M[essieu]rs de Thury et Le Monnier ont fait le rapport suivant des tables de la Lune [C. 41] de M[onsieu]r Clairaut. Nous commissaires nommés par l'Académie avons éxaminé les tables de la Lune que M[onsieu]r Clairaut va publier, et qui sont fondées sur les formules générales qu'il a données dans sa piece qui a remporté le prix de l'Académie de Petersbourg [C. 39], c'est à dire en adoptant le principe général de la gravitation tel que l'admet Mr Newton. M[onsieu]r de Montigny a fait l'extrait de cette premiere piece [cf. 14 décembre 1753 (1)]. Quand aux tables, l'auteur n'a rien changé ni aux coefficients qui determinent toutes les équations, ni à l'excentricité que les observations auxquelles M[onsieu]r Clairaut a comparé sa théorie sembloient demander. Il a fait seulement quelques changements dans la forme des tables qui les rendent plus commodes dans la pratique. Voici donc en peu de mots, une idée générale de la disposition de ces mêmes tables. Les seize premieres pages ne renferment autre chose que des moyens mouvemens. La 1ere des cinq colonnes donne le moyen mouvement de la Lune, la 2nde son anomalie moyenne, la 3e l'argument moyen de la latitude, la 4e la distance moyenne des deux astres. Enfin la 5e l'anomalie moyenne du Soleil. Ces tables des moyens mouvements sont suivant l'usage ordinaire partagées en époques, jours de l'année, heures et minutes. M[onsieu]r C[lairaut] a cru qu'il êtoit suffisant quant à présent d'étendre les époques depuis 1700 jusqu'à 1771 et a eu égard aux années bissextiles qu'il a désignées. Les pages suivantes renferment 22 tables d'équations qu'on doit appliquer au lieu moyen de la Lune pour avoir son vrai lieu dans l'orbite. Il a eu l'attention qu'aucune de ces tables ne soient à deux entrées, et il n'y en a que 3 où l'on soit obligé de prendre des parties proportionnelles : dans les autres, on peut les prendre à vuë. L'usage en est facile, aussitôt que les éléments sont calculés. M[onsieu]r C[lairaut] pour faciliter le calcul de ces arguments, a fait graver tous leurs titres sur une planche avec l'énoncé, fort abregé des opérations qu'ils exigent. Par ce moyen non seulement on épargne la peine de repeter à chaque application beaucoup de titres assés longs à écrire, et l'on évite aussi les méprises que l'on pourroit commettre en les copiant. D'ailleurs par les procedés dont on voit des éxemples, l'auteur soulage le lecteur de l'embarras des préceptes qui sont toûjours plus difficiles à retenir que des éxemples devenus familiers ; et M[onsieu]r C[lairaut] a diminué, autant qu'il êtoit possible, la peine du calculateur. Dans la planche gravée pour les exemples, l'on a laissé à côté de la colonne où doivent être écrites les valeurs des aguments, deux colonnes pour y écrire les équations qui y répondent. Dans la 1ere l'on place toutes les équations qui se trouvent additives, et dans la 2de celles qui sont soustractives. Dès qu'on les a sommées toutes les deux, l'on retranche la plus petite de la plus grande, et l'on applique le reste au lieu moyen de la Lune pour avoir son lieu vrai. Ensuite l'on trouve les tables des équations qui doivent être appliquées ainsi que la somme des équations du lieu à l'argument moyen de la latitude, ce qui donne l'argument vrai : Elles sont au nombre de cinq, et leurs arguments sont compris dans ceux que l'on a déja calculés : d'ailleurs leur place est marquée dans la planche dont on vient de parler. De ces cinq tables, l'on passe à trois autres dont les arguments sont encore du nombre de ceux que l'on a à calculer : Les trois équations qu'elles donnent êtant appliquées à 5 d[egrés] 9' 22'' (nombre que M[onsieu]r C[lairaut] a fixé, par plusieurs observations de la latitude de la Lune dans les temps des limites) lui donnent la vraïe inclinaison de l'orbite. Par ces deux quantités, et