23 avril 1743 (1) : Clairaut (Paris) écrit à Euler :
Monsieur, J'ai vu avec un très grand plaisir la solution que vous m'avez communiquée du problème du tube qui emporte un corps avec lui [traité dans (Euler 46a), probablement évoqué dans la lettre perdue du [c. 5 janvier 1743 (1)] NDE] ; mais je ne comprends pas trop comment vous pouvez voir si clairement que mes principes ne sont pas les mêmes que les vôtres, puisque je ne vous avais mandé [le 28 décembre 1742 (1)] que mon résultat. Pour moi, je n'ai pu en aucune manière deviner par votre résultat la manière dont vous vous y êtes pris pour y parvenir. Tout ce que j'ai retenu, c'est que nos résultats sont parfaitement d'accord. Au reste j'ai été charmé de votre théorème des moments rotatoires [§ 36 de (Euler 46a), trouvé et publié simultanément par Daniel Bernoulli NDE], mais ce qui m'a piqué, c'est que si j'avais fait une peu de réflexion sur mes équations, je l'aurais trouvé aussi. Car dans toutes les questions de même nature que j'ai données à l'Académie [C. 30], je suis arrivé à deux équations finales dont l'une est celle qu'on peut trouver par la conservation des forces vives et dont l'autre est la même que celle que donne votre conservation des moments rotatoires. Parmi ces problèmes étaient : 1°. Une baguette étant chargée de tant de poids qu'on voudra et obligée de passer par une point fixe où elle peut glisser et tourner, on demande les courbes que ces corps décrivent lorsqu'on donne une impulsion quelconque à la baguette, 2°. La même baguette supposée chargée de poids mobiles le long de la baguette, 3°. Une partie des poids étant fixe et l'autre mobile. Pour résoudre tous ces problèmes et quelques autres de même genre, le vôtre par exemple, je m'étais servi de deux méthodes différentes. [maths] Mon livre [C. 29] vient enfin de paraître. Je chercherai l'occasion la plus commode de vous l'envoyer et je serai bien charmé d'en savoir votre sentiment, et surtout sur le problème que je vous avais proposé. Il me semble que de la façon dont je vous l'avais énoncé, il n'y restait rien d'arbitraire et que par conséquent vous n'auriez pas manqué ou de trouver la même chose que moi ou de démontrer le contraire. Mais je serais bien fâché de vous avoir détourné pour cette recherche car je sais qu'on répugne à quitter les matières où l'on s'applique pour considérer celles que les autres traitent. Mon père m'a chargé de vous prier de demander à M. le secrétaire de l'Académie de Berlin [Philippe-Joseph de Jariges NDE] des nouvelles d'un mémoire [(Clairaut 43)] qu'il lui fit remettre il y a quelque temps par M. de Maupertuis sur les chaînettes en général. Il voudrait savoir s'il sera imprimé et quand il paraîtra. J'ai lu avec bien du plaisir toutes vos réflexions sur les comètes et je les ai communiquées à M. de Maupertuis qui les a trouvées fort curieuses et m'a chargé de vous faire bien des compliments de sa part. Je n'ai point entendu dire à aucun de nos astronomes qu'ils eussent aperçu quelques changements dans l'obliquité de l'écliptique qu'on pût attribuer aux comètes, et je ne voie pas qu'on puisse m'en assurer par la théorie là dessus, car ces corps peuvent et semblent devoir être extrêmement raréfiés. Nos astronomes semblent reconnaître des variations dans l'obliquité de l'écliptique, mais elles sont périodiques et dépendent à ce qu'on croit en Angleterre du mouvement de la Lune. La pièce de votre ami sur la manière d'observer l'inclinaison de l'aiguille aimantée a eu un accessit [(Euler 48a)]. Mais c'est une pièce de M. Daniel Bernoulli qui a eu le prix [(Bernoulli 48a)]. Je m'étais chargé de demander un récépissé comme vous me l'aviez dit et je vous l'aurais envoyé si j'avais vu par ce qu'en disait les juges qu'elle eût le prix. J'ai l'honneur d'être avec la plus parfaite estime, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur Clairaut (O IVA, 5, pp. 146-147).
Les résultats du prix de 1743 sont annoncés officiellement le 24 avril (cf. 24 avril 1743 (1)). Euler présente C. 29 à l'Académie de Berlin le 6 février 1744 (cf. 6 février 1744 (1)). La réponse d'Euler est perdue. Clairaut réécrit à Euler le 7 septembre (cf. 7 septembre 1743 (1)).
Bernoulli (Daniel), « Mémoire sur la manière de construire les boussoles d'inclinaison », Pièces qui ont remporté le prix de l'Académie royale des sciences en M. DCC. XLIII et M. DCC. XLVI sur la meilleure construction des boussoles d'inclinaison et sur l'attraction de l'aimant avec le fer, Paris, 1748, pp. 1-61, 1 pl [Télécharger] [5 septembre 1742 (1)] [Plus].
Clairaut (Jean-Baptiste), « Methodus generalis inveniendi Catenarias », Miscellanea Berolinensia, vol. 7, 1743, pp. 270-272, 1pl [Télécharger] [Sans date (1)] [Plus].
Euler (Leonhard), « De motu corporum in superficiebus mobilibus », Opuscula varii argumenti, 3 vol., Berlin, 1746-1751, vol. 1, 1746, pp. 1-136.
Euler (Leonhard), « De observatione inclinationis magneticae dissertatio », Pièces qui ont remporté le prix de l'Académie royale des sciences en M. DCC. XLIII et M. DCC. XLVI sur la meilleure construction des boussoles d'inclinaison et sur l'attraction de l'aimant avec le fer, Paris, 1748, pp. 63-96, 1pl [Télécharger] [5 septembre 1742 (1)] [3 décembre 1742 (1)] [Plus].
Euler (Leonhard), « Correspondance de Leonhard Euler avec A. C. Clairaut, J. d'Alembert et J. L. Lagrange », Leonhardi Euleri Opera Omnia, IV A, vol. 5, Ed. Juskevic A. P. et Taton R., Birkäuser, Basel, 1980 [4 mars 1739 (1)] [16 mai 1739 (1)] [Plus].
Courcelle (Olivier), « 23 avril 1743 (1) : Clairaut (Paris) écrit à Euler », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n23avril1743po1pf.html [Notice publiée le 14 février 2010].