, 521). Claude [...] Aprin le jeune, demeurant rue Saint-Honoré, paroisse Saint-Roch à Paris, dépose le 12 novembre 1754 chez Me Aleaume une « Demonstration fausse de la quadrature du cercle par M[onsieu]r le chevalier de Causan[s] », toujours conservée dans les archives de ce notaire (AN, MC, XCI, 521). Parallèlement, ceux qui ont souscrits s'impatientent, et désirent reprendre leur argent (Estève 55a, p. 12). Le chevalier de Causans, craignant de passer pour un homme manquant de parole, refuse de le faire, et annonce qu'il n'obéira qu'aux ordres du Roi (Estève 55a, p. 12). Le Roi, par l'intermédiaire du comte d'Argenson, ordonne que les souscriptions soient rendues (Estève 55a, p. 12). Le 30 décembre 1754, Liger répond à l'affiche du chevalier de Causans :
Réponse de M. Liger, commis au bureau de la guerre, à l'affiche de M. le chevalier de Causans, portant qu'il y a dix mille livres déposées chez M. Aleaume, notaire, rue Condé à Paris, pour le premier qui pourra prouver l'erreur de la quadrature du cercle de mondit sieur le chevalier de Causans, qui m'a fait l'honneur de remettre cette affiche.
On ne peut attaquer les principes de M. le chevalier de Causans, sans faire un volume qui ne pourrait entrer dans les journaux ou feuilles publiques, mais comme tout ce qui accompagne sa quadrature, tant dans sa première que seconde partie, dépend et fait une suite conséquente du rapport du diamètre à la circonférence, qu'il soutient être de 7 à 21, il s'ensuit que c'est seulement à ce seul article qu'il est nécessaire de s'attacher. […] J'estime que M. le chevalier de Causans se rendra à ces raisons, et qu'il voudra bien avouer que je suis en droit d'exiger de son engagement public de me remettre son ordre pour toucher les dix mille livres qu'il est convenu par son affiche de faire payer à celui qui le tirerait de son erreur (Mercure de France, avril 1755, pp. 131-133). Il transmet sa réponse au Mercure via une lettre à Mlle Le Mire du 16 mars 1755 :
Géométrie.
Lettre à Mlle L. A. Le Mire, veuve J.
Mademoiselle,
Je vois dans le Mercure de mars que la quadrature de M. le chevalier de Causans y est annoncée, et que vous y avez fait une réponse, chose fort glorieuse pour votre sexe en général, et à vous, Mademoiselle, en particulier. Je ne manquerai pas de m'enrichir de cette pièce. Je prends la liberté d'envoyer à M. de Boissy celle que j'ai faite à à M. le chevalier de Causans, afin qu'elle vous parvienne, et au public, par la même voie que j'ai appris la vôtre. Elle peut être insérée toute entière dans le Mercure, par la précaution que j'ai prise de la faire très courte, et à portée de toute personne de bon sens. J'ai l'honneur d'être, etc. Liger, commis au bureau de la guerre. À Versailles, le 16 mars 1755 [suit sa propre réponse à Causans en date du 30 décembre 1754] (Mercure de France, avril 1755, p. 130). Car Mlle Le Mire était entrée en lioe :
Démonstration de la quadrature du cercle, par M. le Chevalier de Causans, ci-devant colonel du régiment d'infanterie de Conti. A Paris, chez Delaguette, rue Saint Jacques, à l'Olivier, in-4°. 22 pages [(Causans 54f)].
On a toujours été jusqu'ici persuadé, et non sans raison, de l'inutilité des efforts que l'on voudrait employer pour parvenir à la découverte de la quadrature du cercle. On s'est réuni à en regarder la démonstration, non seulement comme impossible, mais comme impliquant les contradictions les plus évidentes en géométrie. Il n'est donc pas aisé de détruire un préjugé qui paraît si bien fondé. Cependant M. le chevalier de Causans, sans s'effrayer des difficultés qu'on peut lui opposer, n'a pas laissé de tenter la chose en question. Un grand nombre de personnes qui ont de la peine à s'imaginer qu'elle soit traitée sérieusement, n'auraient pas manqué d'imputer les tentatives de M. le chevalier à un pur jeu d'esprit ; il a pris la sage précaution de leur ôter cette pensée, en proposant la souscription de la somme de dix mille livres à quiconque prouvera géométriquement un paralogisme dans sa prétendue quadrature du cercle qu'il s'efforce, de démontrer dans le petit ouvrage que nous annonçons. Le prix considérable attaché à sa réfutation devait nécessairement attirer sur les bras de M. de Causans de puissants adversaires, qui se disputassent à l'envi le mérite (si toutefois c'en est un) de ruiner les conséquences sur lesquelles il l'a bâtie ; mais il ne s'était peut-être pas attendu à voir dans la foule des concurrents entrer en lice une personne d'un sexe qui semble moins faite pour se livrer à des études épineuses et abstraites que pour s'occuper des matières d'agrément. Mlle Le Mire, choquée de l'injuste prévention où l'on est contre les femmes, a été jalouse de l'honneur de les justifier, en montrant que leur esprit est capable d'atteindre aux vérités géométriques, sur lesquelles il leur arrive de raisonner plus conséquemment que bien des hommes. Elle a donc jugé à propos de se mettre sur les rangs ; et pour cet effet elle a cru devoir rendre public le fruit de son travail, qui paraît sous ce titre Le Quadricide [(Le Mire 55)], ou paralogismes prouvés géométriquement dans la Quadrature de M. de Causans, par Mlle L. A. Le Mire, veuve J. in-4e. 28 pag. chez Delaguette, etc (Mercure de France, mars 1755, pp. 71-73). Mlle Le Mire s'appelle Louise-Angelique Le Mire (ou Lemire), et est veuve de Jacques Julien (Digard 55, p. 14). Le 17 mars 1755, le chevalier de Causans présente une requête au lieutenant civil par laquelle il demande main-levée de l'opposition sur les 10 000 livres. La cause est communiquée aux gens du Roi et plaidée en audience du parc civil, qui, rend une sentence en sa faveur (Estève 55a, pp. 13, 35). Le 19 mars, Digard est assigné au Châtelet en main-levée de son opposition à la suite d'une requête du chevalier de Causans au lieutenant civil (Digard 55, p. 13-14). Il y a 5 opposants à la délivrance des 10 000 livres : Digard, Henri-Guillaume de Rokbeuk, Antoine Frizet, bourgeois de Paris, Estève, et Mlle Le Mire (Digard 55, p. 14). Estève fait appel et demande (outre que Causans soit condamné à payer les frais de justice) que la somme de 10 000 livres lui soit accordée pour fonder une chaire de mathématiques « pour l'instruction de ceux qui pourraient à l'avenir confier indiscrètement leur fortune à un paralogisme fait sur la quadrature du cercle » (Estève 55a, p. 13). À la Société royale de Montpellier :
Du jeudi 5 juin 1755. On a lû un mémoire envoyé par M[onsieu]r Digard ingénieur. Cet ouvrage est imprimé et est relatif au procès intenté par ce même M[oneiu]r Digard à M[onsieu]r le chevalier de Causans au sujet du prix de 10 000 # que ce dernier a promis au premier qui demontreroit un paralogisme dans sa demonstration de la quadrature du cercle. Cette affaire est actuellement au Châtelet de Paris M[onsieu]r Digard demande à la compagnie de vouloir bien décider, dans son mémoire, s'il a effectivement prouvé le paralogisme dont il s'agit. M[onsieu]r Brun s'est chargé de faire cet examen. A l'égard de l'autre question, si M[onsieu]r Digard est lepremier qui ait découvert le paralogisme, elle n'est point du ressort de l'Académie (AD Hérault, D. 120, p. 99).
