Alexis Clairaut (1713-1765)

Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765)


3 avril 1761 (2) : Les sœurs Planström : déposition Gilbert :
[En marge : 15e [témoin], r[écolé], c[onfronté] aux deux [accusés]]

Aimée Gilbert, fille agée de vingt quatre ans, coeffeuse, d[emeuran]te a Paris rue Guisarde, paroisse Saint Sulpice [...] dépose [...] qu'un jour sur les sept a huit heures du matin, la deposante allant voir la nommée Suzette [Suzanne Hussenot, cf. 26 mars 1761 (1)] qu'elle connoissoit et qui demeuroit alors chez la dame de Pelletot, rue de la Comedie, vit chez lad[ite] dame de Pelletot le s[ieur] de Bragelogne, en robbe de chambre, en pantouffles et en bonnet de nuit ; qu'elle a plusieurs fois entendû la dame de Pelletot dire du mal de son mary et le traitter de coquin, que cependant elle paraissoit dans les dispositions de s'arranger avec lui pourvu qu'il lui fit reparation d'honneur de touttes les infamies qu'il avoit repandues contre elle, ajoutant que son mari etoit un coquin et un miserable qui avoit une maitresse dont elle avoit beaucoup a souffrir et dont il avoit des batards, et que c'etoit ce qu'il l'avoit determiné a se separer d'avec lui ; qu'elle lui a aussy entendu dire beaucoup de mal de la nommée Suzette, qui l'avoit servy, et lui disant que c'etoit une coquine ; qu'a l'egard de la deposante, tout ce que lad[ite] dame de Pelletot lui a demandé, c'est de lui rendre justice, qu'il y a trois ou quatre mois que la deposante rencontra lad[ite] dame de Pelletot a S[aint] Sulpice, qu'apres avoir entendû la messe, la deposante qui etoit accompagnée d'une petit fille de sa voisine, et la dame de Pelletot sortirent de l'eglise pour causer ensemble, qu'elle lui demanda si elle connoissoit un fossoyeur a quoi la deposante lui repondit que non, mais qu'elle la mena a un particulier boiteux, donneur d'eau benite, dans la meme eglise, qui lui indiqua le nomme Touzet, fosoieur auquel elle demanda un morceau du crane de quelque mort en disant a la deposante que c'etoit un remede qu'elle vouloit faire, que [le] fosoieur luy apporta ce qu'elle demandoit envelopé dans une morceau de papier, et lui aiant donné pour boire, elle fut sur le champ a la sacristie pour la retribution d'une messe qu'elle pria de faire le lendemain, attendu qu'alors il étoit plus de midy et invita en meme tems le pretre qui paroissoit etre de sa connoissance a venir diner le lendemain chez elle [...] [A requis salaire taxé vingt sols] (AN, Y 10237, dossier Planström, pièce 1).
L'information se poursuit avec la déposition de Philippe Carillon (cf. 4 avril 1761 (1)).

Le 21 novembre, lors du récolement :
[Aimée Gilbert] ajoute qu'elle ne peut asseurer si si c'est le sieur de Bragelonne qu'elle a veu chez la d[am]e de Pelletot en robe de chambre, en pantoufles et en bonnet de nuit, ayant toujours entendu dire par la servante nommé Suzette [Suzanne Hussenot, cf. 26 mars 1761 (1)], que c'etoit le led[it] s[ieu]r de Bragelonne ; ajoute aussi qu'elle n'a pas pas entendu la dame de Pelletot demander au fossoyeur un morceau de crasne de quelque mort, mais quelque chose sans pouvoir dire quoy pour faire un remede (AN, Y 10237, dossier Planström, pièce 20).

