Le jeudi fête de l'Ascension, le temps fut fort gros ; nous allâmes très vite et tout penché sur le côté, depuis Skagen jusqu'au près du détroit du Sund. Le pilote tout le jour n'a pas perdue de vue un navire qui allait devant nous, et y a toujours tenu le cap. J'ai demeuré tout le jour sur le pont, ne pouvant souffrir d'être enfermé ; j'étais obligé de me tenir à un cordage vers le bord le plus élevé du pont. Nous étions si penchés, que l'autre bord du pont était souvent couvert de mer. Dès qu'il fut nuit le capitaine et le pilote furent bien embarrassés ; ils craignaient l'entrée du détroit, et craignaient également de demeurer en mer, et d'être jetés par les vents sur quelques terres. On plia toutes les voiles, et on passa une terrible nuit dans des roulis affreux et continuels. Tout ce qui était dans les armoires se heurtait et roulait avec fracas. Cette situation nous paraissait d'autant plus effrayante, qu'elle était nouvelle pour nous. M. de Maupertuis conservait tout son sang froid, et nous rassurait par sa sérénité, et même par la gaîté de son esprit (Outhier 44, pp. 12-13).
Courcelle (Olivier), « 10 mai 1736 (1) : Dunkerque – Elseneur », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n10mai1736po1pf.html [Notice publiée le 4 septembre 2007].