2 mars 1761 (1) : Le comte Joseph Teleki écrit dans son journal :
L'autre jour, en déjeunant avec Monsieur Clairaut, nous avons convenu d'aller aujourd'hui à Saint-Germain. Je suis donc allé le chercher en voiture. Nous nous sommes rendus, lui, sa sœur cadette, Mademoiselle Goulier [Mlle Gouilly, cf. [c. juin] 1757 (2)], et moi, chez Monsieur Ferner. Saint-Germain se trouve a environ cinq lieues de Paris. Son vieux château, ancienne demeure des rois, n'est pas du tout beau de l'extérieur. Comme il faisait mauvais, nous ne sommes point entrés voir l'intérieur. Il a quatre bastions selon l'ancien goût. Tout près de Saint-Germain, il y a une forêt où le Roi a l'habitude de chasser et où il a chassé aujourd'hui même. Afin de le voir, nous sommes allés du logis de Monsieur Ferner, dans la forêt, au lieu-dit du « Rendez-Vous ». C'est là que le Roi, venant de Versailles, quitte son carrosse pour monter à cheval et c'est aussi l'endroit où les chasseurs se réunissent. On y voit un petit bâtiment, une sorte de grange, ne servant qu'à permettre au Roi de s'habiller pour monter à cheval. Ce bâtiment n'est pas beau, mais vu son peu d'utilité, ce ne serait vraiment pas nécessaire qu'il le fût. Le Roi arriva, peu après nous, dans un carrosse tiré par huit chevaux d'une beauté ordinaire. Ayant quitté le carrosse, il entra dans cette maison pour mettre sa redingote (comme les français en portent quand il pleut) et ses bottes. Son cheval bai n'était pas beau, plutôt laid et vieux à le voir de près. En passant devant notre voiture, le Roi ôta son chapeau, sans doute parce que la sœur [!] de M. Clairaut se trouve être une belle femme. Nous nous sommes beaucoup moqués d'elle. En rentrant à Saint-Germain, Monsieur Ferner dirigea notre voiture vers un point d'où nous eûmes l'occasion de contempler le magnifique paysage. Ensuite nous sommes entrés au « Prince de Galles vis-à-vis de la Panrisse », où Monsieur Ferner a pris quartier. Rentré bien tard, vers les neuf heures, j'ai demandé à Monsieur Clairaut les poésies du jésuite Boscovich, écrites en langue latine, à Londres, et traitant des taches sombres du Soleil et de la Lune, à l'occasion des éclipses (Teleki 43, pp. 114-115).
Comme Ferner le racontera de son côté (cf. 2 mars 1761 (2)), la « sœur de M. Clairaut » est en fait sa petite amie, Marie-Anne Gouilly (cf. [c. juin] 1757 (2)). Le comte Teleki avait été chez Clairaut le 27 février (cf. 27 février 1761 (1)), et y retournera le 7 (cf. 7 mars 1761 (1)).
Courcelle (Olivier), « 2 mars 1761 (1) : Le comte Joseph Teleki écrit dans son journal », Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765) [En ligne], http://www.clairaut.com/n2mars1761po1pf.html [Notice publiée le 9 mars 2012].