Le même jour, lors de la confrontation avec le comte de Bragelongne :
L'accusé a dit pour reproches que la temoin est camarade et amie de Suzanne Ussenot avec laquelle elle a soupé un mardy gras il y a près de deux ans, et avec un n[omm]é Vidrine coureur, le n[omm]é François Garçon m[archan]d de vin rüe S[ain]t Benoist, un autre garçon m[archan]d de vin, ainsy qu'avec la servante de cabaret n[omm]ée Marguerite Boudin f[emm]e de Dutroit sculpteur, qu'elle a dû voir ledit Vidrine coucher ce jour là avec Suzanne Ussenot ainsy qu'elle temoin est venüe le declarer a lui, accusé, au Grand Chatelet un soir en presence d'une personne qui etoit dans la chambre de lui, accusé, et de meme au Petit Chatelet en presence trois personnes et de la d[am]e de Pelletot, que la temoin a apporté des lettres et billets a lui, accusé, d'un quidam par lequel elle disoit avoir esté invitée à quitter la ville de Sezanne en Brie, et l'a engagé a differentes reprises de luy donner six francs pour qu'elle restât en ce pays cy, attendu qu'elle luy seroit très utile pour dire cent choses contre ladite Suzanne Ussenot, et notamment que led[it] Vidrine avoir couché avec lad[ite] Ussenot et que l'un des garçons, ma[rchan]d de vin se plaignoit que lad[ite] Suzanne luy avoit donné du mal, qu'en outre, l'année d[erniè]re la temoin est venüe rüe de Grenelle chez la d[am]e de Pelletot avertir que lad[ite] dame que lad[ite] Suzanne Ussenot ou autre lui est venüe offrir de l'argent pour deposer contre lui, accusé, se reservant a fournir d'autres reproches par ecrit, n'en ayant proposé d'autres pour le present.
Le temoin repondant aux reproches a dit qu'elle convient avoir souppé le mardi gras de l'année 1759 avec Suzanne Ussenot, la servante de cabaret n[omm]ée Marguerite, le n[omm]é Vidrine, coureur, et le garçon, m[archan]d de vin du cabaret qui demeure dans la rüe Saint Benoit, l'autre n'y estant pas, qu'elle a connoissance que lad[ite] Suzanne a couché la nuit de jour là avec le coureur n[omm]é Vidrine, ayant veu elle, temoin, sortir le coureur nud en chemise du lit de lad[ite] Ussenot, lorsque que la d[am]e de Pelletot rentra de ville, qu'elle temoin a esté au Grand Chastelet voir l'accusé y ayant esté envoyé par la d[ame]e de Pelletot du Petit Chatelet, qu'elle a esté voir la d[am]e de Pelletot au Petit Chatelet, que parce qu'estant à [S]ezanne en Brie, elle a reçu une lettre de Paris signée Leroy, par laquelle on lui mandoit de partir sitost la presente reçüe, et qu'a Paris elle reçut une billet ecrit de la meme main, et que l'on avoit mis entre les mains de son hostesse, par lequel on lui marquoit d'aller trouver la d[am]e de Pelletot au Petit Chatelet, qu'après donc avoir esté au Petit Chatelet voir lad[ite] d[am]e de Pelletot, lad[ite] d[am]e lui demanda lse noms de ceux qui souppoient avec Suzanne le mardy gras, et elle, temoin, ayant dit qu'il falloit qu'elle s'en retournât à son pays, qu'elle ne pouvoit pas rester à Paris, et que meme elle n'avoit pas assés d'argent pour faire sa route, lad[ite] dame luy demanda ainsy : eh bien ! Combien vous faudrait-il, a quoy elle repondit, si j'avois seulement six francs, cela me suffiroit, sur quoy la d[am]e de Pelletot repliqua, si je les avois, je vous les donnerois, mais allés voir M[onsieur] de Bragelonne au Grand Chatelet, il pourra vous faire ce plaisir là, ce qui fit qu'elle, temoin, fut tout de suite au Grand Chatelet voir l'accusé où etant, elle remit a l'accusé un billet que la d[am]e de Pelletot luy avoit donné pour parler à l'accusé, lequel billet n'estoit pas cacheté, que l'accusé en la voyant luy demanda d'abord si on ne luy avoit pas donné de l'argent pour deposer, et qu'elles estoient les noms de ceux qui avoient souppé avec Suzanne Ussenot le