Alexis Clairaut (1713-1765)

Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765)


14 septembre 1761 (1) : Les sœurs Planström : interrogatoire Bragelongne (II) :
Du lundy 14 [septem]bre 1761

Fait venir de sa prison du Grand Chatelet Jean Baptiste, comte de Bragelonne, ci devant mousquetaire du Roy, agé de quarante un ans, natif de Paris, y demeurant rue de Limoges, apres serment.

Interrogé s'il n'a pas fait deloger lad[it]e de Pelletot de la rue de la Comedie Françoise pour aller demeurer avec luy à l'hotel de Modesne ou il avoit un apartement dans lequel il a fait apporter tous les meubles et effets de lad[ite] d[am]e de Pelletot, dont il s'est emparé.
A dit que non, et qu'il a repondu a cette demande dans le precedent interrogatoire [cf. 12 septembre 1761 (1) ].

Si la dame de Bragelonne sa femme n'est pas complice et confidente de sa conduite avec lad[it]e de Pelletot, et s'il n'a pas declaré publiquement a sa femme qu'il venoit de faire connoissance de lad[it]e de Pelletot avec laquelle il avoit couché, et qu'au moyen de ce qu'il en avoit fait sa maitresse, il auroit bientot tous les biens du mary qu'il feroit ensuite pourir a Bicêtre pour son credit
A dit que cela est absolument faux.

S'il n'est pas de vray qu'il a dit qu'il avoit trouvé la dame de Bragelonne sa femme couchée avec un mousquetaire, et s'il ne s'est pas plaint que sa f[emm]e lui avoit volé cent pistolles pour donner a son amant
A dit que cela est absolument faux.

Si apres avoir eté chassé de l'hotel de Modesne, il n'a pas eté demeurer rue de Grenelle avec la d[am]e de Pelletot qu'il presentoit a tout le monde pour sa maitresse.
A dit qu'apres sa retraite de l'hotel de Modesne occasionné[e] par les libelles diffamatoires donné[s] à la princesse par le s[ieu]r de Pelletot, il a eté demeuré avec sa f[emm]e, sa fille et ses domestiques chez lad[it]e de Pelletot, rue de Grenelle.

S'il n'a pas loué une chambre au premier etage sur le devant chez le marchand de vin voisin
A dit qu'ouy pour y faire coucher son valet de chambre [cf. 29 avril 1761 (2)], la f[emm]e de son valet [cf. 29 avril 1761 (1)] et ses enfants.

S'il n'avoit pas fait mettre dans cette chambre un lit dans sur lequel il a connu plusieurs fois charnellement la dame de Pelletot
A dit qu'il a fait mettre dans cette chambre un lit pour ceux auxquels il avoit destiné cette chambre, ainsy qu'il vient de le dire ci dessus, mais que jamais il n'a connu charnellement lad[ite] dame de Pelletot.

S'il n'a pas eté demeurer successivement avec lad[it]e de Pelletot rue de la Marche et rue de Limoges ou il a continué d'avoir habitude criminelle avec lad[ite] d[am]e de Pelletot

A dit que la dame de Pelletot est venue demeurer chez luy rue de la Marche et rue de Limoges, mais que jamais il n'a eû habitude criminelle avec lad[it]e de Pelletot.

S'il ne s'est pas livré en présence de plusieurs personnes a l'acte charnel avec lad[it]e de Pelletot, et s'il n'a pas invité le nommé Peintre, son domestique [cf. 3 avril 1761 (1)], a en faire autant avec la v[euv]e Courbon [cf. 26 mars 1761 (2)], ce qu'ils ont fait en sa presence
A dit que cela est absolument faux.

S'il n'a pas proposé à ce domestique et à d'autres de commettre avec luy le crime de sodomie, et s'il n'en a pas attaqué plusieurs auxquels il a passé [secretement] la main dans la culotte
A repondu que cela est un fait faux, et qu'il y a plainte rendue de sa part contre ce domestique nommé Peintre et sa mere qui a été decretée d'assigné pour être ouy a la requete de luy, repond[an]t, sous la designation d'une femme vestue de jaune et contrefaite.

S'il n'a pas prostitué des femmes et des filles, offrant aux hommes des femmes, et aux filles des amants
A dit que cela est faux.

S'il n'a pas eté debauché chez la v[euv]e Menard, couturiere, une fille a laquelle il a donné du mal, et qu'il a ensuite donné pour maitresse à son neveu en convenant avec elle qu'il partageroit le profit qu'elle pourroit tirer de son neveu [cf. 27 avril 1761 (3)]
A dit qu'il ne peut y avoir que des gens corrompu[s] et des gagne deniers de mercenaires qui ayent deposés de faits aussy peu vraisemblables, qu'au reste il nous observe que ces indignités ne sont que la repetition des libelles diffamatoires presentés a mad[am]e de Modesne dont il a rendu plainte, et pour raison desquels il a obtenu de decreter.