Du jeudi 12 juin 1755. M[onsieu]r Brun a dit qu'ayant lû le mémoire pour le s[ieu]r Jean Digard communiqué à l'Académie jeudi dernier, il pensoit que ledit s[ieu]r Digard avoit prouvé géométriquement plusieurs paralogismes dans la pretendûë démonstration de la quadrature du cercle par M[onsieu]r le chevalier de Causans. Il a été délibéré que je ferois part de ce jugement à M[onsieu]r Digard (AD Hérault, D. 120, p. 99). Le 12 juillet 1755, arrêt du Parlement :
[En marge : Mr Bochart R[apporteur]] Entre M[essi]re Philippe Louis [!] de Vincens de Mauleon, chevalier de Causans non profes de l'ordre de S[ain]t Jean de Jerusalem, ancien colonel du régiment de Conty, infanterie, defendeur et demandeur en requête du 16 juin 1755 d'un part, et sieur Jean Digard, ancien ingénieur du du Roy et professeur de mathématiques, défenseur, et Me Alleaume, notaire au Chatelet de Paris, demandeur suivant sa requête insérée en l'arret de la Cour du 13 juin 1755 d'autre part ;
et entre led[it] sieur de Mauleon de Causans, demandeur suivant ses conclusions provisoires portées par requête, ordonnance et exploit des 18 et 19 juin 1755 d'une part, et le sieur Pierre Esteve, de la Société des sciences de Montpellier, et le sieur Antoine Frisé, bourgeois de Paris, défendeur d'autre part ;
vû par la Cour la
requête et demande dud[it] Alleaume, insérée en l'arret du 13 juin dernier, à ce qu'entre autres choses et par provision mainlevée lui soit faite de la saisie d'exécution de ses meubles et effets du 12 dud[it] mois de juin, à la représentation desd[its] meubles et effets, leurs gardiens contraints par corps ; requête et demande dud[it] Mauleon de Causans du 16 juin à ce qu'il fut reçu opposant aud[it] arret sur requetes obtenuës l'une par led[it] Digard, et l'autre par led[it] Alleaume les 12 et 13 juin 1755, faisant droit sur l'opposition, les défenses y portées fussent levées, led[it] Alleaume fut debouté de sa demande provisoire, et lesd[its] Digard et Alleaume fussent condamnées aux dépens, sauf aud[it] de Mauleon à prendre pour la suite telles autres conclusions qu'il aviseroit, comme aussi sous les réserves qu'il avoit faites et qu'il réiteroit de se pourvoir contre la sentence du Châtelet du 10 juin dernier aux chefs qui luy font prejudice ;
arret du 17 juin 1755 d'appointé à mettre ez main de Me Elie Bochard, conseiller productions respectives des parties en execution dud[it] arret
Celle dud[it] Mauleon de Causans par requête du 21 juin 1755 à ce que les conclusions par lui prises lui fussent adjugées, et icelles augmentant, il fut ordonné que led[it] Alleaume, notaire, soit tenu de remettre aud[it] de Mauleon de Causans les 10 000 # dont il s'agit et nonobstant toutes oppositions qui pourroient avoir été réitérées, faites ou à faire, par led[it] Digard ou autres dont en tant que besoin seroit, mainlevée provisoire lui seroit faite, et a faute par led[it] Alleaume de remettre aud[it] de Mauleon de Causans lad[ite] somme, il fut ordonné qu'il y seroit contrait conformément à lad[ite] sentence du 10 juin dernier, à l'effet de quoi, il fut ordonné par provision qu'il seroit passé outre cela a la vente des meubles et effets sur lui saisis par proces verbal du 12 juin dernier à la représentation desquels le gardien seroit contrait même par corps, quoi faisant dechargé, pour les deniers provenants de la vente être remis aud[it] de Mauleon de Causans jusqu'à concurrence de 10 000 #, les frais de vente et ceux faits pour y parvenir préalablement pris, et led[it] Digard et led[it] Alleaume chacun à leur égard fussent condamnés aux dépens ; au bas de laquelle reqête est l'ordonnance de la Cour qui a reservé à faire droit sur lad[ite] demande en jugeant ;
Celle dud[it] Digard par requête du 27 juin dernier, employée pour défense aux susd[ites] oppos[siti]on et demande dud[it] de Mauleon de Causans et tendante à ce qu'il y fut débouté et condamné aux dépens ; au bas de laquelle requête est l'ordonnance de la Cour qui a réservé à faire droit sur lad[ite] demande en jugeant ;
et celle dud[it] Alleaume par requête du 28 juin 1755 tendante à ce qu'il fut reçu partie intervenante en tant que besoins étoit ou seroit vis-à-vis lesd[its] Digard et Esteve, acte lui fut donné des offres qu'il faisoit de remettre des a présent aud[it] de Mauleon de Causans ou a qui par la Cour seroit ordonné la somme de 10 000 # dont il s'agissoit, quoi faisant il en demeureroit bien et valablement quitte et déchargé envers et contre tous, mainlevée provisoire lui fut faite de la saisie d'execution faite de ses meubles, led[it] jour 12 juin 1755 et en cas de contestations les contestants fussent condamnés aux depens, que led[it] Alleaume seroit en tout [cas] autorisé à retenir sur lesd[ites] 10 000 # déposées, sauf aud[it] de Mauleon de Causans à repéter le montant desd[its] depens contre ceux des parties, à la charge desquelles la Cour jugeroit qu'ils devoient rester ; au bas de laquelle requête est l'ordonnance de la Cour qui a donné acte de l'employ y porté et reservé a faire droit en jugeant ;
requête et demande dud[it] de Mauleans de Causans du 18 juin 1755, à ce qu'entre autres choses, il lui fut permis de faire assigner en la Cour lesd[its] Esteve et Frisé, pour par provision voir déclarer [...] l'arrêt qui interviendroit en lad[ite] instance, comme aussi pour lui voir faire mainlevée de toutes les oppo[siti]ons nouvellement faites et à faire de la part des[its] Esteve ou Frisé sur ledit de Mauleon de Causans ez mains dud[it] Alleaume, lequel seroit tenu de faite délivrance aud[it de Mauleon de Causans des 10 000 # dont il s'agit, quoi faisant déchargé, et en outre de voir condamner aux depens ; au bas de laquelle req[uê]te est l'ordonnance de la Cour portant soient parties appellées ;
deux exploits des 18 et 19 juin 1755 d'assignation données à la requête dud[it] de Mauleon de Causans, aud[it] Esteve et aud[it] Frisé à comparoir en la Cour pour répondre et procéder sur et aux fins de la susd[ite] demande provisoire, et en [outre] comme de raison afin de depens ;
arret du 21 juin 1755, d'appointé à mettre et joint ez mains dud[it] conseiller productions respectives des parties en exécution dud[it] arret ;
Celle dudit de Mauleon de Causans, par inventaire signiffié le 1er juillet 1755 ;