mardy gras, à quoy elle dit ce qu'elle sçavoit touchant Suzanne Ussenot, en ajoutant qu'elle n'avoit pas reçu d'argent pour deposer, comme de fait elle n'en a pas reçu, ayant meme au contraire esté demandé 3 # au s[ieu]r de Pelletot, parce qu'elle se trouvoit dans un pressant besoin, lequel s[ieu]r de Pelletot lui refusa les trois livres en lui disant que dans un autre moment, il lui rendroit ce service, mais qu'il ne le pouvoit, attendu son procès ; qu'elle n'a pas engagé l'accusé à lui donner six francs, et ne lui a pas promis de luy estre utile, et de dire cent choses contre Suzanne Ussenot, observe seulement que le billet remis par la d[am]e de Pelletot à elle temoin pour l'accusé, portait que l'accusé pouvoit lui donner six francs, qu'elle a en effet instruit l'accusé que Suzanne avoit couché avec coureur, et qu'elle avoit entendu dire que le garçon m[archan]d de vin autre que celui de la rüe S[ain]t Benoist avoit dit que lad[ite] Suzanne lui avoit donné du mal, qu'il est faux qu'elle ait dit, il y a un an, chez la dame de Pelletot que lad[ite] Suzanne lui avoit voulu donner de l'argent pour deposer contre l'accusé et la d[am]e de Pelletot, et pour justifier de ses reponses, elle nous a representé la lettre signée Leroy à elle adressée, ainsy qu'un ecrit de la meme ecriture commençant pas ces mots : j'ay esté obligé, et finissant par ceux cy, ce qui en resultera, avec une enveloppe à l'adresse de Mlle Edmée Gilbert, rüe Guisarde, lesquelles de notre ord[onnan]ce sont demeurées annexées à la confrontation, lesquelles ont esté seulement paraphées de nous et non de l'accusé qui n'a pas voulu les parapher ny de la temoin qui a declaré ne sçavoir ecrire ny signer, de ce en guise.
Lecture faite de la deposition et recolement de la temoin en presence de l'accusé, la temoin y a persisté et dit que le contenu de ses deposition et recolement veritables, qu'elle connoit bien l'accusé present, mais ne peut asseurer positivement si c'est lui qu'elle a veu chez la d[am]e de Pelletot en robbe de chambre, en pantoufles et en bonnet de nuit, ayant seulement veu par derriere une particulier assés grand vestu d'une robbe de chambre, lequel particulier lad[ite] Suzette luy dit alors estre le sieur de Bragelonne, accusé present.
L'accusé a dit qu'il est absolument faux et impossible que le temoin l'ait veu chez la d[am]e de Pelletot rüe de la Comedie, en robbe de chambre, en pantouffles et en bonnet de nuit, et que le surplus de la deposition de la temoin ne le regarde pas.
[Un billet intercalé] J'ai eté obligé de partir pour la campagne pour quinze jours, vous aurez la bonté d'aller trouver madame de Pelletot qui est au Petit Chatelet, qui vous expliquera la chose, vous ne serez pas fachée de tout ce qui en resultera. [au dos ] paraphé au désir des confrontations du 21 [novem]bre 1761. Lenoir.
[Un second billet intercalé ] paraphé au désir des confrontations du 21 [novem]bre 1761. Lenoir. J'ai eté mademoiselle a votre adresse rue Guisarde pour une commission que j'ai a vous communiquer. Je vous prie donc de ne pas retarder votre voyage et de partir aussitot. Mon adresse est rue de la Harpe chez M[onsieu]r Bouchy, marchand de vin, prez la Sorbonne. Comme l'on m'a dit que vous ne deviez revenir que dans huit jours et que le [...] pour quelque chose qui vous fera plaisir. Je vous ecris cette lettre pour vous faire porter sitot la presente recu[e]. Je suis charmé de trouver cette occasion de vous etre bon a quelque chose et de vous prouver la sincerite avec laquelle j'ai l'honneur d'etre, mademoiselle, votre tres humble et tres obeissant serviteur Leroy. A Paris ce dimanche [adresse] A Mademoiselle / Mademoiselle Aimé Gilbert rue Guizarde, A Paris (AN, Y 10237, dossier Planström, pièce 22).

