Le lendemain mercredi dès le grand matin, nous sommes tous allés au signal septentrional de la base : nous l'avons fait rebâtir d'une construction presque aussi solide que les maisons du pays, en lui conservant très scrupuleusement le même centre. Nous n'avions à prendre que le seul angle, entre Avasaxa et le signal méridional de la base, et nous n'avons pu faire cette observation qu'à 4 heures après midi a cause des fumées ; il a fallu même envoyer un homme étendre un drap bien blanc sur le signal. À 9 heures nous sommes retournés souper et coucher chez M. Brunius. Sa maison était la meilleure retraite que nous eussions ; elle est placée à peu près au milieu de l'espace que comprennent nos triangles, et fort près de l'extrémité septentrionale de notre base. Nous y trouvions toujours trois chambres, que nous pouvions occuper sans déranger la famille, qui était fort nombreuse. On nous y fournissait abondamment toutes les choses nécessaires à la vie, et chacun s'y portait avec empressement à nous rendre service. Le bon père très âgé et aveugle, la mère aussi âgée que lui, leur fils et leur belle-fille, avec leur famille et plusieurs domestiques, étaient une image très naturelle de la maison des anciens patriarches. L'hospitalité est exercée assez généralement dans tout le pays : si le besoin de repos ou la crainte du mauvais temps nous obligeait à nous retirer dans quelque maison, le maître avant qu'on lui ait rien dit, quelquefois même n'ayant point d'interprète pour nous faire entendre, s'empressait à nous ouvrir une chambre qui paraît n'être destinée qu'aux étrangers, et demeurait debout à nous regarder ; sa famille s'assemblait autour de lui, et chacun bientôt s'empressait de nous servir. S'il faisait tant soit peu froid, le feu était promptement allumé : et assez souvent ils apportaient le peu qu'ils avaient à manger, avant que nous l'eussions demandé. Comme M. Helant [Hellant], le seul interprète Finnois que nous avions, ne pouvait pas être partout ; pour ne pas manquer du nécessaire en son absence, nous avions appris à saluer, à demander du lait, du beurre, du pain, de l'eau, ou à boire (Outhier 44, pp. 91-92).
Courcelle (Olivier), « 22 août 1736 (1) : Oswer Torneå », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n22aout1736po1pf.html [Notice publiée le 24 octobre 2007].