M[essieu]rs Clairaut et de Buffon ont lu le rapport suivant, sur le memoire de M[onsieu]r le Rond d'Alembert dont il a été parlé ci-dessus [cf. 22 février 1741 (1)]. Nous avons examiné par ordre de la compagnie, un écrit de M[onsieu]r d'Alembert sur l'intégration des équations differentielles à deux variables etc. Cet ouvrage est divisé en parties : Dans la premiere l'auteur integre en quelques cas, les équations differentielles à deux variables, en les representant par l'équation generale dx-zdy=0 dans laquelle z est une fonction de x et de y, et en mettant cette équation dx-zdy=0 sous cette forme dx-zdy-ydz+ydz+0 ce qui n'y change rien, et permet toûjours d'integrer toutes les fois que z est une fonction de y, parce que l'integrale de dx est x, celle de -zdy-ydz est -zy, et que celle de pzdz est aussi donnée au moins par une construction. Cela est clair, parce que l'équation generale dx-zdy=0 est intégrable d'elle même, toutes les fois que z est une fonction de y, sans qu'il soit besoin de la changer de forme. Mais voicy les avantages que l'auteur trouve à ce changement. En divisant les trois premiers termes dx-zdy-ydz de cette équation qui sont integrables par quelque puissance ou par une fonction de son integrale x-xy, elle demeure toûjours integrable ou du moins constructible pourvû cependant que le dernier terme qui est toûjours celui qui embarasse, soit égal à une fonction de z multipliée par dz comme dans le premier cas. L'auteur met en forme de theoreme le resultat de ce calcul, et le [...] des corollaires et des scholies de ces theorèmes, avec quelques exemples qui nous ont fait juger qu'il est très versé dans l'usage des nouveaux calculs. La seconde partie de l'écrit de M. d'Alembert roule sur les équations differentielles à trois et quatre termes en particulier. L'auteur reduit toutes les equations differentielles de trois termes à la forme xmdx+ady+bypdz, et il fait voir que si p=1 ou si p=m/(m+1) l'équation est toûjours constructible, et en faisant m=-2 il trouve l'équation proposée par M. le comte Ricati [Riccati], sur laquelle M. Daniel Bernoulli s'est exercé en 1724 ; et la methode de calcul de l'auteur revient à celle de M. Bernoulli, et même est plus directe. Il donne aussi quelques autres cas d'intégration des équations à trois termes dont il deduit entre autres choses un theoreme curieux sur les courbes dont les arcs parcourus sont une puissance du temps dans un milieu resistant, et il passe ensuite aux équations à quatre termes, et les réduit aux deux formes suivantes : xmdx+bypxndx+cysdx+ady=0 ou xmdx+bypdx+cysxrdy+ady=0 Il donne quelques cas où ces formules peuvent s'integrer, et il tire de son calcul plusieurs theoremes pour l'integration des equations avec des scholies et des remarques très judicieuses. Cet ouvrage en general suppose une grande connoissance de la geometrie et du calcul, et nous a paru fait avec intelligence, et avec une grande clarté. A Paris ce 9e mars 1741 (PV 1741, pp. 82-83).
PV : Procès-Verbaux, Archives de l'Académie des sciences, Paris.
Courcelle (Olivier), « 11 mars 1741 (1) : Clairaut rapporteur », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n11mars1741po1pf.html [Notice publiée le 6 août 2007].