Alexis Clairaut (1713-1765)

Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765)


5 août 1750 (2) : Cramer écrit à Clairaut :
5 août 1750

Il y a un temps infini que je n'ai point de vos nouvelles, mon cher Monsieur, et je ne saurais vous dire combien ce temps m'a paru dur. Croyez-vous que je l'aie pu voir s'écouler sans bouder de temps en temps comme vous. Vous me trouverez plaisant de vous faire une querelle, quand c'est moi qui suis dans le tort. Mais n'avez-vous pas compris la raison de mon silence ? Je me suis fait la loi, pendant que la place d'académicien étranger était vacante de n'écrire à personne, et je n'ai pas même cru devoir faire d'exception pour vous, le plus cher de mes amis [cf. Mars 1750 (1)]. Quand cette affaire a été décidée, je gardais le lit sur lequel j'ai été cloué plus d'un mois, suite d'une chute, ou plutôt d'un faux bond d'un carrosse dont les chevaux avaient pris le mors aux dents. À présent que je puis me rapprocher de mon bureau, agréez que je vous fasse mille et mille remerciements. Je ne doute point que vous soyez un de ceux qui ont le plus contribué à me faire avoir la nomination de l'Académie et je me trouve si sensible à cet honneur qu'il est bien juste de vous en marquer toute ma reconnaissance. Il est vrai que je ne trouve pas de termes pour vous exprimer mes sentiments : mais vous y suppléerez sans peine : il me semble qu'un ami sent aisément ce qui se passe dans le cœur de son ami. Cela posé : je n'ai plus qu'à me taire. Faites-moi la grâce d'offrir à Mlle Ferrand et par son moyen à Mad[ame] la comtesse de Vassi [Vassé], mes très humbles actions de grâces. M. de Champeaux ne m'a pas laissé ignorer l'intérêt que ces dames ont bien voulu prendre à moi,... de la plus vive reconnaissance.

Enfin, après des retards de plusieurs années, mon Analyse des Courbes [(Cramer 50)] sort de la presse ; M. de Mairan vous en remettra un exemplaire. Je tremble, mon cher Monsieur, du jugement que vous en allez porter. Des connaisseurs tels que vous sont bien redoutables pour de pauvres auteurs comme moi. Mais votre amitié me rassure un peu et me fait espérer que vous pencherez vers l'indulgence. Je mets donc mon ouvrage sous votre protection et en même temps que je vous prie de me dire naturellement ce que vous en penserez, je vous conjure de n'être pas si naturel avec le public, et de procurer à ce livre la faveur qu'il recevra des discours avantageux que vous tiendrez.

Voilà dites-vous un trait d'amour propre bien marqué. Oui, et même un trait d'humilité. Mais il n'y en a peut-être pas beaucoup à s'humilier devant vous, qui êtes si grand vis-à-vis de moi. J'ai reçu il n'y a pas longtemps les mémoires de 1745 où est votre Physique Céleste [C. 33], où vous parlez de M. Calendrin [Calandrini] et où vous disputez contre M. Buffon [(Buffon 45a), C. 34, (Buffon 45b), C. 36, (Buffon 45c), C. 37, cf. 20 janvier 1748 (2)]. Je vous dirai en un mot que je suis partout très content de vous. Il ne m'a pas été possible de lire tout cela avec l'attention que demande des problèmes si difficiles parce que j'ai été excédé d'affaires, qui ne souffraient aucun délai. M. Calendrin [Calandrini] a quitté la chaire de philosophie pour une place de conseiller d'état. J'ai pris sa chaire dont la peine est moindre et le revenu meilleur que la chaire de mathématique, et M. Jallabert m'a succédé. Tout cela s'est passé de la manière la plus agréable du monde pour moi, mais cela ne laisse pas de donner quelque embarras. Vous savez les formalités des universités, les discours qu'il faut faire et réciter par cœur en pareilles occasions. Il y a souvent diverses affaires particulières et publiques, et par surcroît de malheur l'accident qui m'a retenu près d'un mois au lit et plus d'un mois sans rien faire. La publication de mon ouvrage me donne encore quelques occupations par les lettres qu'il m'oblige à écrire. Pardonnez donc, mon cher Monsieur, si je vous quitte plus tôt que je n'avais résolu et bien malgré moi. J'espère que vos lettres ne se feront pas longtemps attendre. Si vous ne me dites rien de mon livre dans la première, ce sera pour la seconde ou la troisième. Adieu, mon très cher ami, je n'ai rien de plus précieux que votre amitié (Speziali 55).
Cramer répond à une perdue de Clairaut.

La réponse de Clairaut est perdue.

Cramer réécrit à Clairaut le 14 septembre (cf. 14 septembre 1750 (1)).

Le même jour, Cramer écrit à Buffon (une lettre plus courte que celle à Clairaut) :
Je vous dois, mon cher Monsieur, bien des remerciements : C'est à vous sans doute, que je suis en bonne partie redevable de l'honneur que l'Académie m'a fait de me nommer pour remplir la place vacant d'associé étranger (Weil 61).

Le même jour, il prévient Dortous de Mairan de l'envoi de 22 exemplaires de son livre (cf. 5 août 1750 (3)).

Le 2 août, il en avait envoyé un exemplaire à Maupertuis :
Je prends la liberté de vous présenter un livre qui aurait paru il y a quelques années si divers accidents n'en avaient retardé la publication (Le Sueur 96, p. 417).

Euler a également reçu le sien (cf. 27 novembre 1750 (1)).

Cramer en avait envoyé une petite partie à Clairaut en 1744 (cf. Mai 1744 (1)).

Clairaut recommande le livre à Bossut (cf. 4 février 1751 (1)).

Il songe l'utiliser pour son Application de l'algèbre à la géométrie (cf. [c. janvier 1751]).
Abréviations
Références
Courcelle (Olivier), « 5 août 1750 (2) : Cramer écrit à Clairaut », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n5aout1750po2pf.html [Notice publiée le 15 septembre 2010, mise à jour le 18 janvier 2017].