1056. Ms. La quadrature du cercle par M. Liger. Presenté par [pas de nom]. Distribué à MM[essieu]rs Clairault. P[ermission] s[imple] a [pas de nom] pour trois ans. 26 juillet 1753 (BnF, f. fr. 21998, f. 82r).
Clairaut signe l'approbation de (Liger 54) le 6 juillet (cf. 6 juillet 1753 (1)). L'enregistrement de l'ouvrage fait suite à la publication de (Causans 53a), dont le Mercure de France rend compte dans son numéro de juin (cf. 12 mai 1753 (2)). Il contient un Extrait de la solution de la quadrature du cercle, daté du 10 septembre 1752, et un échange de lettres entre l'auteur et le chevalier de Causans. Le 4 septembre 1753, Liger écrit au chevalier de Causans : Monsieur, Il court un bruit dans le public que vous êtes sûr d'avoir fait la découverte de la quadrature du cercle [(Causans 53a)]. Je ne doute point de vos lumières, mais je me crois indispensablement obligé d'avoir l'honneur de vous dire que si vous vous êtes conformé aux principes euclidiens, vous n'êtes point parvenu précisément à la quadrature, parce qu'elle n'est point du ressort des démonstrations algébriques, et si vous l'avez trouvées numériquement, je vous devance de beaucoup d'années dans cette découverte. Gueffier, libraire, parvis Notre-Dame à Paris, peut vous en donner des preuves. Je serai toujours prêt à reconnaître votre supériorité sur moi, dans cette cause célèbre, si vous en avez effectivement, et j'ai tout lieu d'espérer de la noblesse de vos sentiments, la justice que j'en dois attendre. J'ai l'honneur d'être avec votre respect, Monsieur, votre, etc (Liger 54, pp. 18-19 ; Mercure de France, novembre 1753, pp. 141-142). Le 4 novembre 1753, le chevalier de Causans écrit à Liger : Le Mercure de novembre m'a appris, Monsieur, que je vous devais une réponse, sans quoi je n'aurais pas tant différé à vous remercier de vos remarques sur la quadrature du cercle que je crois avoir trouvée. J'avais lu, Monsieur, votre ouvrage là-dessus, et j'ai admiré la savante application et votre patience pour ne trouver que 1 de différence sur 9801. C'en est encore assez pour vous priver de l'usage, puisqu'il faut une parfaite égalité comme 2 et 2. Je n'ai suivi ni les principes d'Euclide, ni les numériques, j'en propose d'inconnus, et de vrais sur la géométrie, et vous verrez, Monsieur, dans mes Dernières réflexions sur la quadrature du cercle [(Causans 43c)] qu'il ne tient plus à moi d'être jugé avec connaissance de cause, et je serais bien flatté si je puis avoir dans la suite votre approbation que vous ne me donnerez qu'avec tous les savants de l'Europe. J'ai l'honneur d'être, etc (Liger 54, pp. 20-21 ; Mercure de France, décembre 1753, vol. 1, pp. 157-158). Liger répond à Causans dans une lettre non datée : Monsieur, Il paraît par la lettre dont vous m'avez honoré par la voie du Mercure de décembre 1753, que vous n'avez lu que ma première partie de géométrie, car si vous aviez lu la seconde, j'estime qu'elle vous aurait convaincu que ma quadrature est sans reste. […] Votre lettre me fait comprendre que vous n'êtes point prévenu en faveur d'aucuns principes, que vous ne cédez qu'à la pure raison, et que par conséquent vous êtes persuadé comme moi que la vraie géométrie est précisément celle qui est expérimentale, de la même manière que la physique l'est en son genre (Liger 54, pp. 22-25). Montucla : Il y a une troisième espèce de quadrateurs, plus singuliers encore, mais moins incommodes, en ce que leur manière de penser a bientôt terminé l'examen de leur découverte. Ce sont ces esprits d'une trempe, ce me semble, inconnue aux siècles passés, qui savent se jouer des principes les plus évidens de la géométrie, qui ont le courage de heurter de front les axiomes du sens commun. M. Liger, je ne le nomme que parce qu'il s'est nommé si souvent dans les Mercures et ailleurs, M. Liger vous dira, avec une grande assurance, que le tout n'est pas plus grand que la partie ; que la racine quarrée de 288 est exactement la même que celle de 289 ; que 50 a la même racine que 49, etc. Il fera plus, il entreprendra de vous le prouver par un mécanisme à peine capable d'en imposer à l'artisan grossier qui le pratique. Il établit enfin une géométrie toute nouvelle sur les débris de l'ancienne. Prétendre désabuser des esprits de cette espèce, c'est vouloir perdre son temps : quand on est venu à un pareil excès de rêverie, on a perdu le droit d'être frappé de l'évidence (Montucla 54, p. xviii-xix).
