Alexis Clairaut (1713-1765)

Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765)


8 février 1736 (2) : Clairaut rapporteur :
M[essieu]rs Clairaut et Fontaine ont parlé ainsi sur la quadrature du cercle de M[onsieu]r Basselin,

Nous avons lû par ordre de l'Academie un livre intitulé, Traité démonstratif de la quadrature du cercle par M[onsieu]r Basselin. Ce livre est divisé en quatre parties. Dans la 1re on trouve un examen fort détaillé de quatre questions preliminaires. La premiere est s'il y a long tems que l'on est curieux d'avoir la quadrature du cercle. L'auteur pour traiter cette question cite un très grand nombre de livres, il commence par un passage de l'Ecriture Sainte (Livre des Rois p. 22 v. 2 Liv. des Parallipsomenes) où l'on trouve que le vaisseau appellé Mer d'Airain avoit dix coudées de diamétre et trente de circonference. Il a soin ensuite d'assurer que l'on ne doit pas regarder le rapport de 30 à 10 comme désigné positivement par l'Ecriture, parce qu'il ne lui conviendroit pas de descendre dans le détail des fractions.

La 2e question est, s'il étoit bien difficile de trouver la quadrature du cercle. L'auteur pense la dessus comme tout le monde. La 3e, si la quadrature du cercle étoit d'une si grande importance a trouver. On trouve dans l'examen de cette question que l'astronomie, la navigation, et par consequent le commerce, sont fondez sur cette quadrature. L'auteur s'objecte que l'on a pourtant pour la pratique des approximations plus que suffisantes. Mais il se repond que la seule vraye quadrature du cercle est a priser parce qu'il ny a que la verité qui demande une déference absoluë. Une autre utilité que M[onsieu]r Basselin represente dans la resolution de la quadrature du cercle. C'est que personne n'y travaille plus, et que par là, les puissances souveraines seront à portée d'employer plus utilement les sujets excellents que cette grande et trop durable occupation leur avoit en quelque sorte enlevez. La 4e question. s'il a été promis quelque prix pour la quadrature du cercle. M[onsieu]r Basselin trouve cette question fort délicate à traiter, et après avoir examiné tout ce qui peut avoir été promis pour recompenser cette découverte, il ne trouve rien de constaté nulle part, mais il pense que c'est la peur de paroitre avoir donné dans la [chimère] en reconnoissant la possibilité de la quadrature du cercle qui a emp[êché] les puissances de rien promettre, qu'elles n'en seront cependant que plus portées a donner des recompenses lorsqu'elle sera reconnuë. Au [reste] il est persuadé que l'aprobation qu'on pourroit donner à ses découvertes par des gratiffications seroit plus propre à persuader le public que le sentiment de quelques personnes qui sont en état d'entendre son ouvrage.

La 2e et 3e parties sont l'exposition à la démonstration de la quadrature, l'une par des constructions geometriques, l'autre par des nombres. Il seroit difficile de rendre compte du chemin de la solution, par ce qu'elle est fort enveloppée, que l'auteur employe un langage tout particulier qui ne nous est pas assez familier pour en faire part à la compagnie. Mais sans faire voir tout l'enchainement des reflexions de nôtre quadrateur, nous pouvons faire voir dès le commencement de sa solution, un parallogisme qui suffit pour aneantir sa découverte, quoi que ce ne soit pas le seul qui entre dans la composition de sa methode. Le paralogisme dont nous voulons parler se trouve dans une maniere d'extraire la racine quarrée des nombres irrationels. On voit bien que la solution d'un pareil probléme ne peut pas manquer d'être appuyé sur de mauvais principes. On ne sauroit repprocher à nôtre auteur que la finesse de sa methode les rend difficile à appercevoir. Les fractions qu'il ajoute aux nombres entiers renfermés dans une racine cherchée, ont pour numérateur le reste que l'on trouve par la methode ordinaire et pour dénominateur Le double de la racine plus un. Par exemple, suivant M[onsieu]r Basselin 4 1/9 est la racine de 17. Nous n'en dirons pas davantage sur l'ouvrage dont nous avons été chargé parce que cela nous a paru suffisant pour être sur que la quadrature du cercle reste encore à trouver (PV 1736, ff. 20-21r).

Gallica

Ni Clairaut ni Fontaine ne figurent pas non plus parmi les présents (cf. 8 février 1736 (1))

Un second manuscrit de ce rapport se trouve dans le dossier de séance (AAS, DS, février 1736).

Basselin, professeur émérite de l'Université de Paris, a déjà publié son Traité démonstratif de la quadrature du cercle, Paris, 1735, dédié au Roi (Journal des sçavans, janvier 1735, p. 59 ; mai 1735, pp. 278-290 ; Journal de Trévoux, mai 1735, p. 950).

Clairaut sera amené à l'examiner une nouvelle fois (cf. 4 février 1739 (1)).

Robert Basselin est évoqué dans (Jacob 06, pp. 101-105).

Le 30 août 1741 :
M[onsieu]r Basselin presente encore un memoire sur la quadrature du cercle, auquel l'Academie ne juge pas à propos d'avoir égard (PV 1741, p. 444).
Abréviations
  • AAS : Archives de l'Académie des sciences, Paris.
  • DS : Dossiers de séance, Archives de l'Académie des sciences, Paris.
  • PV : Procès-Verbaux, Archives de l'Académie des sciences, Paris.
Référence
Courcelle (Olivier), « 8 février 1736 (2) : Clairaut rapporteur », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n8fevrier1736po2pf.html [Notice publiée le 3 février 2012].