Pourquoy donc si ayant eû connoissance par ces pretendus libelles diffamatoires des reproches et des imputations qui lui etoient faites touchant sa conduite avec lad[it]e de Pelletot a t'il continué de vivre et demeurer jusqu'a ce jour avec lad[it]e de Pelletot
A dit que nulle raison ne pouvoit l'empecher de demeurer avec lad[it]e de Pelletot, qu'elle s'est venue refugier chez luy pour se mettre a couvert des poursuittes de son mary, que lad[it]e de Pelletot est amie de lad[it]e de Bragelonne et qu'il ne croit point avoir mal fait d'avoir retiré lad[it]e de Pelletot, n'ayant commis aucuns crimes avec elle.

S'il ne s'est pas emparé de l'esprit de lad[it]e de Pelletot au point qu'il luy a extorqué nombre d'actes en forme d'obligations et transports montant a des sommes considerables qu'il a montré a differentes personnes et interpellé quel est le montant de ces differents actes et quel[le] valleur il en a fourny
A dit que lad[it]e dame de Pelletot luy a fait une donnation de la somme de dix mil livres par elle reservée lors de son contract de mariage qu'elle luy a en outre fait des transports de differentes sommes a cause de beaucoup d'autres sommes considerable payées par luy, repondant, tant en son acquis qu'en celui du s[ieu]r de Pelletot, et pour ses pensions de logements et nourritures et de son laquais, ce dont il pourra justiffier en temps et en lieu.

Si lorsqu'il a accompagné lad[it]e de Pelletot au chateau de Pelletot, il n'a pas fait toutes sortes de violences et de degast au chateau de Pelletot
A repondu qu'il n'y a eté que comme amy de la d[am]e de Pelletot, qu'il y a eté avec son epouse, sa fille et une autre dame, et que le proces verbal de sorty dud[it] chateau fait sa decharge et le justifie entierement, et que d'ailleurs il n'etoit point partie pour l'execution de la sentence qui a autorisé lad[it]e de Pelletot à entrer dans le chateau.

S'il connoit la femme du nommée Claudien [cf. 27 avril 1761 (3)], officier de maison, elle maitresse couturiere
A dit qu'il n'en a pas d'idée.

Si la[dite] femme n'est pas venue un jour pour le voir a l'occasion d'un placet qu'elle vouloit presenter à M[onsieu]r le duc de Penthievre
A dit qu'il a quelque idée du placet a M[onsieu]r le duc de Penthievre, qu'une femme luy est venu proposer de donner, mais qu'il n'en scait pas davantage.

S'il n'est pas du vray qu'il a fait les plus horribles propositions a cette femme en luy disant que si elle ne voulait pas le faire d'une façon, elle feroit de l'autre
A dit que cela est absolument faux.

A luy remontré qu'en vain il deguise son commerce avec lad[it]e de Pelletot puisqu'il s'en est vanté dans nombre de maisons, qu'il a eté connu publiquement et qu'il a fait le scandale de tous ceux qui ont eté apporté [à portée] de le connoitre
A dit qu'il persiste dans les reponses qu'il a faites, qu'elles contiennent verité, que jamais sa conduite n'a eté scandaleuse, et que jamais il n'a eu commerce avec lad[it]e de Pelletot, qu'au contraire il a toujours vecu depuis vingt ans de mariage dans la meilleure vision et dans la meilleure inteligence avec la dame de Bragelonne sans se quitter l'un et l'autre depuis ce temps pendant plus de vingt quatre heures.

S'il n'a jamais eté en prison
A dit que non.

Lecture, a persisté et signé. De Bragelongne. Lenoir.

[Taxé une vacation]

Soit montré au procureur du Roy. Fait ce 14 [septem]bre 1761. Lenoir (AN, Y 10237, dossier Planström, pièce 6).
L'interrogatoire du comte de Bragelongne avait commencé le 12 (cf. 12 septembre 1761 (1)).

Vu son interrogatoire et celui de la dame de Pelletot (cf. 12 septembre 1761 (2)), le procureur du Roi, requerra un règlement à l'extraordinaire, conclusion suivie par le lieutenant criminel (cf. 15 septembre 1761 (1)).

Le comte de Bragelongne sera à nouveau interrogé le 24 février 1762 (cf. 24 février 1762 (1)).
Abréviation
  • AN : Archives nationales.
Courcelle (Olivier), « 14 septembre 1761 (1) : Les sœurs Planström : interrogatoire Bragelongne (II) », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n14septembre1761po1pf.html [Notice publiée le 4 mai 2009].