Abréviation
BnF : Bibliothèque nationale de France, Paris.
Références
Causans (Joseph-Louis Vincens de Mauléon, chevalier de), Prospectus apologétique pour la quadrature du cercle, Paris, 1753 [12 mai 1753 (1)] [12 mai 1753 (2)] [Plus].
Liger (Pierre), Elemens des mathématiques, par Pierre Liger, commis au bureau de la Guerre, troisième partie divisée en deux sections. La première contient la démonstration de la quadrature du cercle, Paris, 1754 [6 juillet 1753 (1)].
Courcelle (Olivier), « 11 juin 1753 (1) : À la censure », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n11juin1753po1pf.html [Notice publiée le 15 décembre 2010].
Monsieur,
Il court un bruit dans le public que vous êtes sûr d'avoir fait la découverte de la quadrature du cercle [(Causans 53a)]. Je ne doute point de vos lumières, mais je me crois indispensablement obligé d'avoir l'honneur de vous dire que si vous vous êtes conformé aux principes euclidiens, vous n'êtes point parvenu précisément à la quadrature, parce qu'elle n'est point du ressort des démonstrations algébriques, et si vous l'avez trouvées numériquement, je vous devance de beaucoup d'années dans cette découverte. Gueffier, libraire, parvis Notre-Dame à Paris, peut vous en donner des preuves. Je serai toujours prêt à reconnaître votre supériorité sur moi, dans cette cause célèbre, si vous en avez effectivement, et j'ai tout lieu d'espérer de la noblesse de vos sentiments, la justice que j'en dois attendre. J'ai l'honneur d'être avec votre respect, Monsieur, votre, etc (Liger 54, pp. 18-19 ; Mercure de France, novembre 1753, pp. 141-142). Le 4 novembre 1753, le chevalier de Causans écrit à Liger :
Le Mercure de novembre m'a appris, Monsieur, que je vous devais une réponse, sans quoi je n'aurais pas tant différé à vous remercier de vos remarques sur la quadrature du cercle que je crois avoir trouvée. J'avais lu, Monsieur, votre ouvrage là-dessus, et j'ai admiré la savante application et votre patience pour ne trouver que 1 de différence sur 9801. C'en est encore assez pour vous priver de l'usage, puisqu'il faut une parfaite égalité comme 2 et 2. Je n'ai suivi ni les principes d'Euclide, ni les numériques, j'en propose d'inconnus, et de vrais sur la géométrie, et vous verrez, Monsieur, dans mes Dernières réflexions sur la quadrature du cercle [(Causans 43c)] qu'il ne tient plus à moi d'être jugé avec connaissance de cause, et je serais bien flatté si je puis avoir dans la suite votre approbation que vous ne me donnerez qu'avec tous les savants de l'Europe. J'ai l'honneur d'être, etc (Liger 54, pp. 20-21 ; Mercure de France, décembre 1753, vol. 1, pp. 157-158). Liger répond à Causans dans une lettre non datée :
Monsieur,
Il paraît par la lettre dont vous m'avez honoré par la voie du Mercure de décembre 1753, que vous n'avez lu que ma première partie de géométrie, car si vous aviez lu la seconde, j'estime qu'elle vous aurait convaincu que ma quadrature est sans reste. […] Votre lettre me fait comprendre que vous n'êtes point prévenu en faveur d'aucuns principes, que vous ne cédez qu'à la pure raison, et que par conséquent vous êtes persuadé comme moi que la vraie géométrie est précisément celle qui est expérimentale, de la même manière que la physique l'est en son genre (Liger 54, pp. 22-25). Montucla :
Il y a une troisième espèce de quadrateurs, plus singuliers encore, mais moins incommodes, en ce que leur manière de penser a bientôt terminé l'examen de leur découverte. Ce sont ces esprits d'une trempe, ce me semble, inconnue aux siècles passés, qui savent se jouer des principes les plus évidens de la géométrie, qui ont le courage de heurter de front les axiomes du sens commun. M. Liger, je ne le nomme que parce qu'il s'est nommé si souvent dans les Mercures et ailleurs, M. Liger vous dira, avec une grande assurance, que le tout n'est pas plus grand que la partie ; que la racine quarrée de 288 est exactement la même que celle de 289 ; que 50 a la même racine que 49, etc. Il fera plus, il entreprendra de vous le prouver par un mécanisme à peine capable d'en imposer à l'artisan grossier qui le pratique. Il établit enfin une géométrie toute nouvelle sur les débris de l'ancienne. Prétendre désabuser des esprits de cette espèce, c'est vouloir perdre son temps : quand on est venu à un pareil excès de rêverie, on a perdu le droit d'être frappé de l'évidence (Montucla 54, p. xviii-xix).