Celle dudit Esteve par requête du 3 du présent mois de juillet, tendante à ce qu'il lui fut donné acte de ce qu'il s'en rapportoit à la Cour d'ordonner l'exécution provisoire de la sentence ou donnant par led[it] de Mauleon de Causans bonne et suffisante caution, reçu avec led[it] Esteve en la maniere accoutumée pour la conservation des droits des parties sur l'appel ; au bas de laquelle requête est l'oronn[an]ce de la Cour qui a réservé à faire droit sur la demande en jugeant ;
Et celle dud[it] Frisé par requête du 10 juillet présent mois, tendante à ce qu'acte luy soit donné de ce que sur la demande provisoire contre lui formée à la requête dud[it] de Mauleon de Causans, par requête et exploit des 18 et 19 juin derniers, il s'en rapportoit à la prudence de la Cour d'ordonner ce qu'elle jugeroit à propos, led[it] Frisé fut en tant que de besoin étoit ou seroit, reçu partie intervenante en lad[ite] instance d'entre led[it] de Mauleon de Causans d'une part, et led[it] Digard, led[it] Esteve et led[it] Alleaume notaire d'autre part, acte lui fut donné de ce que pour moyens d'intervention, il employoit le contenu de lad[ite] requête et de ce qu'il sommoit et denonçoit auxd[its] Digard, Esteve et Alleaume la demande provisoire contre lui formée par led[it] de Mauleon de Causans, en conséquence ceux d'entre eux qui succomberoient fussent condamnés en tous les dépens envers led[it] Frisé, tant en demandant, défendant, que [...] et dénonciations ; au bas de laquelle requete est l'ordonnance de la Cour qui a réservé à faire droit sur lad[ite] demande en jugeant ;
Oui le rapport dud[it] conseiller ;
Tout considéré ;
La Cour
reçoit lesd[its] Alleaume et Frisé parties intervenantes ;
reçoit led[it] Mauleon de Causans opposant à l'exécution de l'arret du douze juin dernier faisant droit sur l'oppo[siti]on a leve[r] les défenses y portées ;
en conseq[uen]ce ordonne que Aleaume notaire seroit tenu de remettre aud[it] de Mauleon de Causans les dix mille livres dont il s'agit, nonobstant toutes oppo[sition]s faites ou a faire par lesd[its] Digard, Esteve et Frize et autres, dont ladite Cour lui fait par provision mainlevée, à ce faite led[i] Aleaume contraint, quoi faisant il en sera et demeurera valablement quitte et déchargé, à la déduction néanmoins de ses frais de saisie et arrets et depens, et en payant lui fait mainlevée de la saisie exécution de ses meubles, tous autres dépens compensés (AN, X1a 4201, ff. 484v-487v). Parallèlement, le 15 mars 1755 :
J'ai lu une lettre de M. le chevalier de Causans qui demande que la compagnie écoute mercredi prochain la déclaration de ses sentiments sur la quadrature du cercle : sur quoi j'ai êté chargé de lui répondre que l'Académie n'est pas dans l'usage de décider aucune affaire lorsque le public en est saisi par l'impression ; et que par consequent elle ne peut prendre connoissance de ses demonstrations (PV 1755, p. 207). Le 18 mars, le chevalier de Causans écrit à Grandjean de Fouchy :
Monsieur,
Ce n'est point l'imprimé que j'ay donné au public que je desire communiquer a l'Academie, c'est un manuscrit dont person[n]e a connoissance qui renferme une demonstration evidente de la quadrature du cercle qui consiste a connoitre exactement le surface du cercle et a decrire une quarré necessairement égal a une cercle, le tout geometriquement. Ainsi je vous prie, Monsieur, de demander le jour qu'il [plaira] a l'Académie de me donner, après les vaquances de Paques. Excusés la peine que je vous occasion[n]e et soyés je vous conjure bien persuadé des sentimens parfaites avec lesquels j'ay l'honneur d'être, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. Au Mont Valerien, ce 18 mars 1755 (AAS, DS, 19 mars 1755). Le 19 mars :
J'ai lu une réponse de M. le chevalier de Causans dans laquelle il marque que ce n'est point son imprimé qu'il veut communiquer à la compagnie ; mais un manuscrit : il demande pour cela un jour après Pâques : je dois lui marquer que l'Académie l'écoutera volontiers, et que je lui indiquerai ce jour après la quasimodo (PV 1755, p. 211). Le 5 avril, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] :
Au Mont Valerien ce 5 avril 1755
Monsieur
Avant de me presenter a l'Academie, je serois bien aise de sçavoir son sentiment sur les deux méthodes faciles et generales que j'aurois à proposer, l'une pour la quadrature geometrique du cercle, l'autre pour les racines quarrées des nombres […], depuis deux jusqu'à l'infini. Si l'Academie juge que ces deux objets puissent contribuer a la perfection des sciences, des arts et des mechaniques, j'y satisferai avec empressement, mais si l'Academie veut mettre la precision au rang des approximations, je me tiendrai dans le silence. Votre réponse, Monsieur, reglera la dessus ma conduite. Je vous prie de bien m'en donner une […].
J'ay l'honneur d'etre toujours tres parfaitement, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans (AAS, DS, 12 avril 1755). Le 12 avril :
J'ai lu une lettre de Mr le chevalier de Causans par laquelle il demande si l'Académie pense que la quadrature du cercle, et la maniere de trouver la racine quarrée de tout nombre, seroient capables de perfectionner les sciences, les arts et les mécaniques : je dois lui repondre de la part de la compagnie qu'elle lui a déja fait sçavoir qu'il êtoit impossible qu'un nombre entier qui n'a pas un autre nombre entier pour racine quarrée, eut un nombre fractionnaire pour sa racine ; et que l'Académie sçait tout ce qu'on peut sçavoir sur l'extraction des racines des nombres ; qu'enfin la quadrature du cercle, n'est nullement nécessaire aux arts, parce que les approximations qu'on en a, sont plus que suffisantes à la mécanique (PV 1755, p. 261). Le 14 mai :
M. le chevalier de Causans est entré, et a lu un écrit sur la quadrature du cercle (PV 1755, p. 332). Un manuscrit de (Causans 55a) est conservé dans le dossier de séance (AAS, DS, 14 mai 1755). Le 16 mai :
M. le chev[ali]er de Causans ayant lu mercredi dernier 14 may à l'Académie un memoire manuscrit de sa composition sur la quadrature du cercle, et l'Academie ayant fait aujourd'hui vendredi 16 du même mois une seconde lecture de même ecrit, la compagnie y a remarqué plusieurs propositions manifestement fausses, d'autres inintelligibles, et un abus très fréquent des termes : elle a jugé que le rapport de 12 ½ à 16 donné par l'auteur pour le rapport exact du cercle au quarré circonscrit, non seulement n'est pas exact, mais qu'il est beaucoup moins approchant qu'un grand nombre d'autres rapport connus qui ne sont eux mêmes que des approximations ; et enfin que M. le chev[ali]er de Causans n'a point résolu le probleme de la quadrature du cercle.
