5 août 1764 (1) : Clairaut (Paris) écrit à Lesage :
Je me hâte avec plaisir, Monsieur, de vous marquer que l'on vous avait mal informé du terme où devait paraître notre 5e volume des savans étrangers [cf. 27 juillet 1764 (1)]. Il n'est encore que très peu avancé, et ira assez lentement pour vous donner tout le temps d'arranger un ou deux mémoires, ainsi que vous paraissez le désirer. Choisissez les sujets qui vous amusent le plus à traiter, et surtout ceux qui sont le moins propres à produire des cavillations. Car nous n'en sommes pas exempts à nos lectures. Le génie impatient des Français se manifeste, ce me semble, encore plus chez les philosophes que chez les autres. Je vois quelquefois cinq ou six objections lancées à la fois, et se croisant dans la manière la plus confuse. La mort de M. Durand pourrait seule contribuer à retarder l'impression des pièces dont vous me demandez des nouvelles, mais il y a bien d'autres raisons qui s'y joignent, puisque depuis très longtemps aucune de nos pièces des prix ne paraît. Les libraires s'en soucient peu, et l'Académie ne paraît pas assez s'en occuper. Ce que vous me mandez des précautions que vous voulez prendre pour éviter tout reproche des personnes qui pourraient avoir quelque idée de commun avec vous, et les égards que vous voulez avoir pour des gens que vous combattez, me donnent une grande idée de votre sagesse et de votre douceur. Vous répondez bien à tout ce que M. Bertier m'avait dit sur votre compte. Malgré cela, vous aurez peut-être bien encore des querelles, parce que cela est inévitable. Pour moi, qui ai fait de mon mieux pour m'en épargner, je n'ai pas laissé que de m'en attirer, et j'y ai été autrefois sensible, mais j'ai pris le parti de ne plus répondre, et je suis très calme. M. d'Alembert en m'attaquant tout nouvellement, dans le troisième volume de ses Opuscules [(Alembert 61-80, vol. 3, cf. 11 juillet 1764 (1)], vient de me donner une belle occasion d'exercer ma philosophie, et je l'exerce. Je ne veux plus être sensible qu'au plaisir d'étudier pour le bien de la chose, de vivre avec mes amis, et de faire des vœux pour tous les gens qui méritent des lettres. À ce titre et à tout ce que je sais de votre caractère, recevez les assurances de l'attachement et de l'estime de votre très humble et très obéissant serviteur Clairaut Paris, 5 août 1764 [Adresse] À Monsieur / Monsieur Le Sage correspon / dant de l'Academie royale des sciences / a Geneve (Prevost 05, pp. 370-372) (BGE, Ms Supp. 512, ff. 200-201) (Jovy 22, pp. 48-49).
Cette lettre a été reçue le 11 août selon le registre de Lesage (BGE, Ms Supl. 519) (Jean-Daniel Candaux, CP, 22 octobre 2008). Clairaut répond à la lettre de Lesage du 27 juillet (cf. 27 juillet 1764 (1)). Le 5e volume des Sçavans étrangers ne contient aucun mémoire de Lesage. C'est la dernière pièce connue de la correspondance entre les deux hommes.
Jovy (Ernest), Une illustration scientifique vitryate : Le P. François Jacquier et ses correspondants, Vitry-le-François, 1922 [10 octobre 1739 (1)] [6 juillet 1743 (1)] [Plus].
Courcelle (Olivier), « 5 août 1764 (1) : Clairaut (Paris) écrit à Lesage », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n5aout1764po1pf.html [Notice publiée le 3 février 2012].