28 février 1748 (2) : De la Rive (Genève) écrit à Cramer :
Monsieur Calandrin [Calandrini] nous a effectivement mis au fait sur le memoire de M[onsieu]r Clairaut [cf. 20 décembre 1747 (1)], il nous a lû il y eut samedy 8 jours, a la société, la lettre de cet academicien et quelque chose de son memoire et la réponse qu'il luy a faite [19 février 1748 (1)], et qui doit avoir passé par vos mains [cf. 20 février 1748 (2)]. Quoy que cette réponse soit tres polie, je doute qu'elle ait fait plaisir a M[onsieu]r Clairaut, qui me paroit s'estre bien aventuré dans son mémoire et etre clairement et habilement réfuté par M[onsieu]r Calandrini. Je ne comprends pas non plus comment M[onsieu]r Clairaut a pu regarder comme petite distance, en fait d'attraction ou de gravitation celle de la Lune a la Terre, et chercher une autre loy que celle du quarré des distances pour expliquer le le mouvement de l'apogée : puis que nous voyons tous les corps placés a la surface de la Terre suivre cette loy ou cette proposition, et que leur distance du centre est bien plus petite que celle de la Lune a la Terre et même au Soleil qui doit y être p[ou]r quelque chose. Il me semble que ce n'est que dans le contact, ou quasi contact, que l'on a pensé a d'autres lois comme du cube, quarré du cube, etc (BGE, Ms f. 657/a, f. 7).
La société dont parle de la Rive doit être cette « Académie » (cf. 12 décembre 1747 (1)), aussi connue sous le nom de « Société du samedi » : Avec la « Société des gens de lettres », fondée en 1739 par les professeur Gabriel Cramer, Jean-Louis Calandrini, Amédée de la Rive et Jean Jallabert, la philosophie naturelle devenait enfin l'objet de réunions régulières. Dans une lettre de décembre 1738 adressée à son collègue Jallabert, Cramer avait parlé de « faire à Genève une petite Académie des sciences en nous liant, un certain petit nombre d'amis et formant une Société où, sans faste et sans pédanterie, nous travaillerions de concert à nous instruire et nous amuser [Lettre du 21 déc[embre] 1738 (BGE : Ms SHAG 242, ff. 40-41) NDA.] ». Charles Bonnet, qui y adhéra d'emblée, semble indiquer qu'on y traitait aussi de sujets de métaphysique et que les polémiques n'en étaient d'ailleurs pas absentes [Dans ses Mémoires autobiographiques, Bonnet parle des polémiques déclenchées au sein de la « Société des gens de lettres » sur la question de la liberté et de la nécessité morale NDA.]. Dix ans plus tard, en 1748-1749, de la Rive proposa en tout cas les bons offices de cette Société, dite du samedi, à Micheli du Crest pour effectuer des relevés thermométriques dans un puits des environs de Genève [Lettre du 3 déc[embre] 1748 (AEG : archives privées 111580) NDA.]. Ce qui fut fait. A cette époque, il existait en réalité deux sociétés : celle, à caractère scientifique, qui se réunissait le samedi, et une autre, probablement plus littéraire, qui se réunissait le jeudi [Témoignage d'une lettre de Cramer à Jallabert du 14 sept[embre] 1747 « Comment vont les sociétés du Jeudi et surtout du Samedi ? » (lettre de Cramer à Jallabert (BGE : Ms SHAG 242, f. 57r). Et du même au même, 17 nov[embre] 1747 : « Voici une méchante relation de l'Assemblée publique de l'Académie des sciences. Vous voudrez bien en faire part à MM. de la Rive et Calandrini et Bonnet dans quelque Société du Samedi [cf. 17 novembre 1747 (1)NDM] » (BGE : Ms SHAG 242, f. 68v) NDA.] A l'une ou l'autre de ces sociétés appartenaient également le professeur d'histoire ecclésiastique Ami Lullin, le procureur général Jean-Robert Tronchin, le naturaliste Abraham Tremblay (à partir de 1752), le Dr Théodore Tronchin, sans oublier Benjamin de Langes de Lubières, collaborateur occasionnel et anonyme de l'Encyclopédie [La Société du samedi réunissant les professeurs de sciences de l'Académie, ainsi que Charles Bonnet, on serait tenté d'y associer au moins Tremblay et Théodore Tronchin, ainsi que le baron de Lubières, dont l'intérêt pour la science était connu NDA.]. C'est à l'évidence à de telles sociétés que se réfère l'auteur anonyme d'un « Essai sur les Sociétés littéraires établies à Genève » (1759), lorsqu'il parle des « canaux qui font passer dans les provinces les observations et les expériences faites dans la capitale [Journal helvétique, juillet 1759, pp. 31-60, ici p. 45. L'auteur utilise aussi l'expression de « conférences littéraires » NDA.] ». L'une ou l'autre de ces sociétés existait encore vers 1768-1769, époque à laquelle Horace-Bénédict de Saussure y fut associé (Sigrist 11, pp. 82-83).