Il a été décidé que je ne délivrerois d'expedition de ce jugement qu'à M. le chev[ali]er de Causans sans l'ordre de l'Academie (PV 1755, p. 335 ; Causans 57). Le 28 mai :
Mr Bouguer directeur a demandé de la part de M. le cheval[ie]r de Causans que la compagnie nommât des commissaires pour examiner de nouveau son mémoire, sur quoi ayant été aux voix, elle a decidé que l'affaire avoit suffisamment examinée, qu'elle n'avoit rien à changer à son jugement, et qu'elle ne nommeroit point de commissaires (PV 1755, p. 336). Le 31 mai, le chevalier de Causans écrit à [Malesherbes] :
Monsieur,
Pour n'avoir rien a me reprocher, j'ay prié M. Bouguer de proposer a l'Academie de me nom[m]er des juges selon l'usage et que j'en passerois ensuite volontiers ensuite a leurs decision ou a deliberé de ne rien changer au jugement precipité qui a eté rendu, [et] qui m'oblige, Monsieur, de faire imprimer le mémoire que j'ay l'honneur de vous adresser [(Causans 55a)]. Je vous serai tres obligé, Monsieur, de l'agréer et de me le renvoyer, et j'espere que le public me rendra justice, etant bien sur d'avoir raison, ce qui ne […] a l'avantage de sa decision precipitée. Je me flat[t]e que vous etes persuadé du respect avec lequel j'ay l'honneur d'etre, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans.
A Paris ce 31 may 1755 (BnF, fr. 22141, 39). Vers le 1er juin, [Malesherbes] écrit à d'Argenson :
À M. d'Argenson
Monsieur
J'ay l'honneur de vous envoyer un memoire [(Causans 55a)] que M. le ch[evali]er de Causans veut faire imrpimer. Ce n'est pas tout a fait celuy qu'il a dej donné au public, c'est celuy qu'il a lu a l'Academie, et il y a un mot sur le jugement de l'Academie [dont il] est tres mecontent comme vous pouvés croire. Je ne vous dissimuleray pas qu'il scait que son manuscrit est entre vos mains, je lui ai dit qu'il interessoit trop l'Academie des sciences pour que je propose a M. le chancelier de rien statuer, sans m'etre assurer de votre consentement. Je crains que vous avoir exposé par la aux importunités de l'auteur, mais comme vous scavés qu'il est pressant, je n'ay pas pu eviter de luy dire la veritable raison qui m'empechoit de lui donner une reponse [desirée] [Suit un passage rayé où la princesse de Conti est citée] (BnF, fr. 22141, 40). Vers le 1er juin, [Malesherbes] écrit au chevalier de Causans :
À M[onsieu]r le ch[evali]er de Causans.
J'ay envoyé, Monsieur, a M. d'Argenson le memoire que vous m'avés communiqué. Comme ce memoire concerne non seulement la solution du probleme de la quadrature du cercle, mais la forme du jugement rendu par l'Academie, j'ay voulu avant de prendre les ordres du chancelier consulter le ministre qui a les academies dans son departement.
J'ay l'honneur d'estre avec un attachement inviolable, Monsieur, votre [blanc] (BnF, fr. 22141, 40). Le 3 juin, le chevalier de Causans à [Malesherbes] :
Monsieur,
Le jugement que l'Academie a rendu sur mon memoire doit etre si exact et si juste qu'il ne peut […] qu'a gloire, ainsi Monsieur, c'est pour exposer mon tort au public que je desire de faire imprimer la demonstration dont il s'agit et comme le […] peut a ce qu'on dit […] que par ecrit, il doit etre […] de m'en charger. Je me flatte, Monsieur, connoissant vos dignes sentiments, que vous aurés la bonté d'en faciliter le moyen. Vous n'avez besoin de [...]. Je vous supplie de ne pas me le refuser […] J'espere que vous y aurés égard ayant l'honneur d'estre le plus respectueusement [...], Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans.
A Paris ce 3 juin 1755 (BnF, fr. 22141, 41). Vers le 3 juin :
Le ch[evali]er de Causans est venu pour avoir l'honneur de prier Monsieur de Malesherbes d'avoir la bonté de lui dire definitivement s'il accorde ou refuse sa permission. Il se flat[t]e de sa reponse, parce que son honneur y est interessé (BnF, fr. 22141, 43). Vers le 3 juin, [Malesherbes] écrit au chevalier de Causans :
J'ay deja eu l'honneur de vous mander, Monsieur, que votre manuscrit [(Causans 55a)] est entre les mains de M. d'Argenson. Ce memoire regarde un jugement de l'Academie dont il est le ministre. D'ailleurs j'entends dire que dans le cours de votre dispute, il est intervenu des ordres du Roy qui ont passé par luy. Toutes ces raisons ont du m'engager à ne prendre aucun parti sans l'avoir prevenu. Je n'ay point encore sa reponse. Dès que je l'auray, je ne manqueray pas de demander a M. le chancelier une decision et de vous en faire part.
