Alexis Clairaut (1713-1765)

Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765)


22 juillet 1736 (1) : Avasaxa :
Nous reçûmes même le lendemain dans cet habillement, M. le gouverneur et toute sa suite. Nos tentes étaient trop petites, et on n'aurait pas pu s'y mettre à couvert du Soleil ; nous fîmes construire par nos soldats une salle à manger, avec des arbres et des feuillages, garnie d'une table et de deux bancs ; nous avions là tout le reste de notre vin, et ce fut là qu'il finit.

La descente de la montagne est très difficile. Après avoir descendu dans un peu de bois, on trouve de grands rochers larges et glissants, posés très inégalement ; on rentre ensuite dans la forêt jusqu'au pied de la montagne, où l'on trouve la rivière de Tengeliö, qui s'entoure de trois côtés, et se jette ensuite dans le grand fleuve de Torneå. Dans ces montées et descentes, toutes difficiles qu'elles étaient, deux de nos soldats marchant d'un pas ferme, portaient sur leurs épaules le quart de cercle de deux pieds, et ainsi deux à deux nos hardes et nos vivres. Ils ne se refusaient point au travail, quelque continuel qu'il fût. Malgré le plus pénible travail, ces Finnois infatigables vivent de très peu : quelques poissons secs qu'ils ont dans un sac fait d'écorce de bouleau et pendu à leur côté, avec une barrique de lait aigri, font toute leur nourriture et leur boisson. Ils ont quelquefois un peu de gâteau d'orge extrêmement sec, et à mesure qu'ils boivent de leur lait aigre ils remplissent d'eau la barrique.

Les habitants du voisinage vinrent en grand nombre sur notre montagne. Plusieurs d'entre eux venaient offrir leurs bateaux et leurs services ; nous donnions par jour à chaque homme deux dahlers, qui font environ 24 sols de notre monnaie, salaire considérable pour ce pays là. L'empressement de nous servir en engagea quelques-uns à acheter les places de ceux qui nous avaient amenés de Torneå ; d'autres nous apportaient du lait, des moutons, ou du poisson. Sur les deux premières montagnes, Niwa et Cuitaperi, nous avions mangé beaucoup de saumon frais ; nous en achetâmes un à Cuitaperi long de 3 pieds 10 pouces ; nous ne le payâmes que 3 livres, et le vendeur trouvait que c'était beaucoup ; il n'en aurait pas eu plus de 40 sols des gens du pays.

Půllingi était la seule montagne où nous eussions un signal du côté du Nord, et il en fallait trouver un autre pour continuer les triangles plus loin. Je partis pour cela avec M. Helant [Hellant] et six soldats dans deux bateaux, le dimanche sur les 8 heures du soir. Nous nous embarquâmes sur la rivière de Tengenliö ; nous traversâmes le lac de Portimo, et continuâmes encore sur la rivière jusqu'à trois heures du matin (Outhier 44, pp. 66-68).

Référence
Courcelle (Olivier), « 22 juillet 1736 (1) : Avasaxa », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n22juillet1736po1pf.html [Notice publiée le 9 octobre 2007].