par les tables ordinaires, l'auteur calcule tant la réduction à l'écliptique que la latitude. La premiere de ces deux quantités ne peut pas differer de 2 a 3'' de ce que l'on trouveroit pour cette quantité par les 30 équations annoncées dans sa théorie, tant pour la position du nœud, que pour la vraïe inclinaison. Quand à la latitude calculée par ces éléments, elle pourroit dans les cas les plus malheureux être distante d'environ 1' 1/4 de celles que donneroient toutes les équations omises tant dans la détermination du nœud, que de celles de l'inclinaison. Or afin d'éviter cette erreur, M[onsieu]r C[lairaut] donne 8 petites équations ou tables dont les arguments qui sont fort aisés à former, sont aussi écrits dans la planche gravée avec leurs procédés. Ces 8 équations corrigent directement la latitude sans être obligé de rectifier le nœud, ni l'inclinaison. Enfin M[onsieu]r C[lairaut] donne les tables des équations qu'il faut appliquer à un nombre constant pour avoir la parallaxe : Ces équations ont pour argument les premiers de ceux qui ont eté calculés pour le lieu, et sont toutes tres petites ; elles sont au nombre de dix ; mais les six dernieres ne pouvant monter toutes ensembles qu'à 3'' à 4'' on peut les négliger, si l'on ne craint pas de commettre de pareilles erreurs. Le nombre constant que l'auteur a pris est 56' 42'' en supposant d'après les Institutions astronomiques [(Le Monnier 46a)] que 08'' soit la plus grande parallaxe possible. Au reste quoi que toutes ces tables soient nombreuses, leur usage est facile, même assés court, vû la petitesse de prèsque toutes les équations, et l'omission que l'on peut commettre sans scrupule des minutes et secondes dans le calcul du plus grand nombre de ces équations. Nous avons cru cet ouvrage digne de l'impression (PV 1753, p. 673-675).
Grandjean de Fouchy donne l'extrait de ce rapport le même jour (cf. 22 décembre 1753 (4)). Un manuscrit de ce rapport est conservé dans le dossier de séance (AAS, DS, décembre 1753). Dans ce même dossier est conservée une note manuscrite rédigée sur une grande feuille : Examen du livre de M. Clairaut qui a pour titre Théorie de la Lune etc. Ayant voulu lire le livre de M[onsieu]r Clairaut, j'ai été arreté des le commencement par une difficulté qui me paroît tres considérable. Je vay en faire part à l'Académie et à M[onsieu]r Clairaut, et ensuitte j'ay cherché a substituer une autre methode à celle de M[onsieu]r Clairaut que je vous communiqueray aussi. […] M[onsieu]r Clairaut est plus en etat de suivre cette nouvelle méthode cy que personne : il a sur cela de tres grandes avances (AAS, DS, décembre 1753).
Abréviations
AAS : Archives de l'Académie des sciences, Paris.
C. 39 : Clairaut (Alexis-Claude), Théorie de la Lune déduite du seul principe de l'attraction réciproquement proportionelle (sic) aux quarrés des distances... Pièce qui a remporté le prix de l'Académie impériale des sciences de Saint Pétersbourg en 1750..., Saint-Pétersbourg, 1752, in-4°, 92 p [Télécharger] [6 décembre 1750 (1)] [Sans date (1)] [(7 novembre) 27 octobre 1737 (1)] [Plus].
Courcelle (Olivier), « 22 décembre 1753 (3) : Clairaut rapporté », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n22decembre1753po3pf.html [Notice publiée le 28 décembre 2010].
Examen du livre de M. Clairaut qui a pour titre Théorie de la Lune etc.
Ayant voulu lire le livre de M[onsieu]r Clairaut, j'ai été arreté des le commencement par une difficulté qui me paroît tres considérable. Je vay en faire part à l'Académie et à M[onsieu]r Clairaut, et ensuitte j'ay cherché a substituer une autre methode à celle de M[onsieu]r Clairaut que je vous communiqueray aussi. […] M[onsieu]r Clairaut est plus en etat de suivre cette nouvelle méthode cy que personne : il a sur cela de tres grandes avances (AAS, DS, décembre 1753).