Je vous prie de ne point douter de l'attachement et de la consideration avec laquelle j'ay l'honneur d'etre, Monsieur [blanc] (BnF, fr. 22141, 44). Le 7 juin à l'Académie :
J'ai lu une lettre de M. le chevalier de Causans par laquelle il prie l'Académie de ne point s'opposer à ce qu'il fasse imprimer le Memoire qu'il y a lu le 14 mai dernier, et le jugement qu'elle en a porté : j'ai été chargé de lui répondre qu'il étoit le maitre de faire là dessus ce qu'il jugeroit à propos (PV 1755, p. 343). Le 7 juin, le comte d'Argenson écrit à Grandjean de Fouchy :
A Versailles, le 7 juin 1755
M[onsieu]r le chevalier de Causans demande, Monsieur, de pouvoir faire imprimer le mémoire cy joint qui et le même que celui qu'il a lû à l'Académie des sciences, mais auquel il a joint des reflexions sur le jugement de cette compagnie. Je vous prie de communiquer le tout à l'Academie et de me marquer ce qu'elle aura pensé de la demande que fait M[onsieu]r de Causans de pouvoir faire imprimer cet ouvrage pour que j'en rendre compte à Sa Majesté. Vous connoissez, Monsieur, les sentimens avec lesquels je vous suis toujours parfaitement devoüé. D'Argenson (AAS, DS, 11 juin 1755). Le [8 juin], [Malesherbes] écrit [au comte d'Argenson] :
Affaire du ch[evali]er de Causans
Monsieur,
J'ay eu l'honneur de vous envoyer le memoire de M. le chevalier de Causans et mes deux motifs en teste, premierement que cette affaire interessoit l'Academie des sciences, secondement qu'un academicien m'avoit assuré que m[a]d[am]e la princesse de Conty avoit prié d'empecher le jugement de l'Academie ne devint public. Comme vous avés eu connoissance des premieres demarches faites par ma[d]am[e] la princesse de Conti pour remedier au derangement de la teste d'un homme qui luy est entierement attaché, j'ay cru que vous […] mieux que personne ce qu'elle desire au sujet de l'impression du memoire. Mais depuis ma lettre ecrite, le meme academicien m'a dit qu'il avoit vu m[a]d[am]e la princesse de Conti et qu'elle l'avoit chargé de me dire qu'elle ne s'opposoit plus à ce que M. le ch[evali]er de Causans imprimat tout ce qu'il voudroit. D'un autre coté il a fait demander hier a l'Academie des sciences son consentement et elle luy a donné. Il me presse avec toute l'ardeur qu'il a marquée dans la suite de cette affaire puisque personne ne s'y oppose et que je ne suis pas chargé de l'empecher de faire des sottises. Je luy ay promis une reponse defintive pour jeudy prochain, ainsi, Monsieur, à moins que d'icy la vous ne me mandiés que vous este d'un avis different, je luy diray jeudy qu'il peut aller en avant pour l'impression, et dans le fond il n'y aura d'inconvenient que pour luy et il n'est plus d'age a avoir un tuteur. Je suis avec respect [blanc] (BnF, fr. 22141, 38). Le 9 juin, d'Argenson écrit à Malesherbes :
Versailles, le 9 juin 1755
J'avois, Monsieur, envoïé a l'Academie des sciences le manuscrit du ch[evali]er de Causans que vous m'aviés fait l'honneur de m'adresser pour scavoir s'il n'y avoit point d'inconvenient à le laisser imprimer ; mais d'après ce que vous me marqués qu'elle n'y en trouve point, je vous assure que j'en trouve point non plus, et une extravagance de plus de la part de M. le ch[evali]er de Causans n'ap[p]rendra rien de nouveau au public. Je suis avec un sincere attachement, Monsieur; vôtre très humble et très obeissant serviteur d'Argenson. [A Monsieur] de Malesherbes (BnF, fr. 22141, 42). Le 11 juin à l'Académie :
J'ai lu une lettre de M. le comte d'Argenson qui demande à l'Académie, si l'on peut permettre à Mons[ieu]r le cheval[ie]r de Causans de publier son ouvrage, et le jugement qu'elle en a porté : j'ai été chargé de lui repondre qu'elle ne s'y oppose point (PV 1755, p. 344). Luynes, du 25 juin 1755 :
J'ai parlé ci-dessus du pari fait par M. le chevalier de Causans pour la quadrature du cercle. Tout le monde aurait désiré que l'on n'eût plus agité cette question, et le Roi avait ordonné que l'argent fût rendu de part et d'autre ; mais M. de Causans n'a pas eu l'esprit satisfait, il a voulu absolument être jugé. Il vient de donner encore un nouvel imprimé portant pour titre : La quadrature du cercle, démontrée à l'Académie royale des sciences, le 14 mai 1755. À ce titre on croirait qu'il va rapporter un jugement rendu en sa faveur. On trouvera ci-après ce jugement, copié mot à mot dans ledit imprimé. M. le chevalier de Causans prétend encore avoir des moyens pour réfuter ce qui a été jugé.
[NDA] Extrait des registres de l'Académie royale des sciences, du 16 mai 1755.
M. le chevalier de Causans ayant lu mercredi dernier, 14 mai 1755, à l'Académie un mémoire manuscrit de sa composition sur la quadrature du cercle, et l'Académie ayant fait aujourd'hui vendredi, 16 du même mois, une seconde lecture de cet écrit, la compagnie y a remarqué plusieurs propositions manifestement fausses, d'autres inintelligibles, et un abus très fréquent des termes ; elle a jugé que le rapport de douze et demi à seize donné par l'auteur pour le rapport exact du cercle au carré circonscrit, non-seulement n'est pas exact, mais qu'il est beaucoup moins approchant qu'un grand nombre d'autres rapports connus qui ne sont eux-mêmes que des approximations ; et qu'enfin M. le chevalier de Causans n'a point résolu le problème de la quadrature du cercle. En foi de quoi j'ai signé le présent certificat. À Paris, ce 16 mai 1755. Signé Grandjean de Fouchy, secrétaire perpétuel de l'Académie royale des sciences (Luynes 60-65, vol. 14, p. 193). Montucla :
On [...] vit [à Paris] en 1753, le chevalier de Causans, officier aux gardes qui, jusqu'alors, ne s'était pas douté de géométrie, trouver tout à coup la quadrature du cercle en faisant couper une pièce circulaire de gazon, et ensuite s'élevant de vérités en vérités, expliquer par sa quadrature le péché originel et la Trinité. Il s'engagea par un écrit public à déposer chez un notaire jusqu'à la concurrence de 300 000 francs pour parier contre ceux qui voudraient se présenter contre lui, et déposa effectivement 10 000 fr. qui seraient dévolus à celui qui lui démontrerait son erreur. Cela n'était sûrement pas difficile ; car il résultait de sa découverte que le quarré circonscrit au cercle lui était égal, et le tout à sa partie. Quelques personnes se mirent sur les rangs pour gagner les 10 000 francs, entre autres une jeune demoiselle [Angélique Le Mire] actionna le chevalier de Causans au Châtelet ; quelques autres répondant à son défi, déposèrent des sommes chez des notaires. Mais le Roi jugea que la fortune d'un homme ne devait pas souffrir d'un pareil travers d'esprit, qui était innocent au fond ; car sur tout autre objet le chevalier de Causans était un homme très estimable. La procédure fut arrêtée et les paris déclarés nuls. Le chevalier de Causans trouva cependant le moyen de faire juger l'Académie, qui s'y refusait par ménagement, et qui fut enfin obligée de s'expliquer (Montucla 99-02, vol. 4, p. 631). Le 10 juillet 1755, le chevalier de Causans réécrit au président de la Royal Society :
Lettre de M. le chevalier de Causans à Milord Macclesfield, président de la Société royale de Londres.
Milord,
de bonnes raisons m'ont empêché de démontrer plus tôt évidemment et géométriquement à l'Académie royale des sciences la quadrature du cercle que j'avais annoncée. Je m'empresse, Milord, à vous en présenter les preuves [(Causans 55a)], et comme la vérité est l'objet de vos lumières, et de celles de la Société royale à laquelle vous présidez, je vous prie, Milord, de la découvrir dans cette occasion. Si je me suis trompé, je ne demande aucune indulgence. je sais que vous excluez des sciences tout respect humain : ainsi, Milord, je me flatte que si je suis dans l'erreur, vous vous servirez de la voie la plus authentique pour m'éclairer, et que si votre jugement m'est favorable, vous le direz formellement, ce qui instruira de votre sentiment, pour ou contre. rendez, je vous supplie, Milord, justice à ma confiance, de même qu'au respect avec lequel j'ai l'honneur d'être, Milord, etc. À Paris, ce 10 juillet 1755 (Causans 55b). Un exemplaire de (Causans 55a) (et un de (Digard 55)) est conservé à la bibliothèque de la Royal Society (Royal Society, catalogue en ligne). Le 23 décembre 1755 :
M[onsieu]r de Montigny a parlé ainsi de la refutation du memoire de M. le chevalier de Causans par un anonyme.
