[Le thermomètre d'esprit de vin] était gelé le lundi matin, et avait remonté à la température des caves de l'observatoire. M. de Maupertuis l'a porté en cet état dans là chambre ; dans le premier instant qu'il a dégelé, il a beaucoup descendu, et ensuite il a remonté à la température de la chambre. Le temps s'est adouci, et le thermomètre de mercure n'était plus qu'à 25 le soir et il est tombé alors de la neige par un grand vent de Sud. M. de Maupertuis a voit commencé chez M. Brunius, pendant qu'on mesurait la base, une expérience qu'il a réitérée plusieurs fois à Torneå, pour s'assurer si les toises et les perches de bois s'allongeaient ou se raccourcissaient dans les différentes températures d'air : il avait toujours dans sa chambre deux de ces toises de bois que nous avions ajustées dans l'étalon de fer, et en même temps deux autres dans la cour, exposées au froid : le matin, le thermomètre étant à 14 ou 15 au-dessus de 0 dans sa chambre, il présentait les unes et les autres de ces toises dans l'étalon ; il n'a jamais trouvé aucun allongement ni raccourcissement sensible ; il aurait plutôt soupçonné quelque allongement dans celles qui avaient été exposées au froid. Par les hauteurs ou distances au zénith de l'étoile δ du dragon, prises à Pello et à Torneå, nous avions l'amplitude de l'arc du méridien, compris entre les deux observatoires. Il n'y avait plus qu'à la comparer à la distance en toises de Kittis à Torneå, que la longueur de notre base connue nous donnait moyen de calculer. Le parallèle de l'observatoire de Torneå était différent de celui du clocher, qui avait servi au dernier triangle. Nous n'avions pas encore mesuré la distance d'un de ces parallèles à l'autre ; mais par les mesures que j'avais prises pour faire le plan de la ville, je savais à très peu de chose près la distance entre ces deux parallèles. Nous nous occupâmes tous en particulier à calculer nos triangles ; M. de Maupertuis a donné ceux qu'il a faits par plusieurs suites de triangles, dans son livre de la figure de la Terre, avec toutes les corrections et les réductions que demanderait toute la rigueur de la géométrie. Je donnerai seulement à la fin de mon journal, les calculs que j'en fis alors par la meilleure suite de triangles, et sans les avoir réduits à l'horizon. Outre les occupations communes, et les observations qui se présentaient quelquefois à faire, quoique très rarement, chacun se faisait quelque occupation particulière : je passai bien des jours à mettre au net mes cartes de la ville de Torneå, et du cours du fleuve dans l'espace compris par les triangles. M. de Maupertuis avait porté beaucoup de livres, il nous en prêtait : nous étions longtemps ensemble après le dîner et le souper : nous nous allions voir souvent : nous faisions des visites dans la ville, et quelquefois aux environs. Tout cela nous faisait passer le temps sans ennui (Outhier 44, pp. 145-147).
Courcelle (Olivier), « 7 janvier 1737 (1) : Torneå », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n7janvier1737po1pf.html [Notice publiée le 2 novembre 2008].