[c. 15 mai] 1762 : [D'Alembert] écrit dans le Journal encyclopédique :
Avis important à ceux qui envoyent des Extraits aux feuilles périodiques, par un mathématicien. On prie ceux qui fournissent des extraits de géométrie à certaines feuilles d'avoir soin que le manuscrit de ces extraits en soit bien lisible. Faute de cette précaution, celui qui met son nom à la tête de ces feuilles [Nous disons, celui qui met son nom à la tête de ces feuilles, car on sait que la plupart des extraits ne sont pas de lui NDA], et qui donne ces extraits comme étant de lui, quoi qu'il soit connu pour ignorer jusqu'aux termes même de mathématique, se trouve exposé à des méprises plaisantes. […] Il ne dirait point […], à trois reprises différentes (si on prenait la peine d'écrire lisiblement) que, selon M. d'Alembert, l'erreur commise dans le calcul de la dernière comète est de 1 mois sur 15. M. d'Alembert a dit qu'elle était de au moins d'un mois sur 18, et vraisemblablement d'un mois sur 5. […] [Ceux qui donnent ces extraits] ne diront point que le calcul de la comète de 1759 est le plus sublime effort que la géométrie ait encore fait. 1° Parce qu'il est ridicule de faire porter de pareils jugements à un journaliste qui n'a pas la pus légère teinture de géométrie. 2° Parce que la solution du problème des trois corps étant une fois trouvée, comme elle l'a été par plusieurs géomètres, le calcul des altérations des comètes n'est plus un grand effort de géométrie, mais seulement un grand effort d'arithmétique dont la gloire principale appartient à M. Clairaut, qui en abandonne une partie à ses collaborateurs dans ce long et fastidieux calcul. 3°. Enfin parce que la solution même du problème des trois corps, dans l'état de l'imperfection où elle est encore jusqu'ici, n'est pas le plus sublime effort de la géométrie ; de très habiles mathématiciens qui ont résolu ce problème, aussi bien qu'il le peut être, avouent qu'ils n'ont pu en résoudre d'autres, réellement plus difficiles, telle que ce lui de la précession (et non précision) des équinoxes. Ils ne diront point que les tables de la Lune de M. Clairaut sont les plus exactes qu'il y ait, parce que celles qu'il a publiées jusqu'ici, les seules dont on puisse juger avec connaissance de cause, sont beaucoup moins exactes que celles de M. Mayer [(Mayer 52)], et outre cela, d'un calcul si long, qu'aucun astronome n'en fait usage. Ils ne diront point que M. Euler est le seul qui puisse juger le différend qui s'est élevé entre MM. Clairaut et d'Alembert au sujet du problème des trois corps, parce que c'est insulter, en pure perte, plusieurs habiles géomètres français ou étrangers, qui sont aussi très en état de juger un pareil différent : MM. Daniel Bernoulli, Fontaine, d'Arcy, Bézout, l'abbé Bossut, Lagrange de Turin, le P. Frisi et plusieurs autres. Ils ne diront point que les académiciens les plus habiles se sont déclarés contre M. d'Alembert, parce qu'il n'y a aucun académicien (parmi ceux qui sont réellement les plus habiles) qui ne soit prêt à désavouer cette fausseté. Deux académiciens seulement (qui ne sont géomètres ni l'un ni l'autre) avaient d'abord hasardé quelques raisonnements à ce sujet ; un d'eux est depuis convenu (par écrit) de ses torts à cet égard, et a protesté du soin qu'il prendrait à l'avenir de ne mettre ni passion, ni chaleur, ni intérêt dans les choses de cette nature. […] P. S. Si l'auteur des extraits dont on vient de parler, juge à propos de se faire connaître, celui qui lui donne ici quelque avis charitable, se fera reconnaître sur le champ. Il n'aurait pas même rendu cet article public, s'il avait su précisément à qui s'adresser ; car il n'a pas cru devoir l'envoyer à M. Clairaut qui se défend beaucoup, à ce qu'on assure, d'avoir aucune part à des extraits si ridicules (Journal encyclopédique, 15 mai 1762, pp. 134-138).
D'Alembert répond à l'extrait donné dans l'Année littéraire (cf. [c. mars] 1762). D'Alembert avait parallèlement répondu à Clairaut le 18 janvier (cf. 18 janvier 1762 (1)). Clairaut niera être l'auteur de l'extrait de l'Année littéraire dans sa réponse à d'Alembert, parue dans le Journal encyclopédique (cf. [c. juin] 1762 (2)).
Courcelle (Olivier), « [c. 15 mai] 1762 : [D'Alembert] écrit dans le Journal encyclopédique », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/ncoc15maicf1762.html [Notice publiée le 15 septembre 2009].