J'ai examiné par ordre de l'Académie un mémoire sans nom d'auteur portant pour Titre, Examen et refutation du systheme de la quadrature du cercle composés par M. le ch[evali]er de Causans etc. suivi d'une nouvelle méthode pour construire facilement une quadrature du cercle géometrique la plus parfaite qu'on ait vû jusqu'à present.
L'auteur après avoir combatu fort au long plusieurs propositions dont l'absurdité est assés sensible pour n'avoir pas besoin de réfutation, établit, sans démonstration, que si l'on ajoute ensemble le coté du quarré et celui du triangle inverse sans un même cercle, leur somme est geometriquement égale à la circonference du cercle. Cette proposition n'est pas vraie […] Ce mémoire n'a rien d'aillleurs qui puisse meriter l'approbation de l'Académie (PV 1755, pp. 859-860 ; AAS, DS, 23 décembre 1755) Le 21 février 1756 :
M[onsieu]r Duhamel, directeur, a lu des propositions faites par Mons[ieu]r le chevalier de Causans, pour l'examen des quelles MM. de Mairan, Nicole et le le cheval[ie]r d'Arcy ont été nommés (PV 1756, p. 97). Un manuscrit de ce bref mémoire est conservé dans le dossier de séance (AAS, DS, 21 février 1756). Le 6 mars 1756, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] :
L'Academie royale des sciences ayant nommé Messieurs Nicole, de Mairan et le chevalier d'Arcis commissaires pour examiner mes propositions sur les racines quarrées des nombres sourds ou incommensurables jusqu'a aujourd'huy, je vous prie, Monsieur, d'agréer le memoire cy-joint, pour vous, et un pour chacun de Messieurs les commissaires. Je me flatte que vous voudrez bien les parapher. J'ay l'honneur d'etre tres parfaitement, Monsieur, votre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. Ce samedy 6 juillet 1756 (AAS, DS, 6 mars 1756). Le 6 mars :
Mons[ieu]r le chevalier de Causans m'a fait remettre des exemplaires de son Mémoire relatif à la derniere question qu'il a présentée à l'Académie pour être rendus à MM. Nicole, de Mairan et le chevalier d'Arcy nommés commissaires à ce sujet (PV 1756, p. 121). Le 24 mars :
MM. de Mairan, Nicole et le chevalier d'Arcy ont fait le rapport suivant d'un ecrit de M. le chevalier de Causans.
Nous commissaire nommés par l'Académie avons examiné un ecrit de M[onsieu]r le cheval[ie]r de Causans tendant à donner la racine quarrée des nombres entiers non quarrés. Il donne les prétenduës racines des six nombres, sçavoir, [maths].
Mais ces racines ne sont nullement éxactes. Il seroit inutile de s'étendre davantage sur ce sujet, il suffit de dire que les racines des nombres entiers non quarrés sont démontrées impossibles à trouver par un nombre infini de géomètres depuis que l'on a traité des nombres(PV 1756, pp. 143-144). Le 28 juin 1757, alors que le chevalier de Causans demande encore des commissaires, Clairaut, directeur de l'Académie, est chargé de lui faire savoir que personne ne se porte candidat (cf. 28 juin 1757 (1)). Le Roi trouve pourtant bon que des commissaires soient nommés (cf. 3 juillet 1757 (1)), ce que Clairaut rapporte le 6 (cf. 6 juillet 1757 (1)). Le 9 juillet 1757 :
Mons[ieu]r le chevalier de Causans a fait remettre à la compagnie son nouvel ecrit sur la quadrature du cercle pour l'examen duquel MM. de l'Isle [Delisle] et de Parcieux [Deparcieux] ont été nommés (PV 1757, p. 463). Clairaut présente une lettre du chevalier de Causans lors de la séance académique du 20 juillet (cf. 20 juillet 1757 (1)). Au cours de cette même séance :
Rapport de l'ecrit sur la quadrature du cercle de M. de Causans [En note] voy[ez] […]
M. le chevalier de Causans ayant obtenu un ordre du Roy pour que l'Academie éxaminât son nouvel ecrit intitulé Démonstration de la quadrature du cercle, nous commissaires [Delisle et Deparcieux] nommés allons rendre compte à la compagnie de l'éxamen que nous en avons fait.
M. le ch[evali]er de Causans commence par dire que le vrai rapport du diametre à la circonference est de 8 a 25 sans indiquer par quelle voye il y est arrivé, et il donne pour démonstration de sa prétenduë découverte l'égalité qu'il trouve entre differents produits qu'il forme par le diamètre et differentes portions du diametre qu'il prend telles qu'il veut, et ou il veut sans qu'il y entre aucune ligne comparée à la circonference. Comme il a pris les parties du diametre qu'il employe absolument à son gré, il n'est pas etonnant qu'il soit parvenu à former des produits égaux qu'il regarde comme la solution du problème, et il conclut par là formule ordinaire ce qu'il falloit demontrer, avec autant de confiance que s'il avoit fait une véritable démonstration. Mais pour faire connoître combien de 8 à 25 s'éloigne du vrai rapport qu'on demande au diametre à la circonference, comparons le aux limites que M. Nicole a données dans les mémoires de 1747, comme la voye la plus courte et la plus commode, et pour cela ramenons le au diamètre [maths]. Ainsi bien loin que le rapport de M[onsieu]r le chevalier de Causans soit le vrai rapport du diametre à la circonference, il n'en est pas même une approximation recevable, car il s'en ecarte beaucoup plus que les rapports les moins éxacts dont ne se contente pour les usages ordinaires.
