(6 mars) 24 février 1741 (1) : Euler (Saint-Pétersbourg) écrit à Clairaut :
Monsieur, J'ai lu votre dernière lettre [cf. 26 décembre 1740 (1)] avec d'autant plus de plaisir que j'ai vu que vous travaillez encore à perfectionner votre méthode d'intégrer [C. 25], et que vous l'appliquez à des cas bien difficiles, et qui ont pourtant beaucoup d'usage dans l'analyse. Vous m'obligerez donc infiniment, Monsieur, s'il vous plaira, de me communiquer vos découvertes sur les équations différentielles à trois et plusieurs variables, et sur les équations différentielles du second degré où il n'y a pas de différentielle constante [C. 28]. Par la démonstration de votre théorème que j'ai eu l'honneur de vous écrire, j'ai trouvé qu'une formule différentielle à trois variables x, y, z comme celle-ci : [maths]. Pour ce qui regarde les équations différentielles du second degré où il n'y a pas de différentielles constantes, j'ai aussi déjà [depuis] longtemps trouvé, qu'elles ne sont possibles que dans certains cas [maths]. Ayant longtemps travaillé à une solution aisée et générale de tous les problèmes qu'on rapporte ordinairement au fameux problème isopérimétrique, je suis parvenu à la méthode suivante, que j'ai l'honneur de vous communiquer Monsieur. [maths]. Les problèmes de dynamique comme ceux que M. Bernoulli vous a proposés [C. 30], demandent une profonde connaissance des lois des mouvements avant qu'on y puisse appliquer le calcul. Peut-être que vous avez vu une pièce sur la question du cabestan [(Euler 45a)], qui sera jugée cette année par votre Académie [cf. 12 avril 1741 (1)], que j'ai eu l'honneur d'envoyer il y a trois ans. Dans cette pièce j'ai expliqué et démontré les lois du mouvement, qui sont nécessaire pour résoudre ces sortes de problèmes. [maths]. Je conclus de votre lettre que ma pièce sur le flux et le reflux de la mer [(Euler 41)] est déjà imprimée, ce que je n'ai pas reçu jusqu'à présent, car nous recevons ici très lentement, tant les Mémoires, que les autres pièces que votre Académie fait publier, et même je n'ai point du tout vu plusieurs pièces, qui ont remporté le prix, quoique j'en fusse très curieux. C'est la raison que je ne puis pas vous écrire mon sentiment sur les pièces de MM. Bernoulli [(Bernoulli 41)] et MacLaurin [(MacLaurin 41)]. Cependant, par les lettres de M. Bernoulli, j'ai tant appris que je crois qu'il ait tout à fait épuisé cette matière, et de M. MacLaurin, je n'attends que des excellentes méditations. On m'a mandé d'Angleterre, il y a quelques ans, que M. MacLaurin allait publier un très bel ouvrage sur le calcul différentiel [(MacLaurin 42)], et qu'il y en avait déjà alors quelques feuilles imprimées, mais depuis ce temps je n'ai plus reçu d'avis là-dessus : si vous en avez quelque connaissance, Monsieur, je vous prie de me la communiquer. Au reste je vous ai beaucoup d'obligation, que vous avez une si bonne opinion de ma pièce sur le flux et le reflux : c'est peut-être que j'ai trouvé moyen d'employer le calcul dans cette matière et d'en tirer plusieurs conséquences, qu'on ne saurait ni prévoir ni expliquer sans le calcul, quoi qu'on adopte les mêmes principes : car pour la cause physique, je ne me puis pas attribuer le moindre mérite, ayant précisément suivi la théorie de M. Newton sans y ajouter la moindre chose. À ce que M. Bernoulli m'écrivit, il soutient que la force absolue du Soleil est plus grande que Newton croit, moi au contraire j'ai trouvé cette force presque deux fois plus petite que Newton. Outre cela, M. Bernoulli établit une raison entre les forces du Soleil et de la Lune tout à fait différente de celle de M. Newton ; en quoi je suis d'accord avec Newton. Mais comme je ne sais pas les raisons de M. Bernoulli, je ne suis pas en état de juger s'il a raison ou non, du moins je ne me suis pas encore aperçu d'aucune faute dans mes raisonnements. Après avoir reçu la gracieuse vocation de Sa Majesté le roi de Prusse, je l'ai trouvé si favorable à ma constitution que j'ai fait les démarches nécessaires pour obtenir mon congé de notre Académie ; et d'abord que je l'aurai reçu, j'entreprendrai mon voyage pour Berlin. J'espère que ce changement n'empêchera en rien notre commerce et que je serai toujours en état de vous faire voir, avec combien d'estime je suis, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur L. Euler. Pétersbourg ce 24 févr[ier] 1741 (O IVA, 5, pp. 81-87).
Bernoulli (Daniel), « Traité sur le flux et le reflux de la mer », Pièces qui ont remporté le prix de l'Académie royale des sciences en M DCC XL sur le flux et reflux de la mer, Paris, 1741, pp. 53-191, 2 pl [Télécharger] [5 août 1739 (2)] [5 septembre 1739 (2)] [Plus].
Euler (Leonhard), « Inquisitio physica in causam fluxus ac refluxus maris », Pièces qui ont remporté le prix de l'Académie royale des sciences en M DCC. XL. sur le flux et reflux de la mer, Paris, 1741, pp. 235-350, 4 pl [Télécharger] [5 septembre 1739 (2)] [27 avril 1740 (1)] [Plus].
Euler (Leonhard), « Dissertation sur la meilleure construction du cabestan », Pièces qui ont remporté le prix de l'Académie royale des sciences en M. DCC. XLI sur la meilleure construction du cabestan, Paris, 1745, pp. 31-87, 5 pl [Télécharger] [6 septembre 1740 (3)] [Plus].
Euler (Leonhard), « Correspondance de Leonhard Euler avec A. C. Clairaut, J. d'Alembert et J. L. Lagrange », Leonhardi Euleri Opera Omnia, IV A, vol. 5, Ed. Juskevic A. P. et Taton R., Birkäuser, Basel, 1980 [4 mars 1739 (1)] [16 mai 1739 (1)] [Plus].
MacLaurin (Colin), « De causa physica fluxus et refluxus maris », Pièces qui ont remporté le prix de l'Académie royale des sciences en M DCC XL sur le flux et reflux de la mer, Paris, 1741, pp. 193-234, 2pl [Télécharger] [5 septembre 1739 (2)] [27 avril 1740 (1)] [Plus].
Courcelle (Olivier), « (6 mars) 24 février 1741 (1) : Euler (Saint-Pétersbourg) écrit à Clairaut », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/npo6marspf24fevrier1741po1pf.html [Notice publiée le 14 octobre 2009].