Copie de la réponse de M. Clairaut, datée de la même matinée [cf. 13 août 1759 (1)]. Je ne serai jamais offensé, Monsieur, que vous ne soyez point de mon avis, ni même que vous veuillez vous être rencontré avec moi sur ce que je croirai m'appartenir en propre. Mais la manière de différer ou de convenir peut m'affecter beaucoup. Tout ce qui m'est revenu sur votre façon de parler de mon travail, et le rapport de ces discours avec les écrits anonymes, m'ont paru prouver que vous étiez animé par des sentiments plus vifs que ceux de la simple recherche du vrai pour laquelle je vous crois d'ailleurs très propre. En conséquence je ne vois pas que vous soyez fondé à trouver de l'aigreur dans la feuille que je viens de faire paraître [C. 49] ; aussi personne de ceux qui l'ont lue devant et après l'impression, n'ont cru qu'on pût en trouver. Au reste, je vous félicite d'avance sur les recherches que vous avez cru devoir faire sur la comète depuis son retour [cf. 14 juin 1759 (1)]. Ce que vous me dites pour le cas que l'on peut traiter directement, et qui avait été annoncé [C'était dans un mémoire où M. de la Lande en rendant compte de quelques recherches astronomiques sur la comète de 1759, parlait de ma théorie de cet astre que je lui avais communiquée NDA, cf. 25 avril 1759 (2)NDM] à la rentrée de Pâques, a de l'analogie avec la méthode que j'ai prise pour ce cas ; méthode dont j'avais parlé depuis fort longtemps à M. de la Lande et à quelques autres personnes. Mais il y a loin de l'esprit de la méthode à l'exécution, surtout lorsqu'il faut entremêler différentes opérations, et se précautionner contre des erreurs de calcul dont l'effet est infiniment dangereux quand on se propose d'annoncer un résultat que l'expérience peut démentir. L'article que vous citez pour vous assurer la propriété d'une méthode qui eût pu servir au calcul de la comète, ne m'était pas connu. Mais comme vous y arrivez à une équation qui est exactement la même que celle que j'avais donnée 7 ans avant vous, il me semble que loin de vous donner quelque droit de partage dans la question présente, elle ne devrait avoir d'autre effet que de vous rappeler que vous m'avez fait quelque injustice dès ce temps-là, en ne me citant pas, comme vous l'auriez dû faire sur cette équation, qui dans quelques cas, comme celui de la comète, peut être fort importante. Je pourrais citer encore d'autres endroits de vos ouvrages, où vous ne me traitez pas comme je crois que l'équité l'aurait voulu, et où vous vous écartez de la vérité, même pour des gens indifférents, qui ne considéreraient que les méthodes, sans égard aux auteurs. J'ai passé toutes ces choses sous silence, parce que mon repos, et la bonne intelligence avec vous m'ont paru infiniment préférables au droit de possession sur quelques artifices de calcul. Cependant je reprendrai toutes ces matières, aussitôt après la publication de mon ouvrage [C. 51], si vous l'attaquez, comme vous me paraissez vous le proposer. Quelque tournure que vous donniez à l'estimation de ma prétendue erreur, je me flatte que j'en démontrerai l'injustice, et personne ne doutera, ce me semble, qu'il n'y en ait au moins dans le choix que vous avez fait d'un tel objet des recherches. Quoiqu'il en soit, l'estime que vous m'avez inspirée à tant d'autres égards est encore trop forte pour ne pas rester, Monsieur, votre etc (C. 55, pp. 362-363) (Irène Passeron, CP, c. mars 1999).
Sans tenir compte de l'article « Lune » de l'Encyclopédie (cf. 15 novembre 1759 (2)), la polémique publique entre les deux hommes reprend à la publication des deux premiers volumes des Opuscules mathématiques de d'Alembert (Alembert 61-80) (cf. 18 novembre 1761 (2)). C'est à l'occasion de cette reprise de la polémique que cette lettre et celle à laquelle elle répond sont publiées (cf. [c. juin] 1762 (1)). D'Alembert écrit encore directement à Clairaut le 28 mai [1764].
Abréviations
C. 49 : Clairaut (Alexis-Claude), Réponse de M. Clairaut à quelques pièces la plupart anonymes dans lesquelles on a attaqué le mémoire sur la comète de 1682 lu à l'assemblée publique de l'Académie des sciences du 14 [sic] novembre 1758, Paris, impr. M. Lambert, 1759, 22 p [11 août 1759 (1)] [29 juillet 1739 (2)] [6 décembre 1750 (1)] [Plus].
C. 51 : Clairaut (Alexis-Claude), Théorie du mouvement des comètes, dans lesquelles on a égard aux altérations que leurs orbites éprouvent par l'action des planètes. Avec l'application de cette théorie à la comète qui a été observée dans les années 1534, 1607, 1682 et 1759, Paris, Michel Lambert, s. d. [1760] [Télécharger] [8 août 1759 (1)] [(1 juillet) 20 juin [1731]] [6 avril 1743 (1)] [Plus].
C. 55 : Clairaut (Alexis-Claude), « Nouvelles réflexions de M. Clairaut sur le sujet de la contestation qui s'est élevé entre M. d'Alembert et lui, à l'occasion de la comète de 1759 », Journal des sçavans, juin 1762, pp. 358-377 [Télécharger] [[c. juin] 1762 (1)] [6 décembre 1750 (1)] [19 novembre 1755 (1)] [Plus].
Courcelle (Olivier), « 13 août 1759 (2) : Clairaut écrit à d'Alembert », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n13aout1759po2pf.html [Notice publiée le 7 août 2011].