Tel est le jugement que nous portons sur cet ecrit dans lequel on ne trouve ni construction de problême, ni aucun raisonnement dont on puisse conclure la moindre chose, non seulement pour une quadrature ordinaire, mais pas même pour une approximation ; et nous terminons ce rap[p]ort en disant que M[onsieu]r le chev[ali]er de C[ausans] n'a rien trouvé ni rien démontré dans ce nouvel écrit, non plus que dans celui sur lequel l'Académie a prononcé le 16 mai 1755 (PV 1757, pp. 485-486 ; AAS, DS, 20 juillet 1757). Le chevalier de Causans reproduit et discute ce rapport dans (Causans 57). Le 1er août 1757, Saint-Florentin écrit à Malesherbes :
A Compiegne, le 1er aoust 1757
M. le ch[evali]er de Causans ayant, Monsieur, presenté un memoire au Roy pour demander a Sa M[ajes]té de faire examiner la nouvelle decouverte qu'il croyoit avoir bien certainement faite de la quadrature du cercle, Sa M[ajes]té a crû ne pouvoir lui refuser la derniere satisfaction de lui faire nommer des commissaires qui ont porté un jugement tel qu'on s'i attendoit. Il ne seroit ni convenable ni decent pour l'Accademie d'accorder a M. le ch[evali]er de Causans un permission authentique de faire imprimer son dernier memoire et le jugement qui en a eté porté, et pense aussi comme vous qu'il seroit encore moins convenable d'employer l'autorité du Roy pour l'empescher de faire imprimer son memoire, on peut le laisser donner au public ce qu'il voudra sur cette matiere. Je vous supplie d'etre toujours persuadé de l'attachement très parfait avec lequel j'ay l'honneur d'etre, Monsieur, votre très humble et très obeissant serviteur Florentin. [A] monsieur de Malesherbes (BnF, Ms 22141, 36). Le 10 novembre 1757, le chevalier de Causans écrit à Grandjean de Fouchy :
Monsieur,
L'Académie n'a pas, sans doute, donné assez d'attention au rapport de Messieurs les commissaires qu'elle m'a nommés puisqu'il renferme contradiction, erreur et paradoxe manifestes. J'ai fait, M., une réponse par articles pour le prouver et démontrer la vérité de ma proposition sur la quadrature du cercle, par une progression continue en même raison et jusqu'à l'infini entre des cercles et des quarrés, ce que ne produirait jamais tout autre rapport que celui que je propose du diamètre à la circonférence. L'estime particulière que j'ai pour Messieurs les académiciens et le désir de leur plaire m'obligent, M., de vous ouvrir mon cœur la-dessus. La gloire et la réputation de l'Académie y sont intéressés. Elle m'a condamné sans aucune raison apparente en disant que ma proposition n'est pas même une approximation recevable. Si cela est, je vous prie instamment, Monsieur, d'obtenir qu'on en donne d'office la moindre preuve aussi simple que ma démonstration, et alors je rendrai grâces authentiques a l'Académie en avouant l'erreur, mais si, contre mon attente, elle persistait à me croire bien jugé en opposant seulement une fraction de neuf milliards, neuf cent onze millions, quatre cent quatre-vingt cinq mille, sept cent cinquante-huit parties de dix milliards pour limites d'un cercle de sept de diamètre, j'aurai recours au Roi dont la bonté et la justice accompagnent les actions. J'aurai l'honneur de présenter à Sa Majesté le rapport des commissaires, la réfutation, ma démonstration par un progression géométrique continue jusqu'à l'infini, et le tout imprimé découvrirait que le mauvaise volonté aura prévalu dans la plus respectable Académie sur la plus importante vérité de géométrie, à laquelle on ne doit pas refuser de rendre témoignage, pour ou contre et de façon évidente. J'agirai, M., relativement à votre réponse. J'espère qu'elle sera conforme à l'exacte probité qui conduit l'Académie, qui verra en manuscrit, si elle juge à propos, une progression géométrique selon mon rapport jusqu'à l'infini entre des cercles et des quarrés, et la réfutation très claire des limites dont elle s'est servie pour me condamner. Un quart d'heure de temps suffira pour s'en convaincre sans aucune peine. Ayez la bonté, Monsieur, de m'instruire des sentiments de l'Académie à mon égard, et d'être persuadé que j'ai l'honneur d'être, etc. Signé, le chevalier de Causans (Causans 57, pp. 9-10 ; AAS, DS, 19 novembre 1757). Le 15 novembre, le chevalier de Causans écrit à Grandjean de Fouchy :
Monsieur,
Je vous prie encore de ne laisser pas ignorer a l'Académie des sciences que ma requête au Roi est toute prête, si elle refuse de me convaincre, et le public, par des raisons simples et évidentes. Je désire de tout mon cœur, Monsieur, d'éviter que les moyens pour ma défense paraissent aux yeux du Roi. Je serai forcé de dire des vérités que je voudrais cacher au prix de mon sang puisqu'elles attireront un blâme irréparable contre des juges que j'aime et respecte. Je me flatte, Monsieur, que j'aurai demain au sortir de l'Académie une réponse positive.
J'ai l'honneur d'être etc. Signé, le chevalier de Causans (Causans 57, p. 11 ; AAS, DS, 19 novembre 1757). Le 16 novembre :
J'ay lu une lettre de M. le chevallier de Causans par laquelle il se plaint du jugement que l'Academie a porté de ces mémoires sur la quadrature du cercle, et menace de s'en plaindre au Roy et de faire imprimer une reponse.
J'ay été chargé de lui repondre qu'il étoit le maître de faire tout ce qu'il voudroit, mais que l'Academie n'avoit rien a changer au jugement qu'elle avoit prononcé (PV 1757, p. 622). Le même jour, Grandjean de Fouchy écrit au chevalier de Causans :
Monsieur,
J'ai communiqué, suivant votre intention, à l'Académie les deux lettres que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire. Elle m'a chargé de vous marquer de sa part qu'elle ne peut rien changer à son jugement, et qu'elle avait même déclaré qu'elle ne pouvait plus se mêler de cette affaire. Les démonstrations des approximations dont vous parlez sont depuis longtemps données au public par M. Nicole, et imprimées dans les Mémoires de l'Académie. Au reste, M., vous êtes parfaitement le maître d'agir comme vous le jugerez à propos, et l'Académie se croit fort en sûreté sur cet article. J'ai l'honneur d'être, etc. Signé, de Fouchy. À l'Académie, ce 16 novembre 1757 (Causans 57, p. 11). Le 9 décembre, le chevalier de Causans signe sa requête au Roi (Causans 57, p. 15). Le 17 décembre, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] :
Monsieur,
Ma requete au Roi cy jointe prouvera que j'ay rempli ce que j'avois annoncé. Il y a encore moyen d'eviter un éclat qui ne [sçauroit] etre contre moi, puisque je demande a l'Academie de démontrer simplement l'erreur qu'elle assure plus grande que les rapports les plus eloignés. Cela supposé, il est tres aisé, Monsieur, de le faire voir par figure et par nombre, et pour plus de facilité, je dis, Monsieur, que [maths] L'Academie doit [l]oüer le motif qui me fait agir. Par mes sentimens pour elle, un de mes gens attendra sa reponse que je vous prie de lui donner, et d'etre persuadé que j'ay l'honneur d'etre très parfaitement, Monsieur, cotre tres humble et tres obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans. A Paris, ce 17 [décem]bre 1757 (AAS, DS, 17 novembre 1757). Le 20 décembre :
J'ay lu a l'Academie une lettre de monsieur le chevallier de Causans jointe a une requête imprimée qu'il veut presenter au Roy, pour demander que Sa Majesté ordonne a l'Academie de faire un nouvel examen de son affaire. J'ai été chargé de lui repondre qu'il etoit le maitre de faire sur cela ce qu'il jugeroit à propos ; mais que l'Academie n'avoit rien a changer ny a ajouter a ce qu'elle avoit decidé sur cette affaire (PV 1757, p. 642). Le 31 décembre, le chevalier de Causans écrit à [Grandjean de Fouchy] :
Monsieur,
Il est tres evident que l'Academie royale des sciences s'est declarée juge et partie dans son prononcé sur ma proposition. Il est aussi manifeste que l'Academie fait tous ses efforts pour éviter un ordre du Roi de donner des explications au certificat du 20 juillet 1757.