Abréviations
BGE : Bibliothèque de Genève, Genève.
NDA : Note de l'auteur.
NDM : Note de moi, Olivier Courcelle.
Référence
Sigrist (René), La nature à l'épreuve : les débuts de l'expérimentation à Genève, 1670-1790, Classiques Garnier, 2011.
Courcelle (Olivier), « 28 février 1748 (2) : De la Rive (Genève) écrit à Cramer », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n28fevrier1748po2pf.html [Notice publiée le 14 juin 2010, mise à jour le 25 mars 2012].
Avec la « Société des gens de lettres », fondée en 1739 par les professeur Gabriel Cramer, Jean-Louis Calandrini, Amédée de la Rive et Jean Jallabert, la philosophie naturelle devenait enfin l'objet de réunions régulières. Dans une lettre de décembre 1738 adressée à son collègue Jallabert, Cramer avait parlé de « faire à Genève une petite Académie des sciences en nous liant, un certain petit nombre d'amis et formant une Société où, sans faste et sans pédanterie, nous travaillerions de concert à nous instruire et nous amuser [Lettre du 21 déc[embre] 1738 (BGE : Ms SHAG 242, ff. 40-41) NDA.] ». Charles Bonnet, qui y adhéra d'emblée, semble indiquer qu'on y traitait aussi de sujets de métaphysique et que les polémiques n'en étaient d'ailleurs pas absentes [Dans ses Mémoires autobiographiques, Bonnet parle des polémiques déclenchées au sein de la « Société des gens de lettres » sur la question de la liberté et de la nécessité morale NDA.]. Dix ans plus tard, en 1748-1749, de la Rive proposa en tout cas les bons offices de cette Société, dite du samedi, à Micheli du Crest pour effectuer des relevés thermométriques dans un puits des environs de Genève [Lettre du 3 déc[embre] 1748 (AEG : archives privées 111580) NDA.]. Ce qui fut fait. A cette époque, il existait en réalité deux sociétés : celle, à caractère scientifique, qui se réunissait le samedi, et une autre, probablement plus littéraire, qui se réunissait le jeudi [Témoignage d'une lettre de Cramer à Jallabert du 14 sept[embre] 1747 « Comment vont les sociétés du Jeudi et surtout du Samedi ? » (lettre de Cramer à Jallabert (BGE : Ms SHAG 242, f. 57r). Et du même au même, 17 nov[embre] 1747 : « Voici une méchante relation de l'Assemblée publique de l'Académie des sciences. Vous voudrez bien en faire part à MM. de la Rive et Calandrini et Bonnet dans quelque Société du Samedi [cf. 17 novembre 1747 (1) NDM] » (BGE : Ms SHAG 242, f. 68v) NDA.] A l'une ou l'autre de ces sociétés appartenaient également le professeur d'histoire ecclésiastique Ami Lullin, le procureur général Jean-Robert Tronchin, le naturaliste Abraham Tremblay (à partir de 1752), le Dr Théodore Tronchin, sans oublier Benjamin de Langes de Lubières, collaborateur occasionnel et anonyme de l'Encyclopédie [La Société du samedi réunissant les professeurs de sciences de l'Académie, ainsi que Charles Bonnet, on serait tenté d'y associer au moins Tremblay et Théodore Tronchin, ainsi que le baron de Lubières, dont l'intérêt pour la science était connu NDA.]. C'est à l'évidence à de telles sociétés que se réfère l'auteur anonyme d'un « Essai sur les Sociétés littéraires établies à Genève » (1759), lorsqu'il parle des « canaux qui font passer dans les provinces les observations et les expériences faites dans la capitale [Journal helvétique, juillet 1759, pp. 31-60, ici p. 45. L'auteur utilise aussi l'expression de « conférences littéraires » NDA.] ». L'une ou l'autre de ces sociétés existait encore vers 1768-1769, époque à laquelle Horace-Bénédict de Saussure y fut associé (Sigrist 11, pp. 82-83).