J'ai parlé ainsi sur le prix. L'Académie avoit proposé pour le sujet du prix de cette année 1759, L'examen des efforts qu'ont a soutenir toutes les parties du vaisseau dans le roulis et le tangage, et la meilleure maniere de procurer a leur assemblage la solidité nécessaire pour resister a ces efforts sans prejudicier aux autres bonnes qualités du vaisseau [cf. 20 avril 1757 (1)]. Elle a partagé ce prix entre deux pieces, dont l'une luy a parû renfermer une theorie exacte et ingenieuse [(Euler 71e)], et dont l'autre a semblé contenir des vuës utiles et nouvelles pour la construction [(Groignard 69)]. La premiere est le piece n° 1 qui a pour devise Insequitur clamorque virum stridorque rudentum, dont l'auteur ne s'est pas fait connoitre [La pièce sera attribuée à Euler, comme le sait d'ailleurs déjà Clairaut le 10 avril (cf. 10 avril 1759 (1)), mais elle est en réalité de son fils (cf. 6 septembre 1758 (1))]. La seconde est la piece n° 2 qui a pour devise Vis unita major, dont l'auteur est M. Grognard, constructeur des vaisseaux du Roy à L'Orient [Lorient]. Elle propose pour le sujet du prix de 1761, La meilleure maniere de lester et d'arrimer un vaisseau et les changements qu'on peut faire en mer a l'arrimage soit pour faire mieux porter la voile au navire, soit pour lui procurer plus de vitesse, soit pour le rendre plus ou moins sensible au gouvernail (PV 1759, f. 362v).
La nouvelle est rapportée par le Mercure de France, juin 1759, p. 186. Clairaut était juge (cf. 6 septembre 1758 (1)) et le sera encore pour le prix de 1761 (cf. 6 septembre 1760 (1)). Des mémoires sur la vie et l'œuvre d'Antoine Groignard, ingénieur constructeur en chef de la marine et de la Compagnie des Indes, anobli en 1776, obtenant 6 000 livres de pension en 1781 se trouvent dans les papiers de famille conservés aux Archives nationales (AN, 41 AP 1). Groignard construit 39 vaisseaux, 18 frégates, 280 petits bâtiments ; cet ancien élève de Duhamel est admis au conseil de tous les secrétaires d'état à la marine ; nommé chevalier de Saint-Louis en 1780, il est anobli l'année suivante [!]. En 1796, il assure la remise en état du port de Toulon et obtient alors du général Bonaparte une aide importante, qui facilite l'organisation de l'expédition d'Égypte (Dupont de Dinechin 99, p. 129). Un buste de Groignard se trouve au Musée maritime du port de Brest (Levot 47). Selon Dupin : Groignard, ingénieur plus célèbre, qui put encore concourir avec honneur pour le prix de 1759, sans l'obtenir [!], puisque la palme fut décernée au grand Euler [!], Groignard proposa, pour la proue seulement, un système de bordage, de membrure et de vaigrage, qui présente des parallélogrammes fortifiés par leurs diagonales. Cette idée ne resta point un pure spéculation. En effet, dès 1772, Clairon des Lauriers, autre ingénieur français très estimé, la mit en pratique lorsqu'il construisit la frégate l'Oiseau (Dupin 22, pp. 253-254).
Abréviations
AN : Archives nationales.
PV : Procès-Verbaux, Archives de l'Académie des sciences, Paris.
Dupont de Dinechin (Bruno), Duhamel du Monceau, CME, 1999.
Euler (Leonhard), « Examen des efforts qu'ont à soutenir toutes les parties d'un vaisseau dans le roulis et dans le tangage », Recueil des pièces qui ont remporté les prix de l'Académie royale des sciences, depuis leur fondation, 9 vol., Paris, 1727-1777, vol. 8, 1771, 5e pag., pp. 1-47, 2 pl [Télécharger] [4 septembre 1756 (2)] [20 avril 1757 (1)] [Plus].
Groignard (Antoine), « Mémoire », Recueil des pièces qui ont remporté les prix de l'Académie royale des sciences, depuis leur fondation, 9 vol., Paris, 1727-1777, vol. 7, Paris, 1769, 4e pag., pp. 1-51 [Télécharger] [6 septembre 1758 (1)] [10 avril 1759 (1)] [Plus].
Levot (Prosper), « Notice biographique sur M. Groignard », Essais de biographie maritime, Brest, 1847, pp. 137-163.
Courcelle (Olivier), « 25 avril 1759 (1) : Assemblée publique », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n25avril1759po1pf.html [Notice publiée le 4 juin 2011, mise à jour le 26 janvier 2012].
Groignard, ingénieur plus célèbre, qui put encore concourir avec honneur pour le prix de 1759, sans l'obtenir [!], puisque la palme fut décernée au grand Euler [!], Groignard proposa, pour la proue seulement, un système de bordage, de membrure et de vaigrage, qui présente des parallélogrammes fortifiés par leurs diagonales. Cette idée ne resta point un pure spéculation. En effet, dès 1772, Clairon des Lauriers, autre ingénieur français très estimé, la mit en pratique lorsqu'il construisit la frégate l'Oiseau (Dupin 22, pp. 253-254).