Il me semble, Monsieur, que l'Academie deuvoit prevenir mes desirs la dessus, pour etre exempte meme du soupçon de partialité. Je suis assuré, Monsieur, démontrer géométriquement l'erreur du principe, celle des conséquences et des conclusions dont elle s'est servie contre ma proposition, et si la force de la verité ne [l'obligeait] pas de l'avouer, je subirai condamnation sans m'en plaindre. Finissons au commencement de cette année mes differens avec l'Academie. Je ne demande que la verité pour médiateur […]. Je vous prie, Monsieur, de faire valoir a l'Academie les sentiments de mon coeur pour elle. J'espere dans [les huit] jours une reponse […] Je suis toujours le plus parfaitement, Monsieur, votre tres humble et tres obseissant serviteur le ch[evali]er de Causans. A Paris, ce 31 [décem]bre 1757 (AAS, DS, 14 janvier 1758). Le 14 janvier 1758 est imprimé :
Mémoire pour donner le moyen à tout homme qui sait lire de juger avec connaissance du cause de la proposition du chevalier de Causans présentée par ordre du Roi à l'Académie royale des sciences, et de la réponse de l'Académie. Il faut comparer rapport à rapport.
[…]
La quadrature du cercle dépend de connaître le véritable rapport du diamètre à la circonférence d'un cercle quelconque. L'Académie étant dans l'impuissance de combattre par aucun moyen le rapport de huit à vingt-cinq que le chevalier de Causans a présenté au Roi, chacun peut présentement lire, simplement réfléchir et prononcer ensuite très facilement avec vérité. Le chevalier de Causans (Causans 58). Le même jour, le chevalier de Causans adresse son mémoire à Grandjean de Fouchy :
Monsieur,
Les vérités ont de grandes ressources pour se faire connoître, et supérieurement celles de géometrie, le memoire cy joint en est une preuve authentique.
L'Academie peut, Monsieur, se justifier dans le public a mon egard, en avouant de bonne foi qu'elle a donné trop de confiance a une fraction chimérique. Il est toujours glorieux de retracter une erreur, et très honteux de la soutenir, et si l'Academie charge de repondre ceux qui voudroient s'y opposer, vous le verrés bientôt.
Monsieur, sous la loi de la verité, qui exige de droit que l'Academie lui rende justice, l'ayant dégradée par son jugement, et je ne pourrois me dispenser en cas de refus de supplier encore le Roy, seul juge souverain de ses sujets, d'interposer son autorité. L'Academie n'est point un tribunal sans appel, les parlements même ne le sont pas.
Voicy, Monsieur, qui est sans réplique. Si l'Academie a de bonnes raisons à m'opposer, il est du devoir de la bienseance et de l'humanité de les dire, puisque je les desire comme une grace. Si elle n'en a point, ce seroit favoriser l'erreur et le mensonge pour abuser de la confiance publique de garder le silence, après avoir condamné injustement les axiomes et les principes que j'ai employés dans la demonstration de ma proposition. Sa réponse positive, dont je me flatte, déterminera ma conduitte. Je rends de bon coeur le bien pour le mal. A l'Academie je ne puis mieux faire, mais mon honneur est dans cette occasion inséparable de la verité a laquelle l'Academie doit une réparation, s'agissant de la plus importante et la plus avantageuse découverte et qui interesse les nations. J'espere que je ne serai point obligé de rendre cette lettre et mon mémoire publics, et que l'Academie se rapellera avec satisfaction et imitera le beau trait d'histoire. J'en appelle a Philippe.
J'ai l'honneur d'etre très parfaitement, Monsieur, votre très humble et très obeissant serviteur le ch[evali]er de Causans.
A Paris, ce 14 janvier 1758 (AAS, DS, 14 janvier 1758). Le même jour :
J'ai lu à l'Académie une lettre et un memoire imprimé de M. le ch[evali]er de Causans, après laquelle lecture, j'ai été chargé de lui répondre que l'Académie s'en tenait à son jugement, et persistoit a ne vouloir plus se meler de cette discussion géométrique, et qu'elle l'avoir même deffendu de lui répondre autrement que pour l'assurer des sentimens avec lesquels j'etois etc (PV 1758, p. 57). Et Grandjean de Fouchy répond au chevalier de Causans :
M., J'ay communiqué suivant votre intention à l'Acad[émie] la lettre que vus m'avez fait l'honneur de l'écrire, et le mémoire imp[imé] qui y etoit joint. Elle s'en tient toujours à son premier jugement et persiste à ne vouloitr plus entrer dans cette discussion géométrique. Elle m'a même defendu de vous répondre autrement que pour vous assurer que personne ne peut estre plsu parfaitement que moy [etc.] (AAS, DS, 14 janvier 1758). En janvier 1759, le chevalier de Causans adresse de manière anonyme un mémoire sur la quadrisection de l'angle, que Clairaut est chargé d'examiner (cf. 20 janvier 1759 (2)). Après rapport négatif du 31 janvier 1759, le chevalier de Causans fait paraître (Causans 59a) (cf. 27 octobre 1759 (1)). Il écrit à l'Académie le 14 novembre (cf. 14 novembre 1759 (2)). Le 17 novembre :
J'ai lû à l'Academie une lettre et un memoire imprimé de M[onsieu]r le chevalier de Causans sur sa quadrature et sa trisection de l'angle. J'ai été chargé de lui répondre que l'Académie ne jugeoit point des ouvrages imprimés, et que d'ailleurs elle n'avoit rien a changer au jugement qu'elle avoit porté de ces ouvrages (PV 1759, f. 769r). Devant cette réaction, le chevalier de Causans écrit au Roi (Causans 59b), le 9 décembre 1759 (cf. 9 décembre 1759 (1)). Il se plaint de Clairaut le 22 décembre (cf. 22 décembre 1759 (3)). Le chevalier de Causans présente ensuite l'affaire à la « face de l'Univers » et somme Clairaut et l'Académie de prouver sous un mois qu'ils connaissent l'aire d'un triangle isocèle quelconque (Causans 60a) (cf. 7 mai 1760 (2)). Le 17 mai 1760, le chevalier de Causans écrit à l'Académie des sciences :
Messieurs,
Je m'interesse comme vous mêmes a votre réputation et a votre gloire. Nous devons, Messieurs, respecter le public et contribuer au bien autant qu'il est en notre pouvoir sans déroger aux usages ni a la prudence qu'i regle votre conduite. Vous pouvés facilement, Messieurs, par une simple invitation anonyme d'une de la compagnie, finir pour toujours nos disputes. Vous vous chargeriés autrement a pure perte de tout le blâme. Ainsi, je vous prie, Messieurs, d'avoir cette complaisance en faveur de la verité pour ou contre. Si je me trompe, j'en porterai seul toute la peine, si je réüssi à démontrer le miracle de la géometrie fort au dessus de la geometrie, vous aurés rendu, Messieurs, le plus grand service aux sciences conformément a vs intentions. J'espere ensuite, Messieurs, quelque part dans votre amitié dont je connois tout le prix.
J'ai l'honneur d'être avec respect, Messieurs, votre très humble et très obligeant serviteur le chev[alier] de Causans. Parsi, ce 17 mai 1760 (AAS, DS, mai 1760). Au terme d'un « coupable silence » de Clairaut et l'Académie, le chevalier de Causans écrit une ultime fois au public (cf. 8 juin 1760 (1)). Le chevalier de Causans est évoqué par Marie Jacob (Jacob 06, pp. 108-114). Notice résumée