Le même jour, lors de la confrontation avec la demoiselle de Planström :
L'accusée a dit pour reproches qu'elle sçait que le s[ieu]r de Pelletot et la n[omm]ée Suzanne Ussenot ont fait tous leurs efforts pour parvenir a suborner le temoin, et que la temoin lui en est convenue dans la rüe de Grenelle et au Petit Chatelet ou elle l'a fait venir en luy faisant ecrire a Sezanne par le n[omm]é Leroy qui est de la connoiss[an]ce de la temoin, n'a proposé d'autres reproches.
La temoin repondant au reproche a dit que le s[ieu]r de Pelletot et Suzanne Ussenot n'ont point cherché a la suborner, qu'elle n'en a pas fait l'aveu dans la rüe de Grenelle ny au Petit Chatelet a la temoin [l'accusée !], et qu'elle n'a esté au Petit Chatelet que parce qu'elle a reçu a Sezanne en Brie une lettre signée Leroy, et a Paris un billet que lui a remis son hotesse, ecrit sans doute par le meme Leroy qui avoit signé la lettre, ainsy qu'elle l'a declaré dans sa conf[rontati]on avec le s[ieu]r de Bragelonne, observant qu'elle ne connoit aucun particulier du nom de Leroy, et qu'elle n'a aucune connoissance de celuy qui a ecrit le billet, et à l'instant ayant representé à l'accusée la lettre signée Leroy et le billet de la meme ecriture avec l'enveloppe qui ont esté representés a la temoin dans la conf[rontati]on avec le [sieu]r de Bragelonne, elle a declaré ne pouvoir reconnoitre led[it] ecrit, que cependant la temoin lui a montré au Petit Chatelet une lettre que le n[omm]é Leroy lui a dit avoir ecrit a la temoin, ne sçait si la lettre representée est la lettre que la temoin a dit recevoir dudit Leroy, lequel Leroy est bourgeois de Paris sans etat et cy devant employé et demeure actuellement au village d'Issy pres Paris, ce fait, les ecrits n'ont pas eté paraphé de la temoin qui a declaré ne le vouloir, de ce en guise, et l'ayant esté ci devant de nous.
[Lecture déposition et récolement]
L'accusée a dit que jamais le s[ieu]r de Bragelonne n'a esté chez elle dans la rue de la Comedie en robbe de chambre, en pantoufles et en bonnet de nuit, qu'elle a dit que Suzanne estoit une coquine, et qu'elle ne s'en dedit pas, qu'elle a pû dire du mal de son mary parce qu'elle n'a pas de bien a en dire, que le fait passé dans l'eglise de S[ain]t Sulpice est vray, si ce n'est cependant que ce n'est pas un morceau de crasne qu'elle a demandé mais un cloux du cercüeil d'un mort pour guerir du mal de dents, ainsy qu'elle l'a declaré par son interrog[atoi]re auquel elle s'en rapporte (AN, Y 10237, dossier Planstrom, pièce 21).

Le témoin est également évoqué dans le factum du comte de Bragelongne (cf. [Décembre] 1762 (2)) et celui de la demoiselle de Planström (cf. [Décembre] 1762 (1)).
Abréviation
  • AN : Archives nationales.
Courcelle (Olivier), « 3 avril 1761 (2) : Les sœurs Planström : déposition Gilbert », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n3avril1761po2pf.html [Notice publiée le